L’Ukraine, au cœur de l’élection présidentielle en Slovaquie

L’Ukraine, au cœur de l’élection présidentielle en Slovaquie

La guerre en Ukraine a divisé les Slovaques pendant la campagne. Les deux candidats favoris, Peter Pellegrini, actuel président du Parlement, et Ivan Korcok, diplomate chevronné, sont diamétralement opposés sur le sujet. Le premier étant pro-russe, et le second prônant une politique pro-européenne de soutien à Kiev.

Les Slovaques ont commencé à voter ce samedi 23 mars au premier tour de l’élection présidentielle. Selon les sondages, Peter Pellegrini est crédité de 37 % des intentions de vote contre 36 % pour Ivan Korcok. M. Pellegrini, ex-chef de gouvernement, a le soutien de l’actuel Premier ministre populiste, Robert Fico, qui refuse de fournir toute aide militaire à l’Ukraine, a remis en question la souveraineté de ce pays et a appelé à la paix avec la Russie. “La scène politique slovaque est divisée entre ceux qui sont favorables à la continuation de la guerre (entre la Russie et l’Ukraine) à tout prix, et ceux qui exigent l’ouverture de négociations de paix”, dit-il. “J’appartiens à cette dernière catégorie”, a-t-il déclaré récemment à l’AFP.

M. Korcok, ancien ministre des Affaires étrangères, défend pour sa part la cause ukrainienne. Il a des opinions similaires à celles de la présidente sortante Zuzana Caputova, très critique du gouvernement et qui a décidé de ne pas briguer de second mandat. Parmi les autres candidats en lice, l’eurosceptique Stefan Harabin, 66 ans, qui a ouvertement fait l’éloge du président russe, Vladimir Poutine, arrive en troisième position dans les sondages. “Je ferais exactement la même chose que Poutine en ce qui concerne les événements en Ukraine”, avait-il écrit sur les réseaux sociaux au lendemain de l’agression russe.

Renforcer la posture du Premier ministre pro-russe

Dans cette petite république d’Europe centrale, membre de l’Union européenne, de la zone euro et de l’Otan, le président a des pouvoirs très limités contrairement au Premier ministre. Ses fonctions sont essentiellement protocolaires. Il ratifie néanmoins les traités internationaux, nomme les principaux juges et est le commandant en chef des forces armées.

De nombreux analystes soulignent cependant qu’un chef de l’Etat approuvant la politique de Robert Fico, l’actuel chef de gouvernement, pourrait renforcer la posture de celui-ci. “Si les pouvoirs du président slovaque sont limités, ce vote des électeurs sert de thermomètre, pour voir si la population soutient le virage nationaliste et pro-russe du nouveau gouvernement”, analyse Jana Vargovčikovà pour RFI. “C’est une forme de référendum”, a-t-elle ajouté.

La presse slovaque ne dit pas autre chose. “Fico sera-t-il (élu) président ?” s’interrogeait dans un édito, la rédactrice en chef de Sme. Une manière d’insinuer que le candidat Pellegrini est avant tout un ersatz du Premier ministre. Dans son édition du 21 mars, l’hebdomadaire de Bratislava Tyzden estime par ailleurs qu’”entre un pays libre et un satellite de la Russie, une décision clé sur la Slovaquie sera prise [lors de cette élection]”. Pour son rédacteur en chef, voter Pellegrini équivaudrait à légitimer la politique du Premier ministre Roberto Fico et, à travers elle, celle du Kremlin : “Nous trahissons nos alliés et qualifions les Ukrainiens, qui versent leur sang pour notre liberté, de peuple corrompu.”

En dehors de l’élection présidentielle, la guerre en Ukraine divise la Slovaquie depuis un certain temps. Très vite après le début de l’invasion russe en février 2022, la Slovaquie a fourni à son voisin de l’Est une aide militaire et humanitaire substantielle. Mais cette initiative a été rapidement mise à mal lorsque le Premier ministre populiste Robert Fico a pris le pouvoir en octobre 2023 et a refusé de poursuivre l’aide militaire à Kiev, dont il remet en cause la souveraineté.

Les électeurs slovaques, dont beaucoup ont accueilli des réfugiés ukrainiens chez eux au début de l’invasion, ont également commencé à tourner le dos à Kiev. Plus de la moitié d’entre eux se sont déclarés, dans un sondage, convaincus que l’Occident ou l’Ukraine étaient responsables de la guerre. Le vote en Slovaquie se termine à 22 heures ce samedi et un second tour est prévu le 6 avril prochain, si aucun candidat n’obtient plus de 50 % des voix.

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