JO d’hiver 2030 : histoires d’argent et batailles politiques menacent la candidature des Alpes

JO d’hiver 2030 : histoires d’argent et batailles politiques menacent la candidature des Alpes

A la fin, il y a toujours une question d’argent. La grande fête de Paris 2024 n’a pas encore débuté que les regards se tournent désormais vers ceux de 2030. Le 24 juillet, deux jours avant la grande parade sur la Seine, le Comité international olympique (CIO) tiendra sa 142e séance plénière en France. Avec comme feu d’artifice, l’attribution des Jeux d’hiver pour 2030 et 2034. L’affaire était déjà bien ficelée : les Alpes françaises devaient décrocher les premiers tandis que Salt Lake City, aux Etats-Unis, remportait les suivants.

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Sur le papier, le dossier français a tout pour plaire au CIO. Un budget officiellement sous contrôle (un peu moins de 2 milliards d’euros), une grande partie des équipements déjà construits comme la piste de bobsleigh ou le tremplin de saut à ski à Courchevel. Pour l’heure, seuls la patinoire olympique à Nice – pour un coût de 53 millions d’euros – et deux téléphériques à la Plagne et Courchevel devaient être construits. L’infatigable David Lappartient, président du Comité national olympique français, l’assurait : “La France a la capacité d’attirer entre 600 et 800 millions d’euros de sponsors privés”. Enfin et surtout, les deux autres candidats sérieux avaient été éliminés. La Suisse parce qu’elle devait d’abord soumettre le dossier des Jeux à une série de référendums locaux : une incertitude pas vraiment du goût du CIO. Et la Suède dont l’État refusait d’accorder la garantie financière malgré huit candidatures successives rejetées…

Mais voilà que la dissolution de l’Assemblée nationale est venue chambouler les plans du Comité international olympique. Au cœur de l’affaire, une histoire d’argent. Le 7 novembre 2023, lorsque le dossier de candidature des Alpes est déposé au CIO, Emmanuel Macron jure la main sur le cœur que l’État français apportera la garantie financière de l’opération. Une garantie déjà fournie aux Jeux de Paris 2024. En clair, en cas de manque à gagner pour le CIO, la France paiera l’addition. Sauf que la signature de cette fameuse garantie est une prérogative du Premier ministre et non du président de la République. Pour définitivement trancher, le CIO doit recevoir la lettre du locataire de Matignon entre le 8 et le 24 juillet. Sans cette missive, pas de Jeux d’hiver dans les Alpes.

“Nous aurons cette garantie du futur Premier ministre”

C’est là que le dossier devient très politique. A la différence de Paris 2024 où le mouvement sportif avait largement piloté le dossier de candidature, les Jeux d’hiver 2030 ont été poussés par des politiques : un trio composé de Renaud Muselier, président de la Région PACA (ex-LR qui a rejoint le parti Renaissance de Macron) ; Laurent Wauquiez, président LR de la région Auvergne-Rhône-Alpes ; et Christian Estrosi, maire de Nice, lui aussi ex-LR. Le tout sous la houlette de David Lappartient, président du CNOSF mais également président LR du conseil départemental du Morbihan. Une candidature très teintée politiquement.

“Nous aurons cette garantie du futur Premier ministre”, assure à L’Express l’entourage de David Lappartient. Guy Drut, membre du CIO, affirme, lui, que la décision du Comité pourrait même être repoussée de quelques mois, pour éviter la précipitation. Un Jordan Bardella à Matignon déciderait-il d’offrir ce cadeau aux LR ou préférerait-il jouer sur la corde du sérieux budgétaire ? Quant au potentiel Premier ministre issu des rangs du “Nouveau Front Populaire”, il pourrait botter en touche sous la pression des Verts qui jugent ces Jeux d’hiver peu écologiques. A moins qu’une union sacrée autour du rayonnement de la France dans le monde ne réunisse tout le monde. Un autre membre du CIO juge urgent d’attendre la fin des Jeux de Paris pour prendre la décision, histoire de vérifier que la ferveur populaire l’emporte bien sur le risque financier. Une petite inconnue de plus dans ce grand pataquès politique.