100e anniversaire de la mort de Kafka : les ouvrages à lire (ou relire)

100e anniversaire de la mort de Kafka : les ouvrages à lire (ou relire)

Il y a des lettres dont on connaît chaque ligne, ou presque, telle celle-ci écrite par Franz Kafka à son ami Max Brod (1884-1968) : “Mon très cher Max, ma dernière volonté : tout ce qui se trouve dans ce que je laisse derrière moi […], tout, qu’il s’agisse de journaux intimes, de manuscrits, de lettres (écrites par moi ou par d’autres), de dessins, etc., doit être totalement brûlé sans être lu…” – Franz a déjà publié La Métamorphose en 1915, en allemand, et divers textes, mais la renommée tarde, la confiance manque. Max n’en a rien fait, cherchant au contraire à diffuser l’œuvre de son ami, décédé le 3 juin 1924. Grâce à l’écrivain et journaliste tchèque, le monde entier a pu ainsi découvrir quelques joyaux tels Le Procès, Le Château, ses journaux ou encore Lettre au père.

Mais il ne suffisait pas de contredire les instructions de son ami, il fallait aussi sauver tous ces textes épars des mains des nazis puis, une fois installé à Tel-Aviv, les éloigner des conflits moyen-orientaux, en en rapatriant notamment une partie à Zurich. C’est cette course contre la perte que relate aujourd’hui Elsa Veinstein, auteure notamment des Philosophes lisent Kafka (éd. de la Maison des sciences de l’homme, 2019), dans J’irai chercher Kafka. Une enquête littéraire (Flammarion), alors qu’on fête le 100e anniversaire de la mort du Praguois à l’âge de 40 ans.

Un anniversaire qui suscite, comme à l’accoutumée, de nombreuses publications, à commencer par la réédition en Folio de sept textes (romans, journaux, lettres, nouvelles et récits) issus des quatre volumes de la Pléiade publiés en 2018 et 2022 et traduits pour la plupart par Jean-Pierre Lefebvre, professeur émérite à l’École normale supérieure, qui a pu s’appuyer, à l’inverse d’Alexandre Vialatte (premier traducteur dès les années 1930), sur l’édition allemande de 1982, fruit d’un travail minutieux sur les manuscrits. Une belle initiative que d’offrir ainsi à petit prix Le Procès, Le Château, La Métamorphose ou encore Amerika, la plupart de ces ouvrages étant préfacés par Jean-Pierre Lefebvre. A noter cependant que Philippe Lançon assure la préface du Procès mais aussi celle de la réédition de La Métamorphose par Le Livre de poche. Bref, on s’arrache le journaliste de Libération.

Autant de romans qui ne figurent pas dans le troisième et dernier tome de la monumentale biographie (à rebours), Kafka, signée Reiner Stach et publiée au Cherche-Midi. Et pour cause ! Ce sont Les années de jeunesse du futur docteur en droit et employé d’un office d’assurances que l’éminent spécialiste allemand relate aujourd’hui dans un volume de 800 pages. De la naissance de Kafka, en 1883, à 1911, l’ouvrage est tout à la fois récit de formation et portrait d’une ville et d’une époque qui voient la montée des idéologies, de l’antisémitisme et des conflits sociaux. A méditer.