Emmanuel Macron, la dissolution pour tordre le bras

Emmanuel Macron, la dissolution pour tordre le bras

Pendant une heure dimanche soir, après l’annonce des résultats cataclysmiques des élections européennes pour la majorité, la principale phrase martelée par les responsables politiques de tous bords tient en une formule : “Macron, c’est fini.” Le second quinquennat serait terminé avant même d’être à son mitan. Puis, à 21 heures, deus ex cathedra, le président a parlé. Pour faire l’inverse de ce qu’il disait il y a un mois, dans La Tribune Dimanche, à propos du rendez-vous du 9 juin : “C’est l’élection des députés européens. La conclusion sera donc d’abord européenne.”

“En tout cas, partout et tout de suite, il faut que s’organise l’action civique. […] La France en effet est menacée de dictature. […] Eh bien non, la République n’abdiquera pas, le peuple se ressaisira, le progrès, l’indépendance et la paix l’emporteront avec la liberté.” Le 30 mai 1968, le général de Gaulle, tout juste revenu de Baden-Baden, dissout l’Assemblée nationale. La chienlit, non ! La dissolution 2024 s’inspire de celle-là. Emmanuel Macron n’a eu de cesse dans son intervention de dénoncer la chienlit parlementaire, la chienlit démocratique presque, et le poids de l’extrême droite équivaut, dans sa bouche, à “la menace de dictature” évoquée par le général. La chienlit au premier jour, ce dimanche, la chienlit au dernier jour, le 7 juillet, après le second tour des élections législatives ?

Un ultime face-à-face avec l’extrême droite

Aussitôt l’entourage du chef de l’Etat s’est employé à démontrer que le geste de dissoudre, qui suppose “audace, dépassement, prise de risque”, était “au cœur de [son] ADN politique”, dans un summum de post-rationalisation – grande spécialité s’il en est de la Macronie. Car il s’agit moins d’un dernier sursaut du macronisme que d’une tentative de tordre le bras des électeurs dans un ultime face-à-face avec l’extrême droite.

Bien sûr, “il ne faut pas avoir peur du peuple français”, a dit Jordan Bardella, alors porte-parole du Rassemblement national (en 2018, pour défendre le RIP, le référendum d’initiative populaire) – pardon, ont répété les soutiens d’Emmanuel Macron toute la soirée dimanche. Mais l’idée, en écartelant une fois pour toutes la Nupes, en surprenant la droite, en bousculant Renaissance, le MoDem et Horizons, est de forcer “les forces républicaines”, comme on dit à l’Elysée, à “aller chercher une majorité”.

La campagne des législatives qu’il n’a pas menée en 2022, Emmanuel Macron la mènera en 2024. Avec un train de retard, donc. Et c’est dans une autre dissolution, la dernière en date, celle de 1997, qu’il puisera une raison d’espérer. Cette année-là, les résultats au terme de la campagne furent l’inverse de ce que prédisaient les sondages au soir de l’annonce de Jacques Chirac. Lui voulait conforter son Premier ministre Alain Juppé, il se retrouva avec Lionel Jospin à Matignon.

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