Placements responsables : “Les particuliers exigent de la transparence”

Placements responsables : “Les particuliers exigent de la transparence”

Depuis cinq ans, la société de gestion CPR Asset Management (CPR AM) sonde les épargnants et leurs conseillers sur leurs préférences et leurs pratiques en matière de finance durable. Arnaud Faller, directeur des investissements de CPR AM, et Vanessa Cottet, sa responsable environnement, social et gouvernance (ESG), décrivent pour L’Express les attentes des épargnants. L’occasion de démonter quelques idées reçues et de mesurer l’ampleur du chemin parcouru.

L’Express : Après beaucoup de critiques, les épargnants se sont-ils réconciliés avec l’investissement socialement responsable (ISR) ?

Arnaud Faller : Oui. Les fonds responsables sont devenus des produits financiers comme les autres et leur taux de détention croît de façon régulière. Cette progression a été significative l’an dernier : lors de la dernière édition de notre baromètre, 44 % des répondants indiquaient disposer de fonds qualifiés de responsables dans leur épargne, contre 36 % en 2022. Les épargnants qualifiés d’autonomes – ceux qui ne sont pas conseillés – sont un peu en retard par rapport aux autres. N’ayant pas accès à un conseiller professionnel, ils ont un déficit de connaissances sur le sujet qui explique ce décalage.

Vanessa Cottet : L’adoption croissante de l’investissement responsable est en partie liée à la réglementation. Celle-ci prévoit notamment que, désormais, les conseillers abordent systématiquement ce sujet avec leurs clients. Or, ces professionnels ont gagné en compétences et sont maintenant beaucoup plus à l’aise pour recommander ce type de fonds. Les événements climatiques, qui touchent de nombreuses personnes, provoquent aussi une prise de conscience. Feux, inondations, dérèglement climatique… Les épargnants font désormais davantage le lien entre ce qu’il se passe près de chez eux et leurs souhaits d’investissement.

Que cherchent-ils dans l’ISR ?

A. F. : Parmi les thèmes plébiscités par les épargnants, les enjeux climatiques arrivent en première position pour 43 % des sondés. C’est très nettement le premier sujet de préoccupation des répondants et cela se confirme année après année. Dans le détail, leurs choix portent prioritairement sur la lutte contre le changement climatique, l’accès à l’eau et la préservation de la biodiversité, qui apparaît pour la première année dans l’étude.

V. C. : Les thèmes sociaux, tels que l’éducation (33 % des répondants), le respect des droits de l’homme (31 %) ou encore la réduction des inégalités (23 %) arrivent dans un deuxième temps et sont davantage liés à l’actualité et à des préoccupations plus locales. Plus largement, les particuliers exigent de la transparence et des preuves concrètes de l’utilité de leurs investissements. Ils ont besoin d’éléments tangibles pour comparer les fonds.

Justement, comment prouver l’utilité des fonds ISR ?

V. C. : Cela passe par la publication d’indicateurs très factuels et détaillés comme l’intensité carbone du portefeuille [NDLR : qui mesure les émissions de CO2 rapportées au chiffre d’affaires], l’intensité eau, le taux de recyclage des déchets, etc. Nous publions d’ailleurs chaque année un rapport d’impact détaillé par fonds.

A. F. : Cela nécessite d’accéder à une donnée de qualité et homogène d’une entreprise à l’autre afin de pouvoir l’agréger au niveau des fonds. C’est un axe en constante progression et la réglementation va là aussi nous aider à améliorer les approches puisque à partir de 2025, les sociétés européennes devront progressivement publier des rapports de durabilité très complets, comprenant des données standardisées.

Un article du dossier spécial “Placements responsables”, paru dans L’Express du 30 mai.