Aya Nakamura chantant Piaf aux JO : la nouvelle cible de l’extrême droite

Aya Nakamura chantant Piaf aux JO : la nouvelle cible de l’extrême droite

“Les bébés détectent la beauté. Ils ne votent pas pour le rap, ni pour la langue banale, ni pour Aya Nakamura mais pour Mozart !” : ce verbatim signé Eric Zemmour semble faire l’unanimité dans l’enceinte du Dôme de Paris où Reconquête tient son premier grand raout de la campagne des élections européennes dimanche 10 mars.

Il faut dire que depuis que L’Express a révélé sa possible participation à la cérémonie d’ouverture des Jeux olympiques, Aya Nakamura déchaîne les passions au point de voir la France se diviser en deux camps : les pro et les anti, qui rejettent la star franco-malienne. Une “France rance”, selon Carole Boinet, directrice de la rédaction du magazine culturel Les Inrockuptibles.

Cette France, qui s’offusque, entre autres, de la liberté de ton prise par la chanteuse, qui s’essaie à des medleys de vocabulaires empruntés aux quatre coins du monde. “Aya Nakamura a inventé cette langue qui est formidable”, fait valoir auprès de l’AFP Carole Boinet qui partage avec Emmanuel Macron le souhait de voir la chanteuse la plus écoutée de France pousser la chansonnette aux Jeux olympiques en juillet prochain. Un besoin “impérieux”, selon elle.

Passe d’armes entre Nakamura et l’extrême droite

Davantage encore à l’heure où les propos racistes affluent sur les réseaux sociaux. La veille, le média d’extrême droite Livre noir a publié la photo d’une banderole tenue par des militants du groupuscule d’ultra-droite Les Natifs. En lettres majuscules, les paroles d’une des chansons d’Aya Nakamura remixées : “Ya pas moyen Aya – Ici c’est Paris – Pas le marché de Bamako”.

Réponse salée et agrémentée de quelques fautes d’orthographe de l’intéressée depuis son compte X (anciennement Twitter) quelques heures plus tard : “Vous pouvez être raciste mais pas sourd 📷.. C’est sa qui vous fait mal ! Je deviens un sujet d’état numéro 1 en débats ect mais je vous dois quoi en vrai ? Kedal”. Quelques minutes suffiront à Eric Zemmour pour reprendre le tweet de l’artiste, dans une publication teintée d’ironie. “Sa fé réfléchir…”.

Vous pouvez être raciste mais pas sourd 🧏.. C’est sa qui vous fait mal ! Je deviens un sujet d’état numéro 1 en débats ect mais je vous dois quoi en vrai ? Kedal https://t.co/rgnGeAAOfD

— Aya Nakamura (@AyaNakamuraa) March 10, 2024

L’industrie musicale vent debout

L’époque est ainsi : très vite, la toile s’enflamme. En France et au-delà, les thuriféraires de la star de “Djadja” viennent à sa rescousse. Sur ses réseaux sociaux, le poids lourd du RnB français, Dadju, se rallie à la chanteuse en martelant : “mnt il faut qu’elle chante”, promettant de “soutenir” l’artiste. Et de traiter de “Bande de chiens”, les militants d’extrême droite ayant brandi la banderole “Ici c’est Paris, pas le marché de Bamako”.

Et en quelques heures seulement, c’est une importante partie de l’industrie musicale qui semble faire bloc derrière Aya Nakamura. “C’est hallucinant, c’est impardonnable que des racistes puissent s’en prendre à une artiste pour ses origines et sa couleur de peau, alors que les JO transcendent les frontières”, souligne auprès de l’AFP Angelo Gopee, patron de Live Nation France, antenne nationale d’un des plus gros producteurs de spectacles au monde. “C’est pas un tweet d’une ministre qu’il faut, tous les politiques devraient être vent debout”, s’insurge-t-il.

Le “racisme n’est pas une opinion”

Car si plusieurs politiques ont exprimé leur soutien à la chanteuse de 28 ans après les attaques, nombreux ont pris le parti de ne pas s’exprimer sur la polémique. Au gouvernement, seule Amélie Oudéa-Castéra semble avoir eu une parole réconfortante pour la chanteuse. “Peu importe comme on vous aime, chère @AyaNakamuraa, foutez-vous du monde entier. Avec vous”, a publié sur ses réseaux la ministre des Sports et des Jeux olympiques.

Les couloirs de l’Assemblée nationale semblent eux aussi rester hermétiques à cette affaire politico-médiatique. Parmi les messages de soutien adressés publiquement à la jeune femme, celui du député Insoumis Antoine Léaument, très présent sur les réseaux sociaux, qui s’en prend directement au groupuscule d’extrême droite Les Natifs : “Ils prétendent aimer leur pays mais ils veulent en exclure la chanteuse francophone la plus écoutée dans le monde depuis Edith Piaf. On ne peut pas être raciste et patriote en France”, sermonne l’élu de l’Essonne dans un message publié sur X.

De son côté, l’ancienne secrétaire d’Etat chargé de l’Egalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa a dénoncé “la violence des propos racistes et sexistes contre Aya Nakamura […] (qui) confine au harcèlement national contre une jeune femme”. Et Marlène Schiappa de rappeler que le “racisme n’est pas une opinion, c’est un délit”.

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