Budget 2025 : hausses d’impôts, baisse des dépenses… Ce que l’on sait des annonces à venir

Budget 2025 : hausses d’impôts, baisse des dépenses… Ce que l’on sait des annonces à venir

Revalorisation des pensions reportée, postes de fonctionnaires supprimés, exonérations de charges patronales abaissées… Le gouvernement français dévoile ce jeudi 10 octobre son très délicat projet de budget pour 2025. L’objectif : trouver 60 milliards d’euros — soit 2 % du PIB — sur la seule année 2025, dans le projet de loi de finances (PLF) et de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour redresser des finances publiques à la dérive. À titre de comparaison, le plan de rigueur annoncé en 2011 par le gouvernement de François Fillon prévoyait une réduction du déficit de 65 milliards d’euros sur cinq ans.

Ce projet inédit s’appuiera sur un effort partagé : coté dépenses sur une réduction des dépenses publiques, et coté recette une augmentation des impôts. “Ce freinage il est indispensable, sinon on va droit vers une crise financière”, a averti vendredi Michel Barnier. Se défendant de tout “choc fiscal”, le Premier ministre Michel Barnier a promis d’épargner “les plus fragiles” et “ceux qui travaillent”. Un exercice à haut risque tant l’effort prévu pour réduire le vertigineux déficit français est massif, et que l’Assemblée nationale fragmentée lui est hostile. Voici ce que l’on sait déjà des mesures qui seront proposées par le gouvernement.

Les services publics, principaux contributeurs

Préparé “en extrême urgence” et présenté avec un retard inédit dans un calendrier bousculé par les législatives anticipées, le projet de budget prévoit de réaliser deux tiers de l’effort, soit quelque 40 milliards d’euros, grâce à des réductions de dépenses publiques. L’Etat en sera le plus gros contributeur, à hauteur de 20 milliards d’euros.

Les fonctionnaires sont dans le viseur, tandis que les ministères devront fournir 5 milliards d’économies, et geler leurs crédits. “On va fusionner des services publics. On va sans doute ne pas remplacer tous les fonctionnaires quand ils ne sont pas en contact direct avec les citoyens, tous les fonctionnaires qui partent en retraite”, a prévenu Michel Barnier sur France 2.

Un tiers des économies concernera la Sécurité sociale, qui doit dégager 15 milliards d’euros. Avec comme mesure phare le report de six mois, au 1er juillet, de l’indexation des retraites, qui doit permettre de dégager “environ 4 milliards d’économies”, a précisé à l’AFP le ministère du Travail. Il est également envisagé de transférer vers les complémentaires santé une fraction des remboursements de consultations médicales et de rogner la participation de l’Assurance maladie au financement des arrêts maladie.

Les collectivités locales ponctionnées

Les collectivités locales porteront le reste des économies publiques. Le président d’Intercommunalités de France, Sébastien Martin, a estimé “entre 5 et 7 milliards d’euros” les économies demandées en 2025 aux collectivités, dans une réaction à l’AFP. Accusées par le précédent gouvernement d’avoir laissé s’envoler leurs dépenses, elles espèrent pouvoir infléchir cette ponction lors du débat parlementaire.

“Nous n’acceptons aucune des mesures” du budget, a déjà réagi mardi 8 octobre le président de la commission des Finances locales et vice-président délégué de l’Association des maires de France (AMF) André Laignel. Il estime que c’est plutôt “9,5 milliards d’euros” que l’Etat leur réclame, en y ajoutant la baisse, confirmée par les ministres selon lui, de 1,5 milliard d’euros du Fond vert l’an prochain, et les effets de l’inflation. Il a dénoncé “une ponction sans précédent sur une seule année”.

Les aides à l’embauche d’apprentis subiront par ailleurs un coup de rabot, comme les allègements de charges. Cette hausse du coût du travail est décriée par le Medef, première organisation patronale, qui y voit une menace pour la compétitivité des entreprises françaises et des “centaines de milliers d’emplois”.

Hausses d’impôts pour les plus fortunés

20 milliards seront couverts par des hausses d’impôts via une mise à contribution des plus fortunés et des plus grosses entreprises. Un revirement opéré au nom de la “justice fiscale”, après sept ans de baisse offensive de la fiscalité, dans un pays encore champion des prélèvements obligatoires et des dépenses. Les 65 000 foyers fiscaux les plus fortunés (soit 0,3 % du total) s’acquitteront d’une surtaxe “exceptionnelle” qui porterait leur taux minimal d’imposition à 20 %. “Cette mesure rapporterait 2 milliards d’euros” supplémentaires, a indiqué Michel Barnier jeudi dernier sur France 2.

Et 300 entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse un milliard d’euros paieront plus que le taux de 25 % de l’impôt sur les sociétés, pendant “un an et peut-être deux ans”. D’après plusieurs journaux, dont Le Monde et Les Echos, ces prélèvements rapporteraient 8 milliards d’euros.

Électricité, sécu, jeux d’argent…

Du côté des recettes toujours, en plus de mesures de verdissement de l’économie prévues pour rapporter 1,5 milliard d’euros et qui viseraient les transports très polluants, le secteur aérien s’attend à être taxé d’un milliard supplémentaire.

Le gouvernement “envisage” aussi de relever l’an prochain “au-delà” de 32,44 euros par mégawattheure la taxe sur l’électricité dite TICFE, qui avait été drastiquement abaissée pendant la crise inflationniste au nom du bouclier énergétique. Le relèvement à 32,44 euros par MWh était censé apporter 5 milliards d’euros, le montant de recettes escompté au-delà de ce seuil n’a pas été précisé.

Concernant la sécurité sociale, le gouvernement envisagerait, selon le journal Les Echos, un système unique de réduction générale dégressive des cotisations patronales jusqu’à trois fois le Smic – en lieu et place des multiples barèmes d’allègement actuels. Ce qui pourrait rapporter 5 milliards d’euros aux caisses de l’Etat, selon le journal. Les jeux d’argent sont également dans le viseur de l’exécutif, selon cette source, avec une augmentation prévue des prélèvements sociaux du secteur.

Une adoption aux forceps annoncée

L’heure est jugée grave, avant le verdict des agences de notation sur la solidité financière de la France ces prochaines semaines, dont Fitch vendredi. Après un dérapage attendu à 6,1 % cette année, l’objectif est de ramener le déficit public à 5 % dès 2025, pour revenir en 2029 sous la limite de 3 % tolérée par Bruxelles (qui a lancé une procédure en déficit excessif contre la France). La dette a atteint fin juin 112 % du PIB, soit près du double du plafond fixé par Bruxelles. Elle a gonflé d’un millier de milliards depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à la présidence en 2017, lestée par le coût des crises à répétition et de recettes fiscales récentes qui ont été décevantes. Elle frôlera 115 % l’an prochain avant de décroître progressivement.

Le chemin de croix budgétaire s’avère d’autant plus ardu qu’il se greffe sur une grande instabilité politique. Le gouvernement se dit ouvert au dialogue avec les parlementaires mais, fragmentés en trois blocs, les députés sont réticents aux concessions. En conséquence, le budget pourrait être adopté sans vote, via l’article 49.3 de la Constitution.

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