Livres : l’histoire de ces tubes francophones qui ont franchi les frontières

    Pas sûr que cet après-midi du 21 juin, en France et dans les quelque 120 pays du monde qui organisent la fête de la Musique, l’on chante à tue-tête Mon amour, mon ami, de Marie Laforêt, Le Tourbillon de Jeanne Moreau ou encore Valentine, de Maurice Chevalier… On ne va pas se leurrer, la souveraineté de l’anglais sur le show-business mondial, notamment depuis la Beatlemania des années 1960, est flagrante. Pourtant, grâce à notre langue toujours présente sur les cinq continents, la ritournelle francophone fait de la résistance. Un livre, C’est une chanson qui nous ressemble (Editions du Patrimoine/Centre des monuments nationaux), doublé d’une expo et de 46 podcasts (sur France Info) éponymes, tous signés par le journaliste spécialiste de la chanson Bertrand Dicale, en font la preuve par une cinquantaine de “succès mondiaux des musiques populaires francophones”.

    Des noms ? Parlez-moi d’amour, de Jean Lenoir, interprétée par Lucienne Boyer en 1930 et sacrée premier hit mondial français ; J’ai deux amours, de Joséphine Baker, entonnée en 1930 au Casino de Paris ; Poupée de cire, poupée de son, de Serge Gainsbourg, exécutée par France Gall à l’Eurovision de 1965 et reprise dans 21 pays, de l’Afrique du Sud à la Turquie ; Milord, chantée par Piaf sur un texte improvisé par Moustaki en une demi-heure ; L’amour est un oiseau rebelle, de Bizet ; La Vie en rose, écrite dans un café par Piaf au printemps 1945 et bissée à New York en 1948 ; l’album D’eux de la majestueuse Québécoise Céline Dion écoulé à 10 millions d’exemplaires depuis sa sortie en 1995 ; la folie russe du Mademoiselle chante le blues de Patricia Kaas ; le Papaoutai de Stromae en 2013… et, bien sûr, le Tous les garçons et les filles de la souveraine Françoise Hardy.

    Bertrand Dicale a articulé son ouvrage en cinq chapitres, chanson de cabaret, de la rue, de music-hall, de club, de dancing – un découpage repris par l’exposition temporaire de la Cité internationale de la langue française, au château de Villers-Cotterêts (du 19 juin au 5 janvier 2025) –, et l’a parsemé d’anecdotes, de petites et grandes histoires. Ainsi de Gréco qui, depuis un fracassant show au Brésil à la fin de 1950, apparaît autant comme une ambassadrice de la culture française que comme l’incarnation d’une certaine modernité de femme rebelle. D’Aya Nakamura et de ses succès dans la civilisation du streaming mondialisé à partir de 2018 avec Copines et Djadja, cette dernière étant numéro un aux Pays-Bas comme en Roumanie. Du Tourbillon, la chanson de Rezvani interprétée par Jeanne Moreau dans le film Jules et Jim de Truffaut, de Valentine, enregistrée à New York par Maurice Chevalier en 1929, de L’Orientale, dont Enrico Macias fait à la fois une carte de visite et un succès historique en 1962, ou encore du scandale provoqué par Je t’aime moi non plus du duo Jane Birkin-Serge Gainsbourg en 1969.

    Sans parler de La Marseillaise, hymne international autant que national, accompagnant les luttes contre l’ordre établi, ou du Boudin, l’hymne officiel des képis blancs de la Légion étrangère, à l’auteur inconnu. Le journaliste sait tout, de l’origine de chaque chanson à sa destinée internationale, de la tenue revêtue par l’artiste sur scène à ses émois amoureux et professionnels. Impressionnant et passionnant ! Comment chante-t-on cocorico en anglais ?