“Vous êtes assez riches pour…” : les manoeuvres de Trump pour financer sa campagne

“Vous êtes assez riches pour…” : les manoeuvres de Trump pour financer sa campagne

En avril, Donald Trump a organisé un dîner à Mar-a-Lago avec une vingtaine de patrons de compagnies pétrolières. L’un d’eux s’est plaint des restrictions imposées à l’industrie par l’administration Biden. Selon le Washington Post qui a eu le scoop, l’ex-président a répondu : “Vous êtes assez riches pour lever un milliard de dollars et me renvoyer à la Maison-Blanche.” En échange, il leur a promis d’éliminer toutes sortes de réglementations sur l’environnement, d’annuler “dès le premier jour” de son retour au pouvoir le gel de nouveaux terminaux d’exportation de gaz naturel liquéfié, d’allouer davantage de permis de forages dans le golfe du Mexique…

C’est un bon “deal”, a-t-il insisté. Outre les dérégulations qui leur faciliteraient la vie, sa réélection leur permettrait de faire des économies. Car les baisses d’impôts qu’il a mises en place au début de sa présidence viennent à expiration en 2025. Or son successeur Joe Biden ne compte pas les maintenir pour les plus hauts revenus s’il est réélu. Ce dernier veut aussi supprimer les allègements fiscaux dont bénéficient, entre autres, les compagnies pétrolières.

“Soyez généreux, s’il vous plaît”

Dans un gala de collecte de fonds organisé par trois patrons du secteur pétrogazier à Houston (Texas), Donald Trump a continué d’affirmer qu’il abolirait toutes les réglementations inutiles. Il a également suggéré qu’il pourrait pousser la Federal Trade Commission à accélérer le processus d’approbation des fusions acquisitions. “Soyez généreux, s’il vous plaît”, a-t-il lancé aux invités.

L’ex-président n’est pas le premier à courtiser les gros bailleurs de fonds. Les nouveaux locataires du bureau Ovale récompensent souvent leurs donateurs en les nommant à un poste d’ambassadeur dans un endroit prisé. “En général, le deal est implicite et donc parfaitement légal”, observe Richard Painter, professeur de Droit à l’Université du Minnesota et ancien responsable des questions d’éthique dans l’administration Bush. “Mais Trump, lui, dit clairement : ‘Donnez-moi de l’argent et je ferai ce que vous voulez’. On est très proche de la sollicitation d’un pot-de-vin”.

Lors de ses deux campagnes précédentes, l’ancien président, qui promettait alors de nettoyer “le marigot” de Washington de ses lobbies, rechignait à cajoler ainsi les donateurs. Mais cette fois, il a besoin d’argent frais pour payer ses énormes frais d’avocat et rattraper son retard financier sur la campagne de Joe Biden. Ces derniers mois, l’auteur de L’Art du Deal – son best-seller des années 1980 – se démène pour faire la retape auprès de grands pontes de Wall Street, de l’immobilier et, bien sûr, de l’énergie en proposant par exemple un déjeuner en tête-à-tête pour la modique somme de… 25 millions de dollars. Dans sa résidence floridienne de Mar-a-Lago, en mai, devant 400 personnes qui avaient déboursé au moins 40 000 dollars chacune, il a improvisé des enchères : “Si vous faites un don d’un million de dollars maintenant au Parti républicain… je vous laisserai venir parler sur scène.” Deux individus au moins ont sorti leur chéquier.

“Il y a peu de chances qu’il soit poursuivi”

Ils ne sont pas les seuls. Le candidat républicain a levé la somme colossale de 141 millions de dollars après sa condamnation à New York, le 30 mai. Un certain nombre de gros bailleurs de fonds républicains, jusqu’ici restés sur la touche, ont mis de côté leurs réticences et le financent de nouveau. Parmi eux, Kelcy Warren, le PDG de Energy Transfer Partners, qui avait soutenu Ron De Santis, son rival aux primaires, Steve Schwarzman le fondateur du fonds d’investissement Blackstone qui avait appelé à “une nouvelle génération de leaders”. Quant à Elon Musk, s’il affirme qu’il ne financera pas la campagne, il s’entretient régulièrement avec l’ancien président et organise des dîners anti-Biden.

L’annonce de l’offre de bons procédés aux industriels du pétrole à Mar-a-Lago a suscité beaucoup de critiques. “Les plans de Trump pour notre planète sont simples : la vendre au plus offrant”, a déclaré Alex Glass, directeur de la communication du groupe Climate Power. “Malgré ce que Donald Trump pense, l’Amérique n’est pas à vendre aux milliardaires, aux patrons de compagnies pétrolières ou même à Elon Musk”, a renchéri le porte-parole de Joe Biden. Les élus démocrates du Sénat ont lancé une enquête pour déterminer si l’ancien président avait violé la loi sur le financement des campagnes. Mais prouver l’existence d’un donnant-donnant est très difficile. “Il y a donc peu de chances qu’il soit poursuivi”, conclut Richard Painter.