Ecole privée : le rapport parlementaire qui épingle son financement

Ecole privée : le rapport parlementaire qui épingle son financement

Manque de transparence, dépense sous-estimée, contrôles laxistes… La liste est longue. Un rapport parlementaire que l’AFP a pu consulter, mardi 2 avril, étrille le financement public de l’enseignement privé sous contrat, majoritairement catholique, et propose des sanctions en cas de manquements. Ce texte, signé des députés LFI Paul Vannier et Renaissance Christopher Weissberg, doit être présenté mardi après-midi en commission des affaires culturelles et de l’éducation à l’Assemblée nationale.

Pour dresser ce constat, les rapporteurs ont auditionné près de 60 organismes (administrations, collectivités territoriales, réseaux d’établissements, enseignants…). Objectif : évaluer les financements publics alloués aux établissements d’enseignement privés, qui scolarisent 17 % des élèves en France (2 millions) et sont financés “a minima à 75 % par la puissance publique”. La question a son importance face à la ruée des élèves dans les établissements privés.

Au total, ce sont 37 % des élèves parisiens qui étudient dans le privé. L’académie de Paris se hisse à la troisième position de celles où la part du public est la plus faible, juste en dessous des académies de Rennes et de Nantes, rappelait-on dans L’Express.

Les moyens publics bénéficiant au secteur s’élèvent à 9,04 milliards d’euros en 2024, mais “malgré les sommes en jeu”, l’allocation de cette dépense est “peu transparente”, “sans cadre légal systématiquement défini et éminemment politique”, regrettent-ils. Au micro de RMC, Christophe Weissberg a ajouté : “Je pense que l’essentiel, c’est que l’on ait une véritable transparence de ce que l’État dépense ! Il faut que le privé se plie à plus de contrôles.”

Des contrôles insuffisants

Ils épinglent un manque de “visibilité budgétaire” côté dépenses de l’Etat, notamment en ce qui concerne les rémunérations des accompagnants d’élèves en situation de handicap, ainsi qu’une “absence de lisibilité comptable” côté collectivités territoriales. La dépense publique consacrée aux établissements privés (dont 95 % sont catholiques) est “en tout état de cause sous-estimée”, ajoutent les parlementaires. À tel point que le modèle de financement, qui repose sur un ratio de 80-20 entre public et privé, est actuellement “plus favorable aux établissements privés”, selon le rapport.

Autre constat : “la fréquence et la profondeur des contrôles” sont “très largement insuffisantes”. Des contrôles budgétaires sont insuffisants, selon le rapport qui évoque des contrats d’association avec l’Etat “tacitement reconduits d’année en année”, sans vérification. Le document pointe également des “angles morts” dans le contrôle pédagogique des établissements, notamment “la bonne application des dispositions relatives à l’instruction religieuse”. Les contrôles administratifs, eux, ne reposent que sur de “rares signalements”, comme pour le lycée musulman Averroès à Lille ou le collège Stanislas à Paris, critiquent les députés qui demandent à ce que les rapports d’inspection soient rendus publics.

“Les contreparties exigées des établissements privés sont loin d’être à la hauteur des financements, comme en témoigne la dégradation de la mixité sociale et scolaire”, ajoutent les deux députés. Pour renforcer cette mixité, Christopher Weissberg propose de rendre obligatoire la prise en compte de l’indice de positionnement social (IPS) dans le “modèle d’allocation des moyens”. Paul Vannier, prône, lui, “un mécanisme de malus” pour baisser les dotations lorsque cet IPS est supérieur à celui des établissements publics du même secteur. Sur le financement des écoles privées, la copie est donc à revoir.

Ces derniers mois, l’enseignement privé sous contrat a fait l’objet de diverses critiques, accentuées par la polémique née des déclarations de l’ex-ministre de l’Education Amélie Oudéa-Castéra sur la scolarisation de ses enfants dans un établissement privé. Face aux accusations de ségrégation scolaire et sociale, le secrétaire général de l’enseignement catholique, Philippe Delorme, avait dénoncé fin mars des “combats d’arrière-garde”. En février dernier, pour montrer sa bonne foi, il avait indiqué à nos confrères du Monde : “Je rêve que les 7 500 établissements scolaires catholiques soient contrôlés budgétairement. Nous n’avons rien à cacher.”

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