Littérature : la “romance” au top des ventes

Littérature : la “romance” au top des ventes

Il va falloir s’y faire, qu’on s’en réjouisse ou qu’on s’en désole, la romance, new ou dark, a envahi notre palmarès des fictions. Plus une seule liste de best-sellers sans qu’un de ces ouvrages apparaisse, ni palmarès annuel sans que leurs auteures participent aux agapes organisées par L’Express. La semaine du 1er au 7 janvier est symptomatique, qui a vu surgir sur la première marche du podium Morgane Moncomble avec le tome II de Seasons (près de 60 000 depuis janvier 2024), le tome I paru en septembre 2023 ayant déjà cumulé quelque 120 000 exemplaires. La Française de 27 ans est l’une des dernières venues de la vague des romancières qui se sont engouffrées dans cette littérature de genre qui glane des milliers de fans et chasse de plus en plus “l’écrivain mâle de plus de 50 ans” hors de nos palmarès. Rebelote cette semaine (du 8 au 14 janvier), qui, cette fois, fait la part belle à Sarah Rivens avec le tome I de Lakestone, “remisant” dès lors sa consœur Moncomble à la 3e place – ses 159 000 followers sur Instagram et 42 400 sur X (ex-Twitter), sans parler des milliers de vues sur TikTok, en seraient-ils pour quelque chose ?

Il faudrait encore parler de Maud Ankaoua, dont le roman, Respire, paru en 2020 s’est vendu à 117 000 exemplaires chez Eyrolles et à 340 000 en petit format, chez J’ai Lu. Et aussi de Chloé Wallerand et de sa saga The Devil’s sons publié (à quelques millions d’exemplaires) par Plumes du web, et bientôt par HarperCollins Poche. Fans, elles le sont assurément les jeunes lectrices de romance, qu’on a vues, du Festival du livre de Paris au Livre sur la place de Nancy en passant par la Foire du livre de Brive, patienter des heures durant pour se faire dédicacer leurs exemplaires.

Points communs de toutes ces nouvelles stars des rayons ? Faire partie de la gent féminine, avoir souvent débuté sur la plateforme collaborative Wattpad, publier comme des mitraillettes des sagas à consonance majoritairement anglaise, être suffisamment soutenues par les influenceurs pour se passer de la presse. Et quand, en outre, les éditeurs de poche s’en mêlent, les compteurs s’affolent : près de 1,5 million d’exemplaires chez J’ai Lu pour Kilomètre zéro de Maud Ankaoua, et près de 3 millions de la série After d’Anna Todd au Livre de poche !

Un engouement qui suscite des convoitises

Anna Todd, Emma Green, Colleen Hoover, Christina Lauren (Bastard) et bien sûr EL James (50 nuances de Grey), ce sont bien elles, les Anglosaxonnes, qui ont lancé ce grand mouvement qui traite d’histoires d’amour très codées (avec leur rythme, leurs temps forts, leurs moments d’émotions, leurs tropes) émaillées de scènes de sexe plus ou moins explicites notifiées par un système de signaux, tandis que les “trigger warning” situés au début du roman font office d’avertissement sur les sujets traités (sexe non consenti, par exemple).

Un engouement (les Français ont acheté plus de 6 millions d’ouvrages “romance” en 2023) qui suscite des convoitises. Ainsi Editis a-t-il lancé, sous la férule de Julie Cartier et de Sarah Rigaud, la maison Chatterley, qui publie une douzaine de romances par an, avec, par exemple, Okéanos S., alias Océadorable, “la BookTokeuse aux huit millions de like”, auteure de Games I. Le Croque-mitaine. Restent de multiples questions, dont une première, impérieuse : leurs jeunes groupies liront-elles un jour une littérature plus traditionnelle ? Ou resteront-elles, comme les lectrices de Harlequin d’hier, accrochées à leurs romances ? Nul ne le sait, mais tous les espoirs sont permis.

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