Quel avenir pour Macron après 2027 ? Ces cinq scénarios qui l’attendent

Quel avenir pour Macron après 2027 ? Ces cinq scénarios qui l’attendent

Limiter la fonction présidentielle à deux mandats ? Une “funeste connerie”, rétorque Emmanuel Macron à Jordan Bardella devant l’ensemble des chefs des partis d’opposition réunis à Saint-Denis en septembre dernier. Mais surtout, une exigence constitutionnelle qui a peu de chance de tomber d’ici à 2027. Voici alors ce jeune chef de l’Etat obligé de tirer une croix sur une troisième élection présidentielle. Avant 2032.

Mais alors, que faire en attendant ? Quel ersatz à la fonction première choisir ? “Je ferai probablement quelque chose de complètement différent”, élude l’intéressé en septembre dernier lors d’un déplacement officiel au Kazakhstan. Mais à mesure que l’échéance funeste se rapproche, la vision se précise. Dans un entretien accordé au groupe média Le Crayon et diffusé ce mardi 4 juin, Emmanuel Macron l’assure : il continuera à oeuvrer pour l’Europe et pour la France.

Que cache ce phrasé énigmatique aux allures de traditionnelle mise en garde de chaque président en fin de règne : “Il faudra continuer à faire avec moi” ? Avec des politologues et des spécialistes de l’Union européenne, L’Express a fait l’état des lieux des différentes portes qui s’ouvriront à Emmanuel Macron à l’issue de son second mandat.

1/ Une place parmi les top jobs de l’UE

Méconnus voire obscurs pour le grand public, les “top jobs” sont les plus hauts postes de responsabilité au sein de l’Union européenne. Ils sont au nombre de cinq : la présidence du Parlement européen, la présidence de la Commission européenne, la présidence du Conseil européen, le haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et enfin, la présidence de la Banque centrale, occupée actuellement par l’ancienne ministre de l’Economie de Nicolas Sarkozy, Christine Lagarde.

Ils sont très convoités, et leur répartition est généralement la source de vives querelles. Et pour cause, rien n’est simple lorsqu’il s’agit de concilier intérêts nationaux et vie partisane européenne – les partis politiques européens n’ayant aucune représentation incarnée à l’échelle nationale. Si pour être nommés, les candidats doivent être validés par le Parlement européen, c’est bien le Conseil européen constitué des chefs d’Etats ou de gouvernements, qui soumet les noms de personnalités pressenties pour ces fameux “top jobs” pour lesquels “l’actuel président français a toutes les qualités”, souligne Alberto Alemanno, politologue et professeur de droit à HEC Paris.

Problème, Emmanuel Macron l’a lui-même rappelé lors de sa visite en Allemagne fin mai, “le vent mauvais” de l’extrême droite et de l’illibéralisme souffle sur le Vieux Continent. Et pourrait rendre de plus en plus incertaine l’ampleur des soutiens à une candidature du chantre du “en même temps”. À cela, s’ajoute la perte d’influence des libéraux à Bruxelles. Pour Alberto Alemanno : “La famille libérale étant plus petite que les sociaux-démocrates ou celle de la droite à venir, cela pourrait être difficile de conserver une force”, et ainsi d’imposer un candidat, fut-il l’ancien chef d’Etat français.

2/ Un scenario à la “VGE”

Si une place à la Commission semble ainsi difficile à dénicher, pourquoi ne pas siéger au Parlement européen ? Moins probable, le “maître des horloges” selon la formule consacrée, n’étant pas du genre à se contenter d’un simple poste de député, lui qui n’a jamais eu de fonction élective avant 2017. Mais pas incongru pour autant. Après tout, Valéry Giscard d’Estaing n’a-t-il pas conduit la liste d’union UDF-RPR arrivée en tête lors les élections européennes de 1989, huit ans après avoir quitté le Château ? N’a-t-il pas non plus présidé le groupe des libéraux à Strasbourg ?

D’autant que, concernant l’Europe, la gémellité des deux hommes, qu’un demi-siècle sépare, n’est pas en reste. Infatigables européistes, tous deux ont fait montre de leur attachement au projet européen. Tous deux se sont présentés, pendant leur présidence, comme des acteurs de premiers plans de la construction et de l’intégration européenne.

