Electricité, gaz : ce rapport qui tord le cou au discours des eurosceptiques

Electricité, gaz : ce rapport qui tord le cou au discours des eurosceptiques

Un document de 170 pages en faveur d’une intégration plus poussée des réseaux électriques nationaux. A quelques jours des élections européennes, la publication du dernier rapport de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) sonne comme un avertissement à ceux qui voudraient faire table rase des mécanismes économiques en œuvre au sein de l’Union.

Ces dernières décennies, les interconnexions entre la France et ses pays voisins n’ont cessé de se renforcer. Entre 2020 et 2023, nos capacités d’importation d’énergie ont même progressé de 31 %, et nos capacités d’exportation de 21 %. En gaz, la France possède désormais 8 interconnexions avec 5 pays. En électricité, elle en possède 37 avec 7 autres nations. Ainsi, nous avons la capacité d’exporter en moyenne à chaque instant 20 GW d’électricité, soit l’équivalent de la production d’environ 20 réacteurs nucléaires, et d’importer quasiment autant !

Loin d’être une faiblesse, ce maillage de plus en plus dense augmente la résilience aux pays qui en font partie, estiment les experts de l’énergie. En temps de paix, il facilite les transferts d’une région à l’autre, avec pour objectif à terme d’envoyer le surplus de production solaire de l’Espagne vers l’Allemagne ou l’énergie hydroélectrique de la Norvège vers l’Europe centrale.

Une rentabilité démontrée

En temps de guerre, il permet également une forme de solidarité. Le cas des échanges entre la France et l’Allemagne est emblématique : après l’attaque russe sur l’Ukraine, l’Allemagne s’est retrouvée en grande difficulté dans le secteur du gaz du fait de sa forte dépendance. La France, de son côté, connaissait un déficit d’approvisionnement en électricité en raison de l’arrêt de plusieurs réacteurs confrontés à un problème de corrosion sous contrainte. Les deux pays ont donc trouvé un accord : la France a mis en place en octobre 2022 un canal d’exportation de gaz vers l’Allemagne. De son côté, l’Allemagne a reporté la fermeture de ses trois dernières centrales nucléaires, aidant ainsi la France à passer l’hiver.

“Sur la période 2022-2023, les interconnexions ont démontré leur rentabilité économique”, ajoute la CRE. En France, les recettes nettes collectées par RTE aux interconnexions ont atteint 2,9 milliards d’euros, réduisant ainsi les factures des utilisateurs du réseau. Du côté du gaz naturel, les échanges ont également dégagé un montant record – 441 millions d’euros – reversé aux consommateurs.

Bien sûr, les interconnexions ne résolvent pas tous les problèmes liés à l’énergie. Elles n’ont rien à voir avec le très contesté mécanisme de l’Accès régulé à l’électricité nucléaire historique (Arenh) qui oblige – jusqu’en 2025 – EDF à vendre une partie de son électricité à un prix bradé. Elles n’empêchent pas non plus les Etats de taxer les prix de l’électricité, alors même que sur les marchés, les tensions disparaissent.

Au moins, la création de nouvelles capacités d’interconnexion électrique permettra véritablement d’intégrer les énergies renouvelables et de faire face à la croissance prévue de la demande électrique dans l’ensemble des pays de l’Union. L’investissement est colossal. Il prend encore peu de place dans les débats, très concentrés sur l’immigration, la défense, ou la date d’interdiction de vente des véhicules thermiques. L’Ukraine, en revanche, a bien compris tout l’intérêt de ces réseaux interconnectés. Elle se rêve déjà en plaque tournante de la distribution de gaz au sein de l’Europe.

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