Gabriel Attal, le “petit frère” de Macron en quête d’émancipation

Gabriel Attal, le “petit frère” de Macron en quête d’émancipation

Une gifle. Les premières heures suivant l’annonce du président de la République, Gabriel Attal est pétrifié. Autour de lui, Matignon figé dans la colère, instants stupéfaits, durant lesquels son quarteron de fidèles réalise qu’ainsi s’achèvent six années de conquête. Rien ne vient tempérer leur rage, pas même l’empressement d’Alexis Kohler à passer les consoler. Le vacillement est bref. “Rien n’est si voisin de la faveur que la disgrâce” écrivait, en 1696, la marquise de Maintenon au premier président du Parlement de Paris. Si la disgrâce est cousine de la faveur, n’est-ce pas que la faveur l’est aussi de la disgrâce ? Qu’il serait alors possible – ayant subi l’éclatante disgrâce d’une dissolution imposée, secrète, pensée à distance – d’aller chercher d’autres faveurs, celle que pourrait offrir un avenir soudain grand ouvert ?

Aussitôt, le Premier ministre, trentenaire, plastique, viscéralement politique, comprend qu’il doit, qu’il peut, transformer la boue en or, la disgrâce en faveur. Ne pas se plaindre, ne pas gémir, saisir que l’avenir se joue dans ces ruines, là, maintenant, libéré d’une tutelle mortifère, devenue détestable. Emmanuel Macron n’a pas cru nécessaire d’évoquer avec lui son choix de dissoudre l’Assemblée, encore moins d’envisager ensemble la campagne, il lui a tout caché, préférant s’en ouvrir, voici deux mois déjà, à son père, médecin amiénois à la retraite, dont on le sait peu proche, comment faire plus mal qu’en confiant à son père ce qu’on cache à dessein à celui dont on fit mine de croire qu’il fut un temps un “petit frère” ?

Qu’à cela ne tienne, il mène campagne, mâchoire serrée, cernes noirs et propos clairs. “Il fait une campagne de dingue, le nez dans le guidon, bossant comme un fou”, admire son entourage, se rengorgeant à quelques heures du second tour des législatives : “On a tout fait pour ne pas leur filer les clefs du camion”. “Leur”, comprendre le RN et la possibilité de voir Jordan Bardella succéder à leur champion. Le tour est malin. Là où Emmanuel Macron ouvre la porte au RN en appelant les Français à voter derechef après les européennes, lui se démène pour leur rétrécir la porte – voire la claquer…

Et ça l’arrange que ses conseillers laissent entendre que la dissolution n’a pas été le jeu de go d’un président acculé, mais qu’elle proviendrait du sortilège délétère jeté par Gérald Darmanin, “un brigand” qui aurait tourné les têtes, d’ordinaire froides, du président et d’Alexis Kohler. Attribuer à ce futur candidat à la présidentielle, à ce rival de droite, la responsabilité du désordre ne peut pas nuire. “Tout dépendra de la façon dont Gabriel sort de Matignon”, glisse un conseiller élyséen. Comment il partira ? “Sans avoir donné les clefs du camion” donc, et dès ce lundi 8 juillet, lendemain d’un second tour qui dessine une assemblée difficilement gouvernable. Sans attendre, donc, le 9 juillet, jour anniversaire de ses six mois rue de Varenne, la période à accomplir pour se voir remettre la Grand-Croix de la Légion d’honneur par le président de la République. Le “petit frère” s’en passera, il est prêt.

Please follow and like us:
Pin Share