Mathématiques : le Français Michel Talagrand remporte le prix Abel 2024

Mathématiques : le Français Michel Talagrand remporte le prix Abel 2024

Comment prédire ce qui est aléatoire ? Le prix Abel de mathématiques a récompensé ce mercredi 20 mars le Français Michel Talagrand, un spécialiste des probabilités et de l’analyse fonctionnelle, pour qui “les mathématiques donnent des ailes”.

Agé de 72 ans, cet ex-directeur de recherche du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) est distingué “pour ses contributions révolutionnaires” qui ont eu “des applications remarquables en physique mathématique et en statistique”, a expliqué l’Académie norvégienne des sciences et des lettres.

Dans un monde marqué par les phénomènes aléatoires, ses travaux ont contribué à développer des méthodes permettant de prédire ce qui va se produire, par exemple concernant la météorologie. Michel Talagrand, qui a fait carrière à l’Institut de mathématiques de Jussieu à Paris, est le cinquième Français à remporter le prix Abel depuis sa première édition en 2003.

“Je n’aurais jamais cru cela possible, c’était une expérience incroyable d’entendre ça”, a-t-il dit à l’AFP après avoir été informé de sa récompense. “Je n’ai pas réagi, je n’ai littéralement rien pensé pendant au moins cinq secondes”. “Les mathématiques françaises se portent extrêmement bien, nous pouvons en être fiers”, a-t-il souligné.

Michel Talagrand raconte avoir a choisi les mathématiques “par nécessité”. “A l’âge de 15 ans, j’ai eu de multiples décollements de la rétine et, pendant dix ans, j’ai vécu dans la terreur de devenir aveugle”. Pour le supporter et faute de pouvoir “aller courir avec les copains”, il se plonge en effet dans le travail. Son père étant agrégé de mathématiques, c’est vers cette matière qu’il se tourne “naturellement”. Et “les maths, plus on en fait plus ça devient facile”, confie-t-il. Sur sa page internet – rudimentaire -, il affirme en anglais que “les mathématiques donnent des ailes” et invite la communauté scientifique à résoudre des énigmes moyennant récompense financière.

“Un mathématicien exceptionnel”

Dans ses attendus, l’académie norvégienne met en exergue trois de ses contributions dans des domaines aux intitulés obscurs : le supremum des processus stochastiques, la concentration des mesures et le verre de spin qui a trait au comportement d’impuretés magnétiques dans des alliages métalliques. “Michel Talagrand s’avère être un mathématicien exceptionnel, doublé d’un redoutable spécialiste dans la résolution de problèmes”, a commenté le président du comité du prix Abel, Helge Holden. “Il a grandement contribué à notre compréhension des processus aléatoires et en particulier des processus gaussiens. Ses travaux ont redéfini plusieurs domaines de la théorie des probabilités”, a-t-il ajouté.

Dans un communiqué, le CNRS a salué sa contribution qui permet “de mieux comprendre comment et pourquoi de nombreux phénomènes sont décrits par la ‘distribution gaussienne'”. “Notre vie entière est guidée par la distribution gaussienne : le poids des bébés à la naissance, les résultats obtenus par les élèves à l’école et l’âge auquel les athlètes prennent leur retraite sont autant d’événements apparemment aléatoires qui suivent parfaitement la distribution gaussienne”, a expliqué l’organisme public.

#Communiqué 🗞️ L’Académie norvégienne des sciences et des lettres attribue le #AbelPrize2024 au Français Michel Talagrand, qui a effectué sa carrière de chercheur au @CNRS. 👏

👉 https://t.co/JGpXIKEBmr#AbelPrize #TalentsCNRS 🏆 @abel_prize @CNRS_INSMI pic.twitter.com/02AnaRLMcx

— CNRS 🌍 (@CNRS) March 20, 2024

De son côté, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Sylvie Retailleau, a exprimé auprès de l’AFP “une immense fierté de voir le dynamisme et l’excellence de la recherche française en mathématiques ainsi récompensés”. Le Premier ministre Gabriel Attal, a lui salué sur X (anciennement Twitter) “une carrière au service de la science”.

Michel Talagrand succède à l’Argentino-américain Luis Caffarelli qui avait remporté le prix Abel l’an dernier pour sa contribution dans le domaine des équations aux dérivées partielles. Baptisé en hommage au mathématicien norvégien Niels Henrik Abel (1802-1829) et doté de 7,5 millions de couronnes (environ 647 000 euros), le prix sera officiellement remis à Oslo le 21 mai. La récompense a été créée au début des années 2000 par le gouvernement norvégien, entre autres, pour compenser l’absence de prix Nobel dans le domaine des mathématiques. Avant Michel Talagrand, elle avait couronné les Français Yves Meyer (2017), Mikhaïl Leonidovich Gromov (2009, également de nationalité russe), Jacques Tits (2008) et Jean-Pierre Serre (2003).

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