Déficit public : comment Attal tente de composer avec une majorité divisée

Déficit public : comment Attal tente de composer avec une majorité divisée

Un peu d’eau sur un début d’incendie. Gabriel Attal n’est pas venu les mains vides ce mardi 2 avril à la réunion hebdomadaire des députés Renaissance. Le Premier ministre a annoncé devant les siens le lancement d’une mission parlementaires sur la “taxation” des rentes, conduite par le rapporteur général du Budget, Jean-René Cazeneuve et chargée de faire des propositions d’ici juin. “On va trancher ce débat ensemble, car on ne doit pas subir, mais on doit être à l’offensive” pour “avancer de manière coordonnée, cohérente”, a expliqué le locataire de Matignon. Les députés du camp présidentiel sont ostensiblement cajolés. Embarqués par l’exécutif dans la préparation du projet de loi de finances 2025. “Un député qui s’ennuie est un député dangereux”, juge un ancien ministre. Il est temps de les occuper.

Gabriel Attal, l’homme aux injonctions contradictoires. Le Premier ministre compose avec une majorité tourmentée par la réforme de l’assurance chômage et inquiète d’un effort mal réparti pour résorber le déficit public. Cette angoisse étreint les macronistes historiques, guère à l’aise avec la mue droitière d’Emmanuel Macron. Elle remonte jusqu’au patron du Modem, François Bayrou, ou la présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, favorables à une taxation des “plus riches” ou des “profits qui résultent d’une situation exceptionnelle”.

Le chef du gouvernement doit leur donner des gages… tout en posant le cadre du débat. Cette mission parlementaire est une concession autant qu’un verrouillage. “Attal est le gardien du temple sur le séquençage des annonces, glissait récemment une ministre. On ne peut pas avoir chaque jour un ministre qui fait un bouquin, un député qui sort sur un truc…. Il est là pour rappeler la ligne et éviter la bordelisation.”

“On ne lutte pas contre le capital, mais contre les rentes”

Le Premier ministre Attal refuse toute hausse des impôts. Le chef de la majorité écoute les requêtes de taxations des plus aisés. Gabriel Attal avance sur cette ligne de crête avec l’explosion du déficit public. Ici, chaque mot compte. Ainsi, la mission lancée par l’exécutif porte sur la taxation des “rentes” – terme à connotation péjorative – et pas les “superprofits” ou “superdividendes”. Il ne faudrait pas entacher l’image pro-business de l’exécutif. “C’est notre philosophie, défend la députée Nadia Haï, membre de cette task force. On ne lutte pas contre le capital, mais contre les rentes. Nous sommes pro-productivité.”

Cette stratégie avait été esquissée le 27 mars par Gabriel Attal. Le locataire de Matignon avait refusé sur TF1 toute hausse des impôts des “entreprises” et des “classes moyennes”, tout en récusant le moindre “dogme” sur la taxation des superprofits. Il avait alors rappelé que les énergéticiens et les laboratoires de biologie avaient déjà été soumis à une taxe spécifique.

“Faire des têtes a queue renvoie un sentiment de fébrilité”

De cette déclaration, il faut surtout retenir le premier volet. L’exécutif peut bien accorder quelques concessions, il ne déviera pas de sa ligne. Hors de question d’alourdir la fiscalité, totem macroniste depuis 2017. “Quel est l’actif politique de Macron en termes de bilan ? C’est l’attractivité économique du pays, la baisse du chômage, et la baisse de la fiscalité, assure un interlocuteur régulier du chef de l’Etat. Augmenter les impôts maintenant serait un renoncement absolu de tout, sur le plan du bilan.” “Faire des têtes a queue renvoie un sentiment de fébrilité”, ajoute une cadre Renaissance.

On bouge un peu le volant, sans changer de file. Le refus d’une hausse globale des impôts – conjugué à une taxation spécifique de certains revenus – pourrait convenir au groupe Renaissance et son aile gauche. Encore faut-il que la mission lancée par Gabriel Attal ne poursuive pas l’objectif assigné aux commissions : enterrer les problèmes. “Ce truc, c’est de l’enfumage, tacle un député Renaissance. Juste une manière de dire qu’on nous écoute.”

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