“Top jobs” de l’UE : qui sont les dirigeants choisis pour gouverner l’Europe ?

“Top jobs” de l’UE : qui sont les dirigeants choisis pour gouverner l’Europe ?

Fumée blanche à l’UE ! Les dirigeants européens se sont entendus, jeudi 27 juin, pour accorder à Ursula von der Leyen, un deuxième mandat à la tête de la Commission européenne, dans le cadre d’une répartition des postes clés de l’UE. La responsable conservatrice allemande devra encore être confirmée lors d’un vote au Parlement européen, tout comme la Première ministre libérale estonienne, Kaja Kallas, proposée comme cheffe de la diplomatie européenne.

Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE, réunis en sommet à Bruxelles, ont par ailleurs nommé le socialiste portugais Antonio Costa à la tête du Conseil européen, l’institution qui réunit les pays membres.

L’UE privilégie la continuité avec von der Leyen

Les dirigeants de l’UE se sont entendus pour accorder un deuxième mandat à Ursula von der Leyen à la tête de la Commission. Cette dernière avait su s’imposer pendant un mandat secoué par de nombreuses turbulences, du Covid à la guerre en Ukraine. En effet, face au choc de la pandémie, elle avait piloté un gigantesque plan de relance européen de 750 milliards d’euros, financé par un endettement commun inédit, symbole tangible de solidarité européenne. Après l’invasion de l’Ukraine par la Russie en février 2022, elle avait affiché haut et fort son soutien à Kiev et définit une stratégie pour sortir de la dépendance énergétique vis-à-vis de Moscou.

Cette reconduction devra encore être confirmée par une majorité absolue d’eurodéputés : “Il y a encore une étape […] Je solliciterai l’approbation du Parlement européen après la présentation de ma feuille de route politique pour les cinq prochaines années”, a insisté la dirigeante conservatrice allemande. L’issue de ce vote, attendu mi-juillet, est incertaine, l’habituelle coalition des eurodéputés conservateurs, socialistes et libéraux étant affaiblie suite aux élections de juin. En 2019, le Parlement européen ne lui avait d’ailleurs accordé sa confiance qu’à une très courte majorité (neuf voix).

L’Estonienne Kaja Kallas à la diplomatie

Pour incarner le visage de la diplomatie de l’UE sur fond de guerre en Ukraine, les chefs d’Etat et de gouvernement ont choisi la Première ministre estonienne Kaja Kallas – une adversaire déterminée du Kremlin. Cette libérale de 47 ans succédera à l’Espagnol Josep Borrell. “C’est une énorme responsabilité en ces temps de tensions géopolitiques, avec la guerre en Europe, l’instabilité croissante dans notre voisinage, comme principaux défis”, a réagi Kaja Kallas, dont le poste devra également être validé par les eurodéputés.

Celle qui a apporté un soutien résolu à l’Ukraine dès le début de l’invasion russe en février 2022, a immédiatement souligné que “la guerre en Europe” et “l’instabilité croissante dans notre voisinage et dans le monde” étaient les principaux défis de la politique étrangère européenne.

“Si une telle agression est payante en Ukraine, elle pourra inciter à faire de même ailleurs. Nous devons totalement discréditer l’outil d’agression”, déclarait la dirigeante lors d’un entretien avec l’AFP en décembre 2023. Son attitude combative face au président russe Vladimir Poutine lui vaut le soutien de plusieurs pays de l’UE, dont la Pologne : “Kaja Kallas comprend les risques venant de Russie et du Bélarus”, a ainsi salué le chef du gouvernement polonais Donald Tusk. Mais cette posture a aussi pu par moments gêner ses ambitions européennes, jugée trop provocante à l’égard du Kremlin.

Le Portugais António Costa nommé à la tête du Conseil européen

Enfin, l’ex-Premier ministre Portugais António Costa a été désigné nouveau président du Conseil européen, l’instance réunissant les États membres. Un an après sa démission à la tête du gouvernement portugais pour une affaire de corruption finalement peu étayée, ce socialiste réputé habile tacticien et pragmatique succédera au Belge Charles Michel en décembre. “Bâtir l’unité entre les Etats sera ma principale priorité”, a réagi le dirigeant à l’issue du sommet.

