Comment la réalité virtuelle va faire des boxeurs des “super athlètes”

Comment la réalité virtuelle va faire des boxeurs des “super athlètes”

Il n’y a rien de pire pour un boxeur que de se blesser avant une compétition. Pour autant, pas question de lever le pied sur les entraînements. Et si la solution se trouvait dans un casque de réalité virtuelle ? Cette idée, ce sont des chercheurs de l’Institut national de recherche en sciences et technologies du numérique (Inria) qui l’ont eue : faire s’entraîner le pôle France de boxe face à un adversaire virtuel. “Le projet Revea aura 4 ans au moment des Jeux olympiques, mais on travaille sur le sujet depuis le début des années 2000, explique Franck Multon, responsable de l’équipe MimeTIC chargée du projet. L’objectif était d’avoir un outil qui fonctionne pour les JO.”

De l’extérieur du ring, la session ressemble à un entraînement classique : le boxeur, garde montée, combat dans le vide. Mais à l’intérieur de son casque, il voit face à lui un adversaire à la mine patibulaire qui lui assène des coups. Du son et des taches de couleurs l’aident à savoir lorsqu’il est touché ou touche son rival. Depuis son ordinateur, le coach reçoit toutes les informations enregistrées par le dispositif. A la fin de chaque séance, entraîneur et sportif analysent ensemble les données. “La confiance du boxeur en son coach est primordiale, mais l’intérêt de la réalité virtuelle, c’est de valider et de chiffrer leur diagnostic”, pointe Bakary Diabira, entraîneur au pôle France de boxe.

La machine dotée d’un oculomètre permet de mesurer jusqu’aux mouvements des yeux de l’athlète. “L’intérêt de ces entraînements est double : aider le boxeur à améliorer ses performances et permettre à la machine de s’imprégner des images captées sur le boxeur pour gagner en précision”, ajoute Richard Kulpa, enseignant-chercheur en sciences du sport à l’UFR Staps de l’université Rennes II, qui coordonne le projet Revea.

Si l’idée de faire intervenir la réalité virtuelle dans un sport de contact peut, de prime abord surprendre, elle est en réalité parfaitement logique : l’un des entraînements les plus répandus dans le noble art s’appelle le shadow-boxing, pratique qui consiste à boxer contre son ombre, dans le vide, autrement dit sans adversaire. Le casque de réalité virtuelle apporte finalement du réalisme à l’exercice, en confrontant l’athlète à un alter ego virtuel plutôt qu’au vide.

Boxe ou gymnastique virtuelle

Le projet initial inclut déjà trois disciplines : la boxe, donc, mais aussi la gymnastique et l’athlétisme, deux pratiques dans lesquelles la visualisation est essentielle pour améliorer ses performances. La réalité virtuelle permettra, par exemple, de mesurer les délais de passation de témoin des coureurs de relais, mais aussi de les placer en situation de stress en les confrontant à des équipes virtuelles parfois plus rapides.

L’initiative se poursuivra après les Jeux olympiques. Dans un futur proche, une nouvelle version devrait permettre aux boxeurs de s’opposer – virtuellement – à des champions bien réels. Franck Multon détaille : “L’étape suivante consistera à prendre des extraits de combat des adversaires pour boxer virtuellement contre eux.” Le système permettra de capter et d’analyser les mouvements d’un rival en les puisant, par exemple, dans des retransmissions télévisées de combat, pour ensuite adapter les gestes de la machine à son image.

Il n’est, bien sûr, pas question de remplacer la totalité des entraînements des sportifs par ce type de simulation. Le casque constituera une part minoritaire des sessions, un outil d’accompagnement et de mesure. L’équipe de recherche a encore des défis à relever. L’utilisation de la réalité virtuelle est plus complexe dans certaines disciplines que dans d’autres. “Le sport qui nous embête beaucoup, c’est le judo. La simulation physique est complexe. Faire une clé de bras virtuelle, c’est impossible”, confie Richard Kulpa. Ces innovations ayant un coût, les pays susceptibles de se les procurer en tireront, par ailleurs, un avantage concurrentiel. Et dans ce domaine, comme dans beaucoup d’autres, les Français font face à la rude rivalité de deux puissances technologiques : les Etats-Unis et la Chine.

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *