Les détails du budget 2025 souhaité par le Premier ministre se précisent, ce mercredi 2 octobre. Après avoir donné les grandes lignes du prochain projet de loi de finances lors de sa déclaration de politique générale mardi, une source gouvernementale révèle ce mercredi 2 octobre quelques détails sur le contenu du texte que portera Michel Barnier.
Citée par l’AFP, cette source avance d’abord une date pour la présentation du budget 2025 : le 10 octobre prochain, en Conseil des ministres. Cette date confirme ainsi le retard inédit de ce projet de loi de finances, plus d’une semaine par rapport à la date butoir fixée au 1er octobre.
Certaines mesures du projet de loi de finances seront d’ailleurs introduites par amendements du gouvernement lors du débat parlementaire, afin de permettre au Parlement de disposer des 70 jours habituels pour débattre du budget, en vue d’une promulgation de la loi avant le 1er janvier 2025. Un débat qui s’annonce houleux, alors que les détails du texte révèlent plus d’économies que de recettes pour redresser les comptes publics.
40 milliards d’économies et 20 milliards de recettes
En effet, cette source gouvernementale confirme à l’AFP la stratégie dévoilée mardi par Michel Barnier : trouver de nouvelles recettes fiscales et, principalement, baisser les dépenses publiques. Le projet de loi prévoirait ainsi un effort de 60 milliards d’euros, en incluant notamment un peu moins de 20 milliards de recettes nouvelles.
Dans le détail, ce montant devrait comprendre des mesures fiscales visant à verdir l’économie, avec 1,5 milliard d’euros en faveur de la transition écologique. Elles viseraient en particulier les transports très polluants, avec notamment un malus pour les véhicules thermiques, alors que le secteur aérien français s’attend à être taxé d’un milliard d’euros supplémentaire.
Surtout, l’accent est mis sur le redressement des comptes publics, en prévoyant environ 40 milliards d’euros de réductions de dépenses. Parmi ce montant, des économies supplémentaires de 5 milliards d’euros seront notamment demandées aux ministères, et les opérateurs de l’Etat (universités, France Travail, CNRS…) devront freiner leurs dépenses à hauteur de 1 milliard d’euros.
Un tiers des économies liées aux dépenses sociales
Autre piste d’économies avancées : la progression des dépenses d’assurance-maladie sera davantage maîtrisée, tandis que les collectivités locales devront lisser leurs dépenses, après avoir été accusées par le gouvernement sortant d’avoir contribué au dérapage du déficit public en 2024.
Cependant, la mesure phare de ces économies concerne les dépenses sociales, avec le report de l’indexation des retraites du 1er janvier au 1er juillet 2025. Les montants des pensions de retraite sont habituellement revalorisés selon l’inflation au 1er janvier de chaque année.
Si on ne connaît pas pour le moment le montant exact que cette mesure permettrait d’économiser, on peut l’estimer. Selon le directeur de la Sécurité sociale (DSS), Pierre Pribille, auditionné mercredi matin au Sénat, l’indexation des pensions en janvier 2024 (+ 5,3 %) a représenté “une dépense supplémentaire d’environ 15 milliards d’euros”.
Une sous-indexation des retraites risquée
L’idée de jouer sur l’indexation pour ralentir les dépenses publiques était dans l’air depuis le printemps dernier. L’ex-ministre du Budget Thomas Cazenave y avait fait allusion dès février, mais le président de la République avait immédiatement fait part de son opposition. En juin, après la dissolution de l’Assemblée nationale, Emmanuel Macron avait répété cette position, estimant que “le pouvoir d’achat des retraités, ce n’est pas une variable d’ajustement”. Cette mesure est en effet risquée sur le plan électoral, au regard de la part importante de retraités parmi les électeurs actifs.
Toutefois, celle-ci est défendue régulièrement par des économistes et des experts. Ceux-ci rappellent que les retraités français jouissent d’un meilleur niveau de vie, par rapport aux actifs, que dans beaucoup d’autres pays. Pour autant, repousser la date d’entrée en vigueur de l’indexation peut aussi être perçu comme une “autre manière de désindexer” les retraites de l’inflation, selon une note de la Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques (Ifrap), un cercle de réflexion très libéral.
Dans cette note publiée en juin, l’Ifrap indiquait que cette mesure avait déjà été mise en place par les précédents gouvernements français : en 2009, 2014, 2015 et 2018. Le groupe d’influence libéral estimait ainsi que “depuis 2013, les pensions auront perdu 2 ans et 9 mois de réévaluation” au total.
Des estimations de croissance et de déficit confirmées
Enfin, la source gouvernementale citée par l’AFP confirme les estimations économiques évoquées par Michel Barnier face à l’Assemblée mardi : le gouvernement prévoit un décrochage du déficit public à 6,1 % du produit intérieur brut (PIB) en 2024, avec l’objectif de le ramener à 5 % en 2025. La croissance du PIB atteindrait quant à elle 1,1 % l’an prochain, comme cette année, a indiqué cette source gouvernementale.
Epinglée pour déficit excessif par Bruxelles et dans le viseur des agences de notation qui se prononceront sur sa note souveraine dans les prochaines semaines, la France a vu sa dette gonfler jusqu’à 3 228 milliards d’euros, fin juin, soit 112 % du PIB. C’est le niveau d’endettement le plus élevé des pays de l’UE devant la Grèce et l’Italie.
Si les estimations du gouvernement se confirment, le niveau d’endettement de 2024 devrait atteindre cette fois près de 113 % du PIB en 2024 et flirterait avec les 115 % en 2025, avant de décroître progressivement à mesure que le déficit baissera, selon la même source. Avec l’espoir de passer ce déficit sous la barre des 3 % du PIB en 2029, comme l’a évoqué Michel Barnier mardi. Soit deux ans plus tard que ce qui était jusqu’ici promis à l’Union européenne.