Défaillances d’entreprises : se dirige-t-on vers une année record ?

Défaillances d’entreprises : se dirige-t-on vers une année record ?

C’est une dynamique inquiétante pour les entreprises françaises. Au premier semestre, 33 493 d’entre elles sont entrées en défaillance, d’après les données publiées ce mercredi 3 juillet par les administrateurs et les mandataires judiciaires. Soit une augmentation de 18 % par rapport à la même période en 2023. Un nombre supérieur à celui de la période avant-Covid… Et qui pourrait encore empirer. Dans un post LinkedIn repris par Les Echos, Patrick Senicourt, président de Nota-PME, anticipe un total de 70 000 défaillances pour l’année 2024.

Un ordre de grandeur confirmé par Thierry Million, le directeur des études à Altares Dun & Bradstreet, qui table, lui, sur 64 000 défaillances (sauvegardes comprises) d’ici la fin de l’année, selon NetPME, un site de services dédiés aux TPE-PME. Il mise cependant sur une “lente amélioration qui se dessine” avec le ralentissement de l’inflation.

Cette note d’optimisme n’est en revanche pas partagée par l’institut Rexecode. Dans un panorama publié fin juin, il projette que “la hausse va au-delà d’un processus de rattrapage après la mise en sommeil des entreprises après le Covid.”

Pour le premier semestre 2024, environ 102 000 emplois se retrouvent ainsi menacés, selon les chiffres communiqués par le Conseil national des administrateurs judiciaires et des mandataires judiciaires (CNAJMJ) et l’Observatoire des données économiques (ODE). Ces derniers insistent notamment sur le récent redressement judiciaire de Milee, une société de communication qui emploie une dizaine de milliers de personnes.

Dans une note publiée sur le site de BNP Paribas en juin dernier, l’économiste Stéphane Colliac attribue cette tendance à plusieurs facteurs. Il pointe des résultats bien en deçà de la moyenne sur les trois dernières années, rappelle également la responsabilité de la brutale augmentation des taux d’intérêt et la conjoncture actuelle de ralentissement de la croissance.

Trois secteurs particulièrement touchés

“Le dynamisme persistant des créations d’entreprises est un autre élément qui distingue la période actuelle des précédentes […]. Un dynamisme à l’opposé des baisses observées lors des épisodes précédents de remontée des défaillances”, relativise néanmoins l’économiste, bien que conscient que cette dynamique ne concerne pas les secteurs de la construction et des agences immobilières.

Le rapport de la CNAJMJ et de l’ODE met aussi en évidence les secteurs où l’augmentation des défaillances est la plus importante : les activités immobilières – avec un taux d’augmentation de défaillances évalué à 72 % au premier semestre de 2024 par rapport à la période avant-Covid -, les activités financières et d’assurance, et l’information communication.

Denis Ferrand, président de l’institut Rexecode, met en lumière le rôle des remboursements des prêts garantis par l’Etat (PGE) comme cause majeure des défaillances des entreprises. “Les entreprises qui tombent sont celles qui sont plus endettées que la moyenne”, déclare-t-il dans Les Echos.

Plus de 680 000 PGE ont été contractés pendant la crise, représentant un montant de 144 milliards d’euros. A la fin novembre, 52 % avaient été remboursés, selon Le Monde. Rééchelonner le remboursement pourrait être une solution, tant la pression est importante. Bercy s’était déjà résolu à une telle mesure en début d’année, remettant à 2026 la date limite de remboursement.