Bains glacés, baumes chauffants… Le chaud-froid, allié de la récupération sportive ?

Bains glacés, baumes chauffants… Le chaud-froid, allié de la récupération sportive ?

Comment performer dans sa pratique sportive, comment bien s’entraîner et prendre du plaisir à se dépasser sans se blesser ? L’Euro de football, les Jeux olympiques de Paris sont autant de vitrines pour le sport de haut niveau, avec ses athlètes suivis au jour le jour, parfois par des armées de médecins, kinésithérapeutes, psychologues… Pour le sportif du dimanche jusqu’à l’amateur endurci, impossible d’être aussi bien accompagné. Les plus argentés se tournent vers des coachs personnels, quand la plupart glanent des recommandations auprès de collègues sportifs, d’outils connectés, voire de YouTube, Instagram ou TikTok… où bons et souvent moins bons conseils pullulent. De nombreuses études scientifiques apportent pourtant des réponses sérieuses quant aux méthodes éprouvées pour s’améliorer. L’Express passe en revue quatre thèmes essentiels : la préparation mentale, l’alimentation, les méthodes de récupération et la conduite à tenir face aux blessures. Dans ce quatrième et dernier épisode, les secrets d’une bonne récupération.

EPISODE 1 – Les conseils de la science pour s’améliorer en sport : le cerveau, un allié trop souvent négligé

EPISODE 2 – Régimes, gels, barres… Quelle alimentation en tant que sportif ? Les conseils de la science

EPISODE 3 – Les étirements sont-ils toujours utiles ? Les réponses (parfois déroutantes) de la science

Un contact un peu trop marqué ? Vite, du froid. Des raideurs, après une longue séance ? Surtout du chaud. A voir les sportifs des Jeux olympiques et paralympiques, ou ceux de l’euro de football, rien ne serait aussi bon que les changements de température pour accélérer la récupération, et éviter les grands coups de fatigue qui s’éternisent après l’effort. Impossible de pratiquer un sport sans se voir recommander, au choix, des sprays, des baumes, des bains…

Que valent toutes ces techniques ? Les études sur le sujet sont rares, et peu approfondies. Mais, au risque de décevoir leurs adeptes, les quelques éléments à disposition dans la littérature scientifique convergent vers un effet très faible voire nul. “La plupart du temps, elles n’ont pas d’efficacité au-delà du placebo”, prévient le Pr Nicolas Pinsault, directeur du département de kinésithérapie à l’université de Grenoble.

Toutes fonctionnent sur le même principe : le froid fait rétrécir les vaisseaux sanguins et chasse le sang ; le chaud les fait grossir et augmente au contraire le flux. Une bonne idée, en théorie. Le sang apporte aux muscles les molécules utiles à son rétablissement et fait circuler celles qui se sont accumulées pendant l’effort, ce qui aide à les transformer. Cette circulation est un des leviers principaux d’une bonne récupération.

De l’importance de l’effet placebo

Mais ces techniques ont un défaut majeur : elles ne pénètrent pas à l’intérieur de l’organisme. Impossible de chauffer ou refroidir les abdominaux par exemple, au risque de dérégler la température du corps. Elles ne peuvent qu’agir en surface du corps, sur la peau. Ce qui peut être utile pour réduire les désagréments des hématomes et des contusions par exemple : “Ça anesthésie quelques minutes. Le sportif redémarre, et l’épanchement de sang est contenu”, précise Christophe Delong, chef du service de médecine physique à Sainte-Périne (Hôpitaux de Paris).

Difficile de prétendre faire varier l’état de forme général après le sport. Il y a bien des phénomènes de contact qui se passent, la surface de la peau est connectée avec le reste du corps, mais tout ceci reste très limité. Ce qui ne veut pas dire qu’il faut forcément s’en passer. Car en sport, l’effet placebo n’est jamais inutile : “Penser qu’on va aller mieux fait que l’on va déjà un peu mieux, ce qui joue grandement sur la motivation et les performances”, détaille Alexandre Rambaud, directeur de la Société française de kinésithérapie du sport.

Quelques études semblent indiquer un effet sur les douleurs localisées. Mais pas de remède miracle cependant. “L’amélioration de la douleur s’est avérée minime d’après la littérature, et n’a pas montré de différences marquantes par rapport aux traitements placebo”, précise un avis rendu par le collège des kinésithérapeutes américains en 2017. L’institution s’était penchée sur les poches de chaud, mais aussi sur toutes les pratiques non médicamenteuses, du massage à la relaxation.

Une action très limitée

Même chose pour le sauna, qui provoque également des changements dans la circulation du sang, mais de manière plus généralisée. La littérature scientifique sur d’éventuels effets récupérateurs est contradictoire. Une étude publiée dans Biology of Sport en 2023 semble indiquer qu’ils sont plutôt utiles, du moins sur la “sensation” d’avoir récupéré. Une autre parue en 2019 dans International Journal of Sport Physiology and Performance, trouve à l’inverse les sportifs moins bons le lendemain.

Plusieurs études résumées dans un article du journal de la Mayo Clinic, célèbre institution médicale américaine, trouvent un petit effet protecteur sur le coeur lorsque le sauna est conjugué à la pratique d’une activité physique. Certains scientifiques vont même jusqu’à observer de meilleures performances cognitives, sans vraiment pouvoir l’affirmer avec certitude, à cause de biais méthodologiques. De la même manière, certaines hormones pourraient varier à cause du stress induit par cette activité, sans que l’on sache si cela a un intérêt.

Une revue de littérature publiée en 2016 dans Sport Medecine décelait bien une récupération en moyenne un peu meilleure, mais de peu, grâce aux bains froids. Mais là encore, rien de très probant. Le froid semble pouvoir réduire l’inflammation, de manière très localisée. Et tonifie temporairement les ligaments par exemple. Température idéale, selon ces travaux : 11 à 15 °C. Pas plus de 15 minutes, au risque de générer des lésions.

Les kinésithérapeutes ont ainsi développé d’autres techniques pour stimuler la circulation du sang, moins sexy mais bien plus efficaces pour la récupération. Alexandre Rambaud, lorsqu’il travaillait pour l’équipe de football de Saint-Etienne, puis avec les cyclistes de Décathlon AG2R La Mondiale, durant le tour de France, faisait mettre à ses sportifs des chaussettes de contention. Ou des bottes de pressothérapie, qui se gonflent d’air. En pressant les jambes, ces outils viennent soutenir le retour du sang vers le corps, toujours plus difficile que l’éjection vers les membres.

L’effort après l’effort

Des appareils qui envoient des petites décharges électriques sont aussi apparus sur le marché, et semblent aider, sur le même principe. Plus archaïque, mais efficace aussi : lever les jambes après l’effort, surtout en cas de crampes. Le spécialiste lui, n’a jamais arrêté les massages, pourtant désuets : “Ils assouplissent le muscle”. Il les préconise aussi avant l’activité, comme sorte de mise en bouche. Mais rien ne vaut, en plus d’une alimentation saine, de l’hydratation et du sommeil, le bon vieux décrassage”, assure-t-il.

De quoi s’agit-il exactement ? Les cyclistes, qui enchaînent des centaines de kilomètres de pistes jours après jours ont un secret. Après la course, ils se ruent sur leur vélo d’appartement. Et pédalent à faible allure. Un effort peu coûteux en énergie, mais qui permet d’éviter que le sang ne stagne trop, ce qui, semble-t-il, accélère le retour en forme. Dans le milieu, on appelle ça la récupération active. Ainsi, le sang ne stagne pas. Du sport, pour faire passer les effets du sport.