Déficit public : pourquoi la hausse des impôts est une mauvaise idée

Déficit public : pourquoi la hausse des impôts est une mauvaise idée

L’heure de la rigueur est arrivée. Prévu pour être inférieur à 5 % du PIB, le déficit public 2023 de l’Etat, de la Sécurité sociale et des collectivités locales sera largement supérieur à ce chiffre. Laissons de côté les collectivités locales qui n’ont pas le droit de voter un budget de fonctionnement en déficit et dont la contribution au déficit public français est à ce titre secondaire. Le déficit de la Sécurité sociale aura légèrement dépassé les 10 milliards d’euros. Celui de l’Etat s’est quant à lui établi à… 173 milliards d’euros, soit pas loin de 40 % de ses dépenses. Voilà pour les ordres de grandeur. Le gouvernement veut raboter les dépenses de la Sécurité sociale en réduisant les frais de transport hospitalier ou en diminuant une fois de plus la durée d’indemnisation des chômeurs. Pourquoi pas. Sauf que l’on voit bien que le problème financier de la France concerne davantage l’Etat que la Sécu.

Bruno Le Maire a déjà demandé aux ministres d’économiser 10 milliards d’euros cette année. Mais entre la diminution des réserves de précaution de certains ministères – les crédits épargnés pour faire face à des dépenses imprévues —, les reports de projets immobiliers ou l’étalement des paiements des fournisseurs de l’Etat, soit des quasi-artifices comptables, il reste en réalité assez peu de véritables baisses de dépenses, que l’on peut évaluer à quelques milliards. Et pour cause : cette stratégie du rabot a déjà été utilisée dix fois, et il ne reste plus grand-chose à raboter.

Risque de peser sur l’activité

D’où la grande tentation du moment : augmenter les impôts. Alain Minc a ainsi proposé une hausse de la TVA arguant du fait “qu’il y a le feu au lac”. Ce qui pose deux questions. Est-ce qu’augmenter les impôts constitue la meilleure ou plus exactement la moins mauvaise des politiques économiques ? Est-ce qu’il y a effectivement le feu au lac des finances publiques ? La réponse à ces deux questions est négative. Rappelons s’il en est besoin que la France est la championne du monde des prélèvements obligatoires (prélèvements sociaux + impôts). Cette simple remarque milite à elle seule en faveur de l’abstinence fiscale.

Plus fondamentalement, à ce niveau de pression fiscale, augmenter les impôts fonctionne à rendement marginal décroissant, surtout dans la période de ralentissement économique que nous connaissons. François Hollande en a fait l’amère expérience en 2012. Animé de la volonté de réduire rapidement les déficits publics, il a procédé à un choc fiscal qui a pesé sur l’activité et qui a généré des recettes décevantes. Les déficits ont été un peu réduits – moins que prévu – mais le chômage a augmenté.

Ajoutons à cet argument économique que la politique doit entrer en ligne de compte. Si Alain Minc a raison de noter que la TVA est l’impôt de toute évidence le moins nocif en matière de croissance, être le ministre qui l’augmentera alors que nombre de nos concitoyens ont perdu du pouvoir d’achat avec l’inflation post-Covid serait un comportement parfaitement kamikaze. Baisser la TVA, comme le propose le Rassemblement National, est un crime financier sans gain économique ; l’augmenter est une impossibilité politique.

Simplifier les normes et supprimer le statut des fonctionnaires

Alors que faire ? A court terme, deux choses. D’une part, s’engager sur la “dé-quoi-qu’il-en-coutisation” de l’économie française, c’est-à-dire expliquer aux Français que, face à un choc comme la crise énergétique de 2022, l’Etat ne pourra plus les protéger. Deuxième chose, mettre en place toutes les mesures de simplification normatives qui permettent de dynamiser l’activité et donc d’augmenter les recettes fiscales.

A moyen terme, il faudra entreprendre ce gigantesque chantier de la réforme de la sphère publique, qui passe notamment par la suppression du statut de la fonction publique pour les fonctions non régaliennes de l’Etat. Voilà ce qui permettra de diminuer lentement mais sûrement nos déficits. Ce projet nécessite beaucoup de courage au carré.

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