Dans le sillage de “VGE”, Emmanuel Macron pourrait ainsi tenter une aventure électorale, en prenant la tête d’une liste regroupant les centristes-libéraux aux élections européennes de 2029. En cas de victoire, son CV d’ancien chef d’Etat serait tout à la fois un coup de pouce et un handicap. “Il tentera forcément de prendre la tête de ce groupe, mais son succès dépendra du soutien ou non de sa propre famille politique, mais également de l’état du paysage politique de 2029”, analyse le politologue Bruno Cautrès, chercheur au CNRS et au Cévipof.

3/ Dans le sillage de Jacques Delors

Autre option dans la maison des Vingt-Sept : “Devenir une personnalité qui compte dans le débat d’idées sur l’avenir de l’Union et qui continue à réfléchir sur son intégration”, suggère Bruno Cautrès. En créant par exemple un Think tank dédié à la réflexion sur les questions communautaires. À l’image de l’ancien président de la Commission européenne, Jacques Delors, qui a accouché de l’Institut Jacques Delors, autrefois baptisé “Notre Europe”. Une formule choyée par l’actuel président de la République.

En outre, “Emmanuel Macron serait très bien placé pour se voir confier une mission importante sur l’avenir institutionnel européen”, estime Bruno Cautrès. Une éventualité qui rejoint là aussi le parcours de son prédécesseur, Valéry Giscard d’Estaing. Vingt-et-un ans après sa défaite face à François Mitterand, le “roi de la com” avait été désigné pour co-présider aux côtés de l’ancien Premier ministre italien Giuliano Amato la convention chargée de remettre aux institutions un projet de Constitution européenne.

4/ Devenir le visage d’une organisation internationale

Emmanuel Macron pourrait également être happé par plus grand. Intégrer une organisation internationale ? L’Otan, l’Organisation des Nations unies, ou encore le Fonds monétaire international… L’éventail de choix n’est pas débordant, mais suffisant pour un ancien président en quête de destin international. Et plusieurs exemples récents démontrent que l’expérience du pouvoir est un atout recherché.

Les anciens ministres des Affaires étrangères autrichien et sud-coréen Kurt Waldheim et Ban Ki-moon sont devenus secrétaire général des Nations unies. De même que le président du Pérou, Javier Pérez Cuéllars. Toutefois, “il y a eu beaucoup d’anciens chefs de gouvernement dont la carrière politique s’est achevée alors qu’ils étaient encore jeunes, qui ont tenté d’intégrer de grandes institutions internationales, mais qui n’ont jamais réussi à s’imposer”, nuance Alberto Alemanno.

D’autant que sa qualité d’ancien président d’une grande puissance pourrait bien lui mettre des bâtons dans les roues. Et pour cause, au cours de ses deux mandats, Emmanuel Macron a pris des positions qui lui ont aliéné une partie des membres travaillant au sein d’organisations internationales. “Il a été de ceux qui ont pris des positions parmi les plus dures contre Vladimir Poutine au sujet de la guerre en Ukraine“, note Bruno Cautrès qui pointe également du doigt l’étonnement suscité par sa proposition de créer une force internationale pour éradiquer le Hamas en octobre 2023.

5/ Reprendre une carrière dans le privé

In fine, pourquoi ne pas envisager un retour aux sources ? Rien n’exclut qu’Emmanuel Macron renoue avec sa carrière privée, abandonnée pour rejoindre le secrétariat général de l’Elysée en 2012. Pour le politologue et chercheur au Cevipof, Luc Rouban, le chef de l’Etat pourrait en effet être tenté d’entrer dans une “grande entreprise privée ou financière”. Plus challengeant peut-être, plus rémunérateur sans doute, “mais moins glorieux pour sûr”, sourit Alberto Alemanno.

Raison pour laquelle, “les anciens présidents ayant repris des activités dans le privé ont tous fini par retenter leur chance en politique”, pointe Bruno Cautrès. Mais d’ailleurs, quid d’un retour dans l’arène politique franco-française ? Et si Emmanuel Macron n’avait qu’à attendre patiemment 2032, se représenter pour tenter de signer un nouveau bail de cinq années à l’Elysée ? “Pour finir comme Nicolas Sarkozy, et se ridiculiser en arrivant troisième à la primaire de la droite ?”, raille un profil capé. Non aucune chance, “Emmanuel Macron vaut mieux que ça”…