Vente du Doliprane par Sanofi : les conditions posées par le gouvernement

Vente du Doliprane par Sanofi : les conditions posées par le gouvernement

L’Etat est à la manoeuvre pour éviter que le dossier Sanofi ne devienne explosif. Le ministre de l’Economie Antoine Armand et son homologue à l’Industrie, Marc Ferracci, étaient ce lundi 14 octobre, sur le site du géant pharmaceutique qui produit le Doliprane à Lisieux (Calvados), pour entendre les préoccupations des salariés et des syndicats face à l’arrivée pressentie d’un nouvel actionnaire américain.

Le groupe pharmaceutique français a annoncé en fin de semaine dernière avoir choisi le fonds d’investissement américain CD & R pour lui céder potentiellement le contrôle de son entité de santé grand public, Opella, qui commercialise le médicament grand public Doliprane. Depuis, les syndicats et une grande partie de la classe politique s’inquiètent des conséquences d’une telle vente pour la souveraineté sanitaire et les 250 emplois du site.

Marc Ferracci et Antoine Armand ont pu visiter ce lundi l’usine de Lisieux et échanger avec le personnel. L’avenir du Doliprane a mobilisé aussi le maire de Lisieux et plusieurs parlementaires, soit une trentaine de personnes, dont des syndicalistes.

“Un peu comme une trahison”

L’option d’un repreneur américain est perçue “un peu comme une trahison envers la France et envers tous les salariés”, a affirmé Johann Nicolas délégué syndical CGT Lisieux. “Notre première requête, c’est restons Sanofi !” a-t-il lancé, selon un correspondant de l’AFP.

“Nous avons entamé des discussions avec Sanofi et avec Opella” au sujet “des conditions qui seraient indispensables et d’un accord formalisé qui doit avoir lieu et aura lieu si le projet de cession arrive sur la table”, a prévenu Antoine Armand lors d’un micro tendu à la presse. “Ces garanties devront être respectées et nous nous assurerons qu’elles le seront en mobilisant tous les outils législatifs et réglementaires à notre disposition y compris des pénalités et des sanctions en cas de non respect de l’accord”, a-t-il ajouté. Il a évoqué aussi “la possibilité d’un actionnariat public et d’une participation à la gouvernance dans le cadre de cet accord”.

Parmi les obligations exigées par le gouvernement : le ministre délégué à l’Industrie, Marc Ferracci, cite “le maintien de l’empreinte industrielle et de l’emploi industriel” sur les sites français de production de Lisieux et Compiègne (Oise). Il est également question, selon lui, d'”engagements sur les volumes de production” et “sur la recherche et le développement” ainsi que la préservation de “l’écosystème des sous-traitants”.

“On rejoint totalement les prises de position des politiques qui parlent de souveraineté sanitaire”, a indiqué à l’AFP, Humberto de Sousa, syndicaliste CFDT qui attend désormais que “ces engagements se traduisent par des actes”. Mais “on ne sait pas si les engagements tiendront si le conseil d’administration bascule côté américain”, se méfie-t-il, se montrant inquiet pour les emplois face à “la recherche de rentabilité de ce fonds” repreneur.

Interrogé en marge d’un déplacement au Mondial de l’auto à Paris, Emmanuel Macron a affirmé de son côté que le gouvernement avait “les instruments pour garantir que la France soit protégée” face à l’arrivée d’un investisseur étranger.

“Pas dans une logique de myopie”

La vigilance reste de mise car l’approvisionnement en paracétamol a récemment connu des périodes de tensions. Sanofi a maintes fois tenu à dissiper les doutes en martelant que ce projet de scission permettrait “la création d’un nouveau champion mondial, le seul basé en France, dans le secteur de la santé grand public”.

Opella emploie 1 700 salariés en France. Le Doliprane est sa deuxième marque en termes de revenus, la France ne représente qu’environ 10 % des ventes de cette entité qui a réalisé 5,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2023. Il s’agit d'”un projet de croissance qui laissera sa place entière à Doliprane, tant dans nos pharmacies que dans nos usines”, a répété à Lisieux, le président du conseil d’administration de Sanofi, Frédéric Oudéa.

“Nous ne serons pas dans une logique de myopie. Nous allons regarder loin et nous protégeons le site de Lisieux comme le site de Compiègne”, a-t-il assuré. “Sanofi souhaite être associé à ce projet, puisque nous gardons 50 % du capital. Ce n’est pas une vente sèche”, a-t-il ajouté. Dans la bataille pour le Doliprane, le fonds CD & R était en concurrence avec une offre menée par le fonds d’investissement français PAI Partners adossé à des investisseurs internationaux.

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