Crédit immobilier : pourquoi la réforme du Haut Conseil de stabilité financière ne passe pas

Crédit immobilier : pourquoi la réforme du Haut Conseil de stabilité financière ne passe pas

Il n’y aura finalement pas de réforme du Haut conseil de stabilité financière (HCSF). Cette proposition, visant à modifier le fonctionnement de cette instance pour faciliter l’octroi de crédits immobiliers aux ménages, a été retirée, ce lundi 29 avril, par son auteur, le député Renaissance Lionel Causse, pendant son examen à l’Assemblée.

Après plusieurs heures de débats dans l’hémicycle, l’élu a estimé que des amendements adoptés en soirée avaient trop dénaturé sa proposition de loi, en première lecture. “Je demande le retrait de ce texte qui n’a plus aucun sens et plus aucune raison d’être”, a déclaré l’élu macroniste. Soutenu par Bercy, mais critiqué par la Banque de France comme par la Banque centrale européenne (BCE), le texte avait été mis sur la table pour faire face à la chute préoccupante de production de nouveaux crédits à l’habitat de 40 % en 2023. Un taux au plus bas depuis 2015.

En cause notamment, le coût des crédits immobiliers, qui est toutefois repassé sous la barre des 4 % au premier trimestre 2024, et à 3,99 %, selon les données de l’Observatoire CSA/Crédit logement publiées mi-avril.

Les taux d’intérêt pour l’habitat sont passés de 4,17 % en moyenne au mois de janvier à 4,11 % en février, une première baisse en deux ans.

“Organisation trop complexe”

Créé en 2013 en tirant les leçons de la crise financière des années 2008 à 2011, le HCSF a fixé au fil des ans un ensemble de préconisations sur le crédit immobilier, avec toujours pour objectif de limiter le surendettement des ménages. Mais alors, que contenait cette proposition de loi pour s’attirer autant de critiques et d’amendements ?

Le premier article de la proposition de loi initiale ajoutait deux membres au Haut Conseil de stabilité financière qui en compte actuellement huit, l’un issu du Sénat et l’autre de l’Assemblée, à parité. La présence de parlementaires contribuerait “à renforcer la légitimité démocratique des mesures prises”, avait fait valoir son auteur Lionel Causse, réfutant une menace sur l’indépendance du HCSF vis-à-vis du pouvoir politique. Une crainte dont avaient fait part les socialistes ainsi que la BCE, dans un avis publié vendredi dernier. Finalement, la majorité présidentielle a voté contre cet article, mécontente de l’adoption d’amendements de la France Insoumise (LFI), et dénonçant des retouches créant une “organisation trop complexe”.

En outre, l’autre mesure phare du texte, déjà remaniée en commission, l’a encore été lundi en séance. Elle offrait dans sa version initiale la possibilité de déroger aux normes du HCSF en matière de conditions d’octroi de crédit, mais elle avait été réécrite pour maintenir “l’effectivité des pouvoirs” du Haut Conseil. En prévoyant que ce dernier pourrait “fixer les conditions” dans lesquelles les établissements de crédits “peuvent déroger à ses décisions”.

“Réponse dangereuse”

Mais l’adoption d’amendements, émanant de députés d’opposition comme de la majorité et soutenus par le gouvernement, ont constitué la modification de trop aux yeux de Lionel Causse. Pour le socialiste Philippe Brun, ce texte était “une réponse imparfaite, insuffisante et peut-être dangereuse à un vrai problème, celui du défaut de production du logement dans notre pays”. “Nous ne réglerons pas la crise du logement en poussant les ménages à s’endetter toujours plus”, avait aussi critiqué le communiste Nicolas Sansu.

Le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau avait fait part mi-mars de son opposition à la réforme initiale, soulignant que les banques n’utilisaient pas à plein la flexibilité déjà permise. Le Rassemblement national avait annoncé qu’il voterait pour le texte, en raison de son objectif affiché. “Mais pour des raisons de simplification et pour des raisons de principe, nous appelons à la suppression” du HCSF, avait dit le député RN Jocelyn Dessigny.

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