Les “IA personnelles”, révolution pour notre quotidien ou cauchemar à la “Black Mirror” ?

Les “IA personnelles”, révolution pour notre quotidien ou cauchemar à la “Black Mirror” ?

Le comble du chic dans l’intelligence artificielle ? Bientôt, ce ne sera plus d’avoir l’IA la plus puissante ou la plus rapide, mais celle qui vous comprend le mieux. Une IA personnelle, qui suit ce que l’utilisateur fait au quotidien afin de lui proposer le bon service, au bon moment. Pour Elon Musk, c’est un cauchemar qui semble tout droit sorti de la série dystopique Black Mirror. Mais de plus en plus d’entreprises adoptent une approche plus intime de l’IA. Microsoft a ainsi annoncé l’arrivée sur ses PC de Recall, une fonction dopée à l’IA, permettant aux utilisateurs de retrouver aisément ce qu’ils ont fait les semaines précédentes, la fonction prenant des captures d’écran régulières de leurs faits et gestes numériques. “Vous rêveriez d’avoir une mémoire photographique ? L’équivalent le plus proche est Recall”, résumait avec enthousiasme sur X, Yusuf Mehdi, vice-président exécutif chez Microsoft.

Apple prend, lui aussi, le chemin de l’IA personnelle avec sa dernière création : Apple Intelligence. Cette IA “couteau suisse” est consciente de ce qui se passe sur le téléphone, ce qui lui permet de proposer une aide plus pertinente. Un utilisateur pourra ainsi demander à l’assistant d’Apple Siri “Lance la lecture du podcast que Luis m’a recommandé” ou lui demander à quelle heure atterrit l’avion de sa mère. Siri repérera elle-même l’épisode, ou trouvera les informations du vol et les “recoupera avec le suivi en temps réel pour fournir un horaire d’arrivée”, détaille la firme de Cupertino.

Google n’est pas en reste. A l’heure où nos objets connectés suivent quantité de nos données physiologiques – fréquence cardiaque, sommeil, etc. -, le groupe en a bien cerné le potentiel. Sa branche “recherche” a ainsi dévoilé le 11 juin de prometteurs travaux sur un modèle de langage donnant des conseils de santé personnalisés.

L’équipe prend l’exemple d’une requête que font beaucoup d’internautes : Comment puis-je mieux dormir ? “Bien qu’il s’agisse d’une question apparemment simple, parvenir à une réponse adaptée à l’individu implique une série d’étapes analytiques complexes, telles que : vérifier la disponibilité des données, calculer la durée moyenne du sommeil, identifier les anomalies des habitudes de sommeil sur une période donnée, contextualiser ces résultats dans le cadre de la santé générale de l’individu, intégrer la connaissance des normes de la population en matière de sommeil, et proposer des recommandations personnalisées pour améliorer le sommeil”, souligne le billet de Google Research détaillant ses progrès en la matière.

Des IA “chefs de cabinet de votre vie”

A terme, confie Mustafa Suleyman, cofondateur de DeepdMind, à Business Insider, “tout le monde aura son IA personnelle. Elle se souviendra de tout ce que vous lui dites, et deviendra une sorte de “chef de cabinet” de votre vie : planificateur, organisateur, avocat, acheteur… Elle se chargera à votre place et en votre nom de toutes ces actions et vous rendra la vie beaucoup, beaucoup plus simple.” Ces IA intimes connaissent un tel engouement du fait de plusieurs avancées récentes. D’abord celle de “l’IA agentique” qui vise à donner à l’IA la capacité d’agir sur son environnement numérique, par exemple en prenant et en organisant de manière optimale nos rendez-vous, sans qu’il soit nécessaire de la superviser.

Les progrès des mini-IA sont également déterminants. Contrairement aux grands modèles de langage (LLM) qui font le pari de la puissance, les petits modèles (SLM) font celui de l’efficience et tentent – avec succès – de maintenir leurs performances en réduisant leur taille. Un champ de recherche précieux : c’est grâce à cela que des modèles peuvent aujourd’hui tourner sur des ordinateurs portables ou des smartphones. Counterpoint Research estime même que les smartphones GenAI représenteront 11 % des téléphones vendus cette année et 43 % en 2027. “Trois PC portables sur quatre vendus en 2027 seront des ordinateurs dotés des capacités avancées en IA générative”, précise le cabinet d’études.

Pour que des IA touchant à ce point la sphère intime conquièrent le public, il faudra toutefois qu’elles soient impeccablement sécurisées. Le fonctionnement d’Apple Intelligence est ainsi étroitement encadré, révèle Numerama. Sur l’iPhone, une base de données contenant des détails sur les messages, les photos, les mails et diverses données personnelles de l’utilisateur est créée. Cette liste sensible est entièrement chiffrée et uniquement enregistrée sur l’appareil – elle n’est pas sauvegardée dans le cloud.

Le modèle de langage de l’iPhone gère ensuite, autant que faire se peut, les demandes au niveau local. Ce n’est que lorsque la tâche à accomplir nécessite une puissance plus élevée qu’il fait appel à des serveurs distants. Dans ce cas de figure, il ne transmet qu’une poignée de données utilisateur pour que la tâche soit menée à bien. Le serveur se réinitialise après coup et l’échange est “oublié”. Microsoft, en revanche, a eu besoin d’un délai supplémentaire pour bâtir un bouclier adéquat. Le groupe a annoncé le 13 juin que la fonction Recall ne serait finalement pas proposée dès la semaine prochaine car elle doit être davantage testée. Vu le caractère explosif du sujet, mieux vaut avancer prudemment.