Erasmus : la vraie raison pour laquelle le Royaume-Uni a quitté le programme d’échange

Erasmus : la vraie raison pour laquelle le Royaume-Uni a quitté le programme d’échange

“Do you speak French, Spanish or Dutch ?” À ces questions, les étudiants britanniques bégayaient un peu trop. C’est la raison pour laquelle le Royaume-Uni a décidé de quitter, le 1er janvier 2021, le programme d’échange Erasmus + de l’Union européenne. En effet, les faibles compétences en langues étrangères des Britanniques rendaient l’adhésion trop coûteuse à maintenir…

“Je vais vous dire pourquoi nous ne voulons plus en faire partie : c’est parce qu’il y a toujours eu un déséquilibre entre notre incapacité à très bien parler les langues – et donc à tirer parti des opportunités de mobilité vers l’extérieur – et des personnes souhaitant venir au Royaume-Uni”, a justifié, mercredi 3 avril, Nick Leake, un diplomate chevronné qui représentait le gouvernement britannique lors d’une réunion du Comité économique et social européen (Cese).

Autrement dit, Londres voulait éviter de gaspiller de l’argent pour ses élèves mauvais en langue. Car il faut savoir que la nature réciproque d’Erasmus + ignore les différences de frais entre les universités, ce qui rendait la perspective d’étudier au Royaume-Uni – où les écoles sont plus chères – plus attrayante pour les élèves étrangers. La moindre participation à Erasmus des élèves britanniques par rapport aux autres nationalités signifiait que Londres allait débourser, par an, près de 300 millions d’euros de plus que ce qu’elle recevait en retour.

“2 milliards d’euros de plus”

La participation continue à Erasmus pendant les négociations sur le Brexit “aurait obligé le Royaume-Uni à payer 2 milliards d’euros de plus que ce que nous aurions reçu au cours d’un programme de sept ans”, selon Nick Leake. D’où la décision de rayer Erasmus + de la carte. Sauf que tout le monde n’est pas en accord avec cette résolution : Maurizio Cuttin, ambassadeur du British Youth Council auprès du Forum européen de la jeunesse, a déclaré à Politico, après la réunion du 3 avril dernier, que la sortie du Royaume-Uni d’Erasmus + “a entraîné une perte dévastatrice d’opportunités d’échange et d’éducation pour les jeunes des deux côtés de la Manche”.

Dans le cadre du système Erasmus +, 200 000 ressortissants britanniques ont pu étudier dans les universités partout en Europe sans frais supplémentaires. Les étudiants défavorisés étaient également éligibles à des bourses allant jusqu’à 630 livres sterling (environ 730 euros) par mois. Toujours côté européen, Jan Hendrik Dopheide, un haut responsable de Bruxelles travaillant sur les relations avec le Royaume-Uni, a ajouté qu’il discutait avec les États membres de la manière de procéder sur la question de la mobilité des jeunes en général. “On peut probablement faire beaucoup plus pour faciliter le mouvement des jeunes dans différentes circonstances”, a-t-il annoncé.

Turing, le remplaçant d’Erasmus +, jugé inadéquat

Après avoir claqué la porte d’Erasmus +, le Royaume-Uni a créé son propre programme d’études à l’étranger : Turing, du nom du célèbre mathématicien britannique. Pour l’année universitaire 2021-2022, cette initiative lancée par Boris Johnson devait financer 40 000 places de mobilité mondiale dans 150 pays, mais le nombre de participants au cours de la première année était seulement d’un peu plus de 20 000, en partie à cause du Covid. À noter que la France est la destination européenne préférée pour les étudiants en enseignement supérieur, avec 2 894 étudiants et élèves britanniques en 2021-2022.

Or une récente étude commandée en janvier 2024 par le gouvernement britannique a révélé que le programme de remplacement Turing n’avait pas encore atteint ses objectifs. Près de 80 % des universités et collèges affiliés au programme ont signalé des difficultés avec le nouveau processus de candidature. Moins de la moitié (45 %) des prestataires d’enseignement supérieur l’ont jugé satisfaisant, et près d’un tiers (31 %) l’ont estimé insatisfaisant.

En effet, beaucoup d’étudiants considèrent que le programme de remplacement Erasmus est inadéquat. Le rapport, qui s’est concentré sur la première année, a également noté que des problèmes d’exécution impactaient particulièrement les étudiants issus de milieux défavorisés, créant potentiellement des obstacles à leur participation. De là à réintégrer Erasmus au Royaume-Uni ? Le parti travailliste ne s’est pas encore engagé sur le sujet, mais le maire de Londres, Sadiq Khan, planche sur le dossier. Dans le cadre de sa candidature pour un troisième mandat, en mai prochain, il compte proposer aux étudiants de la capitale une nouvelle version du programme européen. L’occasion pour les jeunes Anglais de travailler un peu plus sur leur point faible.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *