Assurance-vie : que faire d’un mauvais contrat ?

Assurance-vie : que faire d’un mauvais contrat ?

Avec la hausse des taux d’intérêt, des rendements solides en 2023, et un début d’année 2024 très prometteur, le ciel s’éclaircit pour les épargnants. Outil flexible doté d’une fiscalité préférentielle, l’assurance-vie redevient attractive et le plus sûr des investissements bancaires. Toutefois, dans un contexte d’inflation, la diversification reste la plus sage des voies. Identifier ses besoins, cerner les différents produits disponibles, négocier son contrat, passer par une société de gestion, surveiller les frais, générer de la performance à long terme : L’Express vous guide.

46 millions : c’est le nombre d’assurances-vies détenues par les ménages français, selon les données de France Assureurs. Que valent-elles ? Impossible à dire, tant ce marché regorge de produits différents lancés au fil des années, la plupart n’étant aujourd’hui plus commercialisés, certains étant même fermés à tout nouveau versement. Derrière le rideau, les archives des compagnies donnent le vertige, avec des centaines de lignes de contrats pour les plus anciennes marques. Dans ce maquis, il revient à chaque épargnant de déterminer si son assurance-vie, souscrite il y a parfois plusieurs dizaines d’années, demeure compétitive. Comment le savoir ? A l’aune du rendement de son fonds en euros, de son offre financière, des frais prélevés et des services associés. Si vous êtes satisfait, conservez-la précieusement. En revanche, que faire en cas de bilan négatif ? Vous avez sur le papier deux solutions : la conservation du contrat ou sa fermeture définitive. Faites le match !

Pourquoi conserver un (mauvais) contrat

Beaucoup d’épargnants s’accrochent à leurs contrats moribonds pour ne pas en perdre les avantages fiscaux. Un constat juste mais auquel il ne faut pas donner plus d’importance que nécessaire. Tout va dépendre de vos besoins et de l’ancienneté de votre assurance-vie. Si vous comptez y puiser sous peu (dans les cinq prochaines années), il reste fiscalement intéressant de le faire dans une enveloppe ayant plus de huit ans plutôt que de réinvestir dans une nouvelle, même de meilleure facture. Car vous profitez de l’abattement annuel sur les intérêts (4 600 euros pour une personne seule, 9 200 euros pour un couple), permettant souvent de ne pas être imposable. Mais, si votre intention d’effectuer des retraits est plus éloignée dans le temps ou carrément incertaine, ce raisonnement tombe à l’eau.

Quid en cas de décès ? Deux informations sont ici décisives pour prendre position : la date de souscription du contrat et votre âge actuel. Si vous l’avez ouvert avant le 13 octobre 1998, vous aurez sans doute intérêt à le conserver, quelle que soit sa qualité : la règle fiscale était alors plus avantageuse puisque tout ce qui a été versé avant vos 70 ans et la date précitée se transmettront sans impôt, de même que les gains. A vous de voir si les montants en jeu sont significatifs, car, si vous avez peu versé avant cette échéance, l’avantage fiscal demeurera minime. Ajoutons que, pour les contrats souscrits et alimentés avant le 20 novembre 1991, tout ce qui y aura été versé (même après 70 ans) avant le 13 octobre 1998 se trouve exonéré au décès, la suite profitant de l’abattement de 152 500 euros par bénéficiaire. Ces très vieilles enveloppes doivent être conservées précieusement dans le but de transmettre. A étudier posément.

Pour les contrats souscrits postérieurement à cette date, la fiscalité reste identique jusqu’à aujourd’hui. Il n’y aurait donc pas de contre-indication sur ce point à le changer, mais n’oubliez pas un autre élément, votre âge. Avez-vous moins ou plus de 70 ans ? Au-delà, réinvestir serait défavorable aux bénéficiaires, puisque le capital versé (pas les intérêts générés) se trouvera alors soumis aux droits de succession selon le lien de parenté entre l’assuré et les bénéficiaires après un abattement global de 30 500 euros (quel que soit le nombre de bénéficiaires). Alors que, avant 70 ans, chaque bénéficiaire profite d’un abattement de 152 500 euros sur le capital perçu. Reste un point important : si votre conjoint ou partenaire pacsé est désigné bénéficiaire en cas de décès, celui-ci sera exonéré de droits à payer, quel que soit votre âge au moment des versements.

