Guerre Israël – Hamas : “Tsahal est dans une impasse militaire à Rafah”

Guerre Israël – Hamas : “Tsahal est dans une impasse militaire à Rafah”

L’armée israélienne a annoncé, ce mardi 7 mai, avoir pris le contrôle de la partie palestinienne du point de passage de Rafah entre la bande de Gaza et l’Egypte et que des troupes au sol avaient entamé une “opération ciblée de contreterrorisme” dans l’est de la ville. “À l’instant présent, des forces spéciales passent au peigne fin le point de passage” de Rafah, “nous avons le contrôle opérationnel de la zone”, a affirmé l’armée israélienne, précisant parler “uniquement du côté gazaoui” du secteur. Pour L’Express, le général Jérôme Pellistrandi, rédacteur en chef de la revue Défense nationale, évoque les différents dilemmes auxquels fait face Israël qui doit composer entre sa volonté d’anéantir le Hamas et l’espoir de revoir ses otages.

L’Express : Comment interprétez-vous les bombardements qui ont touché Rafah dans la nuit de lundi à mardi ?

Jérôme Pellistrandi : Sur le terrain, la situation est très complexe. D’un côté, Israël est face à des discussions interminables pour obtenir la libération des otages et de l’autre, le Hamas joue beaucoup sur l’ambiguïté. En fait, le gouvernement de Benyamin Netanyahou est confronté à la volonté d’éradiquer le mouvement islamiste, tout en ayant la nécessité absolue de libérer les otages.

Cet ensemble très compliqué se traduit chez Israël par la perspective d’améliorer l’aide humanitaire destinée aux civils palestiniens, sous la pression internationale, notamment des Etats-Unis, tandis que Tsahal prend le contrôle du point de passage de Rafah. En faisant cela, l’armée israélienne a pour objectif de bloquer les flux qui peuvent fournir le Hamas – sur le plan militaire ou humanitaire – et d’empêcher les combattants du Hamas de sortir du territoire. À l’inverse, I’armée israélienne se lance dans des manœuvres à caractère humanitaire visant à laisser partir les réfugiés vers des zones plus sûres, mais sans pour autant réellement soulager le drame humain qui se joue depuis plusieurs mois.

Est-ce qu’on est au prélude d’une offensive terrestre à Rafah, où se trouvent 1,2 million de déplacés ?

C’est encore difficile à dire. La question c’est de savoir quels seront les modes d’action retenus par Tsahal ? Est-ce que ce sera une offensive terrestre comme ça a déjà été le cas dans la bande de Gaza ? Ou bien est-ce que l’armée israélienne mènera des actions plus ciblées cette fois ? Avec l’accumulation de renseignements et d’informations sur le Hamas depuis le début de la guerre, il est maintenant possible d’avoir des attaques plus limitées dans l’espace. Toute la difficulté à Rafah est l’imbrication au même endroit des forces du Hamas et de la population civile, ce qui crée une impasse militaire pour Tsahal.

Une chose est sûre : Israël ne pouvait pas accepter les conditions de cessez-le-feu bien trop supérieures à la réalité militaire sur le terrain. Stratégiquement, Tsahal veut accentuer la pression militaire pour obliger le Hamas à infléchir sa position. Le mouvement islamiste est affaibli militairement. Alors qu’il ne contrôle plus la totalité de la bande de Gaza, il a déjà perdu 15 000 combattants. Au total, il en resterait 3 000. Difficulté supplémentaire pour le Hamas : celui-ci ne dispose maintenant plus de ravitaillement. On voit aussi qu’il existe des dissensions entre la branche politique – en faveur d’un cessez-le-feu – et la branche militaire, la plus intransigeante.

Comment voyez-vous l’évolution du conflit dans les prochains jours ?

À chaque fois, on a l’impression que les prochains jours seront décisifs, mais ce sera peut-être vraiment le cas cette fois-ci. Plus on avance, plus les jours vont être difficiles. Pour Israël, la question des otages reste cruciale. Or, ils sont complètement dispersés. Dans quel état de santé sont-ils ? Est-ce qu’ils sont encore vivants ? C’est un sujet très sensible, comme le montrent les manifestations qui ont eu lieu à Tel Aviv dernièrement. Toute la complexité pour Israël, ça va être de trouver les modes opératoires les plus efficaces. Pour l’instant, Tel Aviv n’a pas réussi à libérer les otages ou bien à casser totalement le Hamas. Enfin, Israël sait aussi qu’elle est dans une situation inconfortable concernant l’aide humanitaire à apporter aux populations gazaouies.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *