Législatives : héritages, donations… Les promesses fiscales de la majorité présidentielle

Législatives : héritages, donations… Les promesses fiscales de la majorité présidentielle

Alors que le déficit public de la France a été épinglé par la Commission européenne la semaine dernière, les différentes forces politiques pour les législatives anticipées présentent petit à petit leur programme et ont fait de la fiscalité l’un des thèmes de leur campagne. Le Premier ministre Gabriel Attal a présenté jeudi 20 juin celui de la majorité présidentielle, Ensemble pour la République, juste avant la présentation, vendredi puis lundi, de celui des deux autres mouvements pour le moment en tête devant dans les sondages, le Nouveau Front populaire et le Rassemblement national. Le volet fiscal du projet macroniste propose notamment de ne pas imposer les successions et donations jusqu’à 150 000 euros par enfant.

Pas de hausse d’impôts ?

“Nous prenons un engagement, inscrire dans la loi une règle d’or budgétaire”, a déclaré Gabriel Attal lors de la présentation du programme. A savoir : “pas d’augmentation des impôts quoi qu’il arrive”. “S’interdire toutes recettes nouvelles, conduirait la France dans une impasse”, a réagi sur Public Sénat le sénateur (ex-LR) Jean-François Husson, rapporteur général du budget. D’autant que la loi de programmation de finances qui court encore ne prévoit rien de la sorte. Alors que le ministre de l’Economie Bruno Le Maire avait annoncé 10 milliards d’euros d’économies supplémentaires en février et prévoyait 20 milliards supplémentaires sur le budget 2025, le programme promet plusieurs coups de pouce en matière d’héritage et pour le pouvoir d’achat.

Relever l’abattement sur les droits de succession et donations

Concernant les successions et donations, le programme de la majorité présidentielle promet qu’aucun impôt ne sera appliqué aux successions et donations jusqu’à 150 000 euros par enfant y compris pour les familles recomposées (contre 100 000 actuellement, hors familles recomposées), ni jusqu’à 100 000 euros transmis aux petits-enfants (contre 1 594 euros actuellement pour une succession et 31 865 euros pour une donation). Il s’agit d’une version renforcée d’une promesse déjà faite par Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle de 2022, à savoir qu'”aucun impôt sur les successions jusqu’à 150 000 euros par enfant, aucun impôt jusqu’à 100 000 euros transmis aux autres membres de la famille” ne serait appliqué, selon ses propres mots – les donations n’étant pas évoquées. Une mesure évaluée à l’époque (hors donations, donc), à 3 milliards d’euros par l’équipe de campagne du président de la République, et à 1,8 milliard par l’Institut Montaigne, un think tank libéral.

Le Rassemblement national propose également d’exonérer d’impôts les donations jusqu’à 100 000 euros de parent à enfant ou de grands-parents à petits-enfants tous les dix ans, reprise d’une mesure de la campagne présidentielle de Marine Le Pen en 2022, et de supprimer les impôts “sur les héritages directs pour les familles modestes et les classes moyennes”, selon la présentation du programme ce lundi 24 juin. Comme le fait remarquer la Fondation Jean Jaurès, un think tank, classé à gauche, “seulement 19 % des héritages sont d’un montant supérieur à 100 000 euros. Ces abattements bénéficieraient donc exclusivement aux plus hauts patrimoines.”

Une taxation des plus hauts revenus “à l’international”

Jeudi, Gabriel Attal a également vanté les baisses d’impôts réalisées sous le quinquennat Macron : “Nous avons supprimé la taxe d’habitation, supprimé la redevance TV, nous avons baissé l’impôt sur le revenu sur les tranches les plus basses”, s’est-il félicité. Contrairement au Nouveau Front populaire, qui prévoit d”‘abolir les privilèges des milliardaires” notamment en rétablissant l’ISF, Gabriel Attal a toujours soutenu qu’il n’était certes pas opposé à la taxation des plus hauts revenus, mais seulement “au niveau international”, car “on sait que les personnes qui ont les plus hauts revenus […] ont une assez grande facilité à changer de domicile fiscal pour échapper à la taxe”, avait-il déclaré en avril sur BFMTV. Le Brésil, qui préside le G20 (groupement des 20 économies mondiales les plus développées”, a proposé en avril une coopération internationale sur l’imposition des plus riches, soutenue par la France.

Le combat pour une juste fiscalité internationale est au cœur de notre politique économique depuis 7 ans avec le président de la République. Nous avons eu des résultats concrets avec la mise en place d’une taxation minimale sur les géants du numérique et une fiscalité minimale… pic.twitter.com/SIlXqPKWea

— Bruno Le Maire (@BrunoLeMaire) April 17, 2024

Lutter contre la fraude fiscale et sociale

Le camp présidentiel s’engage aussi à poursuivre “une lutte implacable contre toutes les fraudes sociales et fiscales”, qui ont permis de redresser 17 milliards d’euros en 2023, dont 15,2 milliards de fraudes fiscales et 2 de fraudes sociales. “Un projet de loi sera présenté dès l’été”, annonce le programme de la majorité sortante.

Supprimer les frais de notaire pour les primo-accédants

Le camp présidentiel souhaite aussi exonérer de “droits de mutation à titre onéreux” (DMTO) les primo-accédants à la propriété pour l’achat d’un logement jusqu’à 250 000 euros, d’ici 2027, “pour les Français de classes moyennes”, selon la présentation qu’en a faite Gabriel Attal. Il s’agit des droits qui constituent la part des “frais de notaire” relevant de l’impôt, et qui sont reversés aux collectivités, les départements en étant les principaux bénéficiaires. Les DMTO ont atteint 16,8 milliards d’euros en 2022, selon le rapport du compte du logement 2022. Le coût de la mesure d’exonération est estimé à 3,3 milliards d’euros environ par l’Institut Montaigne.

Une mutuelle à 1 euro

Côté coups de pouce pour le pouvoir d’achat, le programme du camp présidentiel prévoit de revaloriser les retraites pour suivre l’inflation. Il promet aussi la mise en œuvre d’une mutuelle à 1 euro pour “3 millions de Français”, parmi lesquels retraités, étudiants, indépendants ou demandeurs d’emploi qui n’ont pas de mutuelle, “en élargissant la complémentaire santé solidaire”. Cette mutuelle existe déjà depuis 2019 et bénéficie à 7,3 millions de personnes selon l’Assurance maladie, mais 3 à 4 millions de personnes éligibles n’y ont pas recours.