Orban-Poutine : ce qu’il faut retenir d’une rencontre qui embarrasse l’UE

Orban-Poutine : ce qu’il faut retenir d’une rencontre qui embarrasse l’UE

Trois jours après s’être rendu à Kiev pour la première fois depuis le début de la guerre en Ukraine, Viktor Orban a de nouveau fait du Viktor Orban : une visite surprise à Moscou, sans concertation avec les autres pays européens, martelant de nouveau vouloir “instaurer la paix”.

Alors que la Hongrie a pris la tête de la présidence tournante du Conseil de l’UE, cette visite a suscité des réactions glaciales au sein de l’Union européenne, qui a tenu à souligner que Viktor Orban n’était en aucun cas un représentant des positions de l’Union. De son côté, la Russie s’est félicitée de la venue du dirigeant hongrois, soutien de longue date du régime de Moscou. Vladimir Poutine en a profité pour rappeler ses conditions pour la paix : une capitulation de l’Ukraine. Retour sur les principales déclarations à retenir de cette rencontre.

Orban dit pouvoir être “un instrument au service de Dieu”

“De nombreuses étapes à franchir” pour “mettre fin à la guerre” en Ukraine et “instaurer la paix”. C’est ainsi que Viktor Orban a résumé sa rencontre avec Vladimir Poutine. “J’ai constaté que les positions sont très éloignées”, a-t-il ajouté devant les journalistes, aux côtés du président russe. “Mais pour le rétablissement du dialogue, le premier pas important a été fait aujourd’hui et je poursuivrai ce travail”, a assuré le Premier ministre hongrois.

Selon le Kremlin, Budapest avait proposé cette visite ce mercredi, soit au lendemain de la venue du Premier ministre hongrois en Ukraine, pays avec lequel il entretient des relations difficiles, du fait notamment de ses prises de position pro-russes.

A Moscou, Viktor Orban a de nouveau confirmé sa volonté de s’affirmer comme médiateur entre l’Ukraine et la Russie, malgré le refus de Kiev de négocier aux conditions du Kremlin et la position ferme et unitaire voulue par l’Union européenne. “Le nombre de pays qui peuvent parler aux deux camps de la guerre diminue. La Hongrie devient peu à peu le seul pays d’Europe à pouvoir parler à tout le monde”, a affirmé le Premier ministre hongrois, alors qu’il avait défendu, avant sa visite, pouvoir être “un instrument au service de Dieu et de ceux qui veulent la paix”.

La satisfaction de Vladimir Poutine

De son côté, Vladimir Poutine s’est évidemment réjoui de cette venue de Viktor Orban à Moscou. “Je comprends que cette fois-ci, vous êtes venu non seulement en tant que partenaire de longue date, mais aussi en tant que président du Conseil” de l’Union européenne, s’est félicité le président russe, alors que l’UE avait prévenu dit que Viktor Orban n’avait pas de mandat européen. “Je m’attends à ce que vous me fassiez part de votre position (sur l’Ukraine) et de celle des partenaires européens”, avait-il ajouté avant leur rencontre.

Evoquant une discussion “franche et utile” afin de “régler la crise” en Ukraine, le président russe a rappelé avoir déjà annoncé en juin sa vision de la paix, “à savoir le retrait total de tous les soldats ukrainiens des républiques populaires de Donetsk et Lougansk et des régions de Zaporijia et Kherson”, ainsi qu’une renonciation à son alliance avec l’Occident. De facto, donc, une demande de capitulation.

Une visite qui gène en Europe et dans l’Occident

En Europe, cette visite du Premier ministre hongrois a évidemment provoqué des réactions plus que mitigées. Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a rappelé que Viktor Orban “ne représente donc pas l’UE, en aucune manière”.

Charles Michel, le président du Conseil européen, qui rassemble les dirigeants des Vingt-Sept, avait réagi dès jeudi soir à l’annonce de ce déplacement. “La présidence tournante de l’UE n’a pas de mandat pour engager le dialogue avec la Russie au nom de l’UE”, a-t-il écrit sur X, insistant que pour les 27, “la Russie est l’agresseur, l’Ukraine est la victime” et qu'”aucune discussion ne peut avoir lieu sans l’Ukraine”. Même mot d’ordre pour la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, qui a rappelé sur X que la tentation de “l’apaisement n’arrêtera pas Poutine” et que “seules l’unité et la détermination ouvriront la voie à une paix complète, juste et durable en Ukraine”.

Olaf Scholz a quant à lui tenu à souligner que le soutien de l’Union européenne à l’Ukraine ne faiblirait pas. Le chancelier allemand a aussi rappelé que Viktor Orban ne représentait pas l’UE lors de cette visite, soulignant que le “message clair de l’Union est que l’Ukraine peut compter sur notre solidarité”.

L’Otan, enfin, a également tenu à prendre ses distances avec cette visite controversée. “Bien sûr, Viktor Orban ne représente pas l’Otan à ces rencontres, il représente son propre pays”, a déclaré devant la presse le secrétaire général de l’organisation, Jens Stoltenberg, soulignant toutefois que l’Alliance atlantique avait été “informée” de ce déplacement. “Ce qui compte, c’est que je m’attends à ce que la Hongrie souscrive aux décisions de l’Otan”, a-t-il insisté, rappelant que les pays de l’Alliance ont tous “condamné l’invasion russe, soutenu l’intégrité territoriale et la souveraineté de l’Ukraine, et exprimé très clairement que la Russie est responsable de cette guerre, que la Russie est l’agresseur”.

La colère de Kiev

La diplomatie ukrainienne a de son côté fustigé la visite “sans aucun accord ou coordination” avec Kiev du Premier ministre Viktor Orban à Moscou pour parler de l’Ukraine avec Vladimir Poutine. “Nous rappelons que pour notre pays, le principe ‘pas d’accord sur l’Ukraine sans l’Ukraine’ reste inviolable”, a martelé le ministère dans son communiqué.

Lors de sa visite à Kiev, Viktor Orban avait déjà jugé que l’Ukraine devait accepter un cessez-le-feu. Une position pourtant balayée par les Occidentaux et Ukrainiens, Kiev réclamant le retrait des troupes russes et le respect de son intégrité territoriale.

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