Israël – Hamas : Rafah, le point de passage stratégique qui cristallise les tensions

Israël – Hamas : Rafah, le point de passage stratégique qui cristallise les tensions

La course contre la montre est engagée entre la poursuite de la guerre et l’espoir d’une trêve à Gaza. Dans la nuit du lundi 6 au mardi 7 mai, le Proche-Orient a connu de nombreux rebondissements : Israël a laissé entrevoir les premiers signes d’une offensive, avant que, quelques heures plus tard, le Hamas n’accepte les termes du cessez-le-feu durement négocié. Sauf que Tel-Aviv estime tout de même que le compte n’y est pas. Malgré les appels à la retenue de la communauté internationale, l’État hébreu va-t-il quand même faire le choix d’une attaque terrestre à Rafah ?

Mardi 7 mai, l’armée israélienne a annoncé avoir bien pris le contrôle de la partie palestinienne de ce point de passage entre la bande de Gaza et l’Egypte et que des troupes au sol ont entamé une “opération ciblée de contreterrorisme”. Dans la nuit de lundi à mardi, des chars israéliens, postés à proximité de Rafah, ont fini par se mettre en mouvement. Une unité de blindés “a manœuvré dans la zone. À l’instant présent, des forces spéciales inspectent le point de passage de Rafah : “nous avons le contrôle opérationnel de la zone”, a affirmé l’armée israélienne lors d’un point de presse, précisant parler “uniquement du côté gazaoui du point de passage”.

Pour justifier ses opérations, l’armée israélienne (Tsahal) a publié un communiqué sur Telegram faisant état d’une “opération antiterroriste précise” menée dans l’est de Rafah, à la suite de “renseignements” selon lesquels le point de passage était “utilisé à des fins terroristes”. Tsahal n’a pas fourni de preuves.

L’objectif de l’armée israélienne : accentuer la “pression” sur le Hamas quelques heures avant de nouveaux pourparlers au Caire pour tenter d’infléchir un accord de trêve. La Défense civile dans la bande de Gaza a fait état de “nombreux morts” dans la nuit à Rafah. Et l’hôpital koweïtien, situé dans cette ville, a dit avoir reçu “onze morts” et des “dizaines de blessés” dans ces frappes, relevant ainsi un premier bilan de cinq morts.

“Une pression militaire sur le Hamas”

Après ses opérations à Gaza-ville, puis Khan Younès, Israël menace depuis des semaines de pousser son offensive terrestre jusqu’à Rafah, considéré comme le dernier bastion du Hamas mais où s’entassaient encore le week-end dernier 1,2 million de Palestiniens, en majorité déplacés par les combats. Or, lundi, la situation prenait une autre tournure : après des pourparlers au Caire n’ayant pas débouché sur un accord de trêve, l’armée israélienne a commencé une opération d’évacuation de dizaines de milliers de personnes de Rafah. Puis, en soirée, le Hamas a dit avoir informé l’Egypte et le Qatar, pays médiateurs avec les Etats-Unis, qu’il avait “approuvé leur proposition pour un accord de cessez-le-feu” avec Israël.

Le poste-frontière de Rafah, une cible stratégique pour Israël

Sauf que cette proposition est “loin des exigences israéliennes”, a rétorqué le bureau du Premier ministre Benyamin Netanyahou. Le cabinet de guerre a décidé “à l’unanimité” de poursuivre “l’opération à Rafah afin d’exercer une pression militaire sur le Hamas dans le but de progresser vers la libération des otages et l’atteinte d’autres objectifs de la guerre”, ont indiqué les services du Premier ministre. “Bien que la proposition du Hamas soit loin de répondre aux principales exigences israéliennes, Israël enverra une délégation de haut rang en Égypte dans le but de maximiser les chances de parvenir à un accord à des conditions acceptables pour Israël”, ont-ils ajouté.

Peu après cette déclaration, le Qatar a annoncé l’envoi dès mardi matin d’une délégation au Caire “pour relancer les négociations indirectes entre les deux parties […] avec l’espoir de parvenir à un accord pour un cessez-le-feu immédiat et permanent” en “échange de prisonniers et d’otages”. Selon le numéro 2 de la branche politique du Hamas à Gaza, Khalil al-Hayya, la proposition comprend trois phases, chacune d’une durée de 42 jours, et inclut un retrait israélien complet du territoire, le retour des déplacés et un échange d’otages retenus à Gaza et de prisonniers palestiniens détenus par Israël, dans le but d’un “cessez-le-feu permanent”.

Israël lance une évacuation dans l’Est de Rafah.

La famine “s’aggravera”

Jusqu’à présent, Israël s’est opposé à un retrait complet de ses troupes de Gaza et à un cessez-le-feu permanent, estimant devoir mener au préalable une opération sur Rafah pour “vaincre” le Hamas et s’assurer que le 7 octobre ne se reproduise plus. Faute d’accord, la communauté internationale craint que la situation humanitaire sur le terrain ne se dégrade. La famine “s’aggravera” si les voies d’approvisionnement au point de passage de Rafah “sont interrompues”, alertait l’UNRWA, mardi 7 mai. L’ONU s’est vue interdire par Israël l’accès au point de passage de Rafah, a indiqué mardi un porte-parole du Bureau de coordination des Affaires humanitaires.

Continued interruption of the entry of aid and fuel supplies at the #Rafah crossing will halt the critical humanitarian response across the #GazaStrip

The catastrophic hunger faced by people especially in northern #Gaza will get much worse if these supply routes are interrupted. pic.twitter.com/CYMxbbHMbL

— UNRWA (@UNRWA) May 7, 2024

L’Egypte, qui accueille les pourparlers, a exhorté Israël “à faire preuve d’une retenue maximale et éviter davantage d’escalade” tandis que le roi Abdallah II de Jordanie, qui s’est entretenu avec le président américain Joe Biden à la Maison-Blanche, a appelé la communauté internationale à tout faire pour prévenir “un nouveau massacre” à Rafah.

Et dans un entretien téléphonique, Joe Biden a réitéré sa “position claire” à Benyamin Netanyahou contre toute offensive à Rafah, le Département d’Etat disant ne pas avoir vu “de plan humanitaire crédible” pour une opération qui ne ferait qu’accroître “les souffrances du peuple palestinien”. Alors que la Chine a exhorté Israël mardi à “cesser d’attaquer Rafah”, Josep Borrell, le haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères craint que “cela ne fasse à nouveau de nombreuses victimes”.

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