Bien qu’importante, la fiscalité ne doit donc pas être un prétexte à l’inaction. Du reste, il existe une alternative pour conserver l’antériorité fiscale de votre contrat tout en changeant de monture : son transfert. C’est autorisé à condition de rester chez le même assureur. Intéressant ? Oui, si le réceptacle proposé affiche un bon rapport qualité/prix. Il faut agir avec discernement et, bien sûr, avoir une motivation réelle au transfert. Les compagnies poussent en ce sens (988 000 transferts ont été recensés entre 2020 et 2022), avec parfois des contraintes d’investissement sur des fonds risqués ou des frais pris au passage. Est-ce dans votre intérêt ? Prudence encore sur un autre point : certaines assurances-vies anciennes incluent un rendement minimal garanti de 4,5 %, voire plus, sur le fonds en euros. Dans un tel cas, autant les conserver, du moins tant que les fonds en euros actuels ne rapportent pas davantage.

Pourquoi et comment aller voir ailleurs

Si votre assurance-vie est sans relief avec, par exemple un rendement du fonds en euros mauvais (moins de 2 % en 2023), récupérez la totalité de votre capital pour le réinvestir sur un bon contrat. A envisager sans tarder si vous n’avez pas besoin de récupérer vos capitaux à court ou moyen termes, si vous n’avez pas passé le cap des 70 ans, ou encore si votre enveloppe ne profite pas d’un taux de rendement garanti élevé (assez rare). En pratique, clore une assurance-vie revient à effectuer un rachat total, une opération demandée à son assureur par lettre recommandée avec accusé de réception, en précisant le numéro du contrat, en prouvant son identité et en fournissant un RIB. Une fois le dossier complété, l’assureur a trente jours au plus pour vous payer.

Voilà pour le modus operandi. Précisons que vous pouvez effectuer ce rachat même si votre produit n’a pas huit ans d’âge. Avec quel impact fiscal ? Tout dépend de son ancienneté, plus ou moins de huit ans, et de la date des versements (avant ou après le 27 septembre 2017). Mais, même pour un contrat récent, la note ne sera pas aussi salée qu’anticipé (voir l’infographie). Et pour cause, l’imposition ne porte que sur les gains compris dans le montant retiré, pas sur la somme totale extraite, puisque cette dernière comporte une partie de capital. En outre, si vous ne payez pas l’impôt sur le revenu ou à un taux très bas, intégrer les intérêts taxables à votre revenu imposable pour imposition au barème progressif restera préférable à subir le prélèvement forfaitaire de 12,8 %. Attention, cette décision porte sur l’ensemble de vos placements éligibles au prélèvement forfaitaire (livrets, valeurs mobilières, etc.).

Retraits une fiscalitee moderee

Clore votre assurance-vie vous tourmente ? Il existe une démarche moins radicale. Ce placement possède un avantage sur nombre de placements (PEA, livrets réglementés, PEL…), vous pouvez en détenir autant que voulu. Rien ne vous empêche de souscrire dès aujourd’hui un ou deux bons contrats, afin de prendre date pour faire tourner le compteur fiscal. La stratégie consiste alors à vous séparer de votre ancienne assurance-vie progressivement pour optimiser les règles fiscales sur les retraits. Une condition, toutefois, qu’elle ait au moins huit ans. Explication : le taux de taxation sur les intérêts compris dans un retrait est alors de 7,5 %, après un abattement annuel important sur les intérêts compris dans les retraits (4 600 euros pour une personne seule, 9 200 euros si elle vit en couple).

Si vous disposez d’un montant significatif, saucissonnez votre départ sur plusieurs années civiles pour utiliser plusieurs fois l’abattement et éviter de passer par la case fiscalité (hors prélèvements sociaux, inévitables). Vous déplacez ainsi progressivement votre épargne sur la nouvelle enveloppe et pourrez clore l’ancienne une fois la totalité des en-cours mise à l’abri. A bon entendeur…

Un article du dossier spécial Placements de L’Express, publié dans l’hebdo du 11 avril.

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