Arrivé au pouvoir dans son pays en 2015 à l’issue d’élections qu’il avait pourtant perdues, le socialiste, a démissionné en novembre après avoir été cité dans une affaire de corruption. Cette enquête a mis fin à huit années de gouvernement socialiste au Portugal et ouvert la voie à un nouvel exécutif de droite modérée. Finalement entendu par la justice fin mai, à sa demande, António Costa n’a pas été inculpé et, dès le soir des élections européennes, le nouveau Premier ministre portugais Luís Montenegro a déclaré son soutien à sa candidature européenne.

Jugé bon négociateur et profondément européiste, son pragmatisme lui a permis d’étendre son influence au-delà de sa famille politique. Comme en 2020, lorsqu’il rend visite au Premier ministre nationaliste hongrois Viktor Orban et contribue à le convaincre de ne pas bloquer le plan de relance européen post-Covid, crucial pour le Portugal.

La nouvelle assemblée du Parlement européen après les élections du 9 juin.

“Un arrangement honteux”

Ces trois candidats étaient largement favoris suite à l’accord conclu mardi entre six dirigeants européens -dont le Français Emmanuel Macron et l’Allemand Olaf Scholz- appartenant à la “grande coalition” droite/sociaux-démocrates/centristes, dans la foulée des élections européennes. Mais cet arrangement a suscité des vives résistances de l’Italienne Giorgia Meloni et du Hongrois Viktor Orban. Le Premier ministre nationaliste hongrois a ainsi fustigé jeudi un arrangement “honteux” : “Les électeurs européens ont été trompés. (La droite traditionnelle) a formé une coalition de mensonges avec la gauche et les libéraux”, s’était-il emporté en arrivant au sommet.

La cheffe du gouvernement italien ultraconservateur, Giorgia Meloni, avait de son côté dénoncé une “oligarchie”, déplorant d’avoir été laissée à l’écart des négociations entre les trois groupes politiques. Comme Viktor Orban, l’Italienne entend peser davantage sur les choix du futur exécutif à Bruxelles, suite à la poussée des droites radicales et extrêmes lors des élections européennes ce mois-ci. Son groupe ECR a d’ailleurs ravi la troisième place à la famille centriste du président français Emmanuel Macron au Parlement européen).

Rome revendique “au minimum” une vice-présidence de la Commission européenne, avec un “portefeuille important” pour influer sur la politique industrielle et agricole, selon son ministre des Affaires étrangères Antonio Tajani.

Emmanuel Macron veut reconduire Thierry Breton

De son côté, Emmanuel Macron a annoncé, lors d’une réunion avec ses alliés libéraux, son souhait de reconduire Thierry Breton comme membre français de la Commission, selon des sources européennes. Il est depuis 2019 commissaire au Marché intérieur, vaste portefeuille qui inclut le numérique et l’industrie. Il s’est imposé comme une figure de l’exécutif bruxellois en s’attaquant aux abus de pouvoir des géants de la tech.

Chaque pays de l’UE est appelé à proposer son choix pour l’un des 27 postes au sein de l’exécutif. Mais les propos du président français en faveur de Thierry Breton interviennent à trois jours du premier tour des élections législatives lors desquelles l’opposition d’extrême droite (Rassemblement national, RN) est donnée largement en tête.

Le RN a posé les jalons d’un bras de fer sur la nomination du commissaire français en cas de cohabitation entre le chef de l’État, en poste jusqu’en 2027, et un éventuel Premier ministre issu de ses rangs. Mais l’Élysée a une autre lecture des institutions et revendique une prérogative purement présidentielle. “Sur le commissaire français, il ne lâchera pas”, a dit à l’AFP un visiteur régulier du président, quand d’autres proches reconnaissent un flou juridique en la matière.

Roberta Metsola favorite pour la présidence du Parlement

Enfin, parmi les autres postes clé de l’UE, la conservatrice maltaise Roberta Metsola apparaît favorite pour décrocher un second mandat de deux ans et demi à la présidence du Parlement européen, mi-juillet à Strasbourg.

Les dirigeants des Vingt-Sept ont également endossé jeudi l'”agenda stratégique” fixant les priorités du bloc pour les cinq prochaines années, mettant l’accent sur la sécurité, la défense, la compétitivité et la lutte contre l’immigration irrégulière.