Directive européenne CSRD : les entreprises doivent aussi réfléchir à leur impact social

Directive européenne CSRD : les entreprises doivent aussi réfléchir à leur impact social

Jamais les entreprises n’auront porté autant d’attention aux enjeux de responsabilité sociale et environnementale. Il n’a pas fallu attendre la création du sigle RSE, et encore moins la directive européenne Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), pour que les entreprises s’engagent. Mais il faut reconnaître une remarquable accélération. Nous souhaitons partager, à la suite de la deuxième édition du Sommet de la Mesure d’Impact, trois convictions.

La CSRD doit être l’opportunité d’une transition juste

Depuis janvier, les entreprises européennes d’une certaine taille sont soumises à la directive CSRD, qui va progressivement harmoniser et généraliser le reporting sur les informations de durabilité pour 50 000 d’entre elles. Nous pouvons nous réjouir de la dynamique impulsée par nos instances européennes, qui est historique.

Si les normes extra-financières cadrant la CSRD abordent tant les enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance, elles ne consacrent pas la même attention à chacun d’entre eux. La démarche impulsée par la CSRD oblige à se poser la question de ses impacts positifs comme négatifs en matière sociale tout au long de sa chaîne de valeur, mais la rigueur exigée sur l’environnement par la directive, de même que l’intérêt des investisseurs, ne doivent pas amener les entreprises à se désinvestir des enjeux sociaux et sociétaux, pour se concentrer sur ce qui est le mieux défini par les observateurs : les enjeux de décarbonation, de biodiversité, de compliance ou encore d’anticorruption.

L’accompagnement social et sociétal est une condition nécessaire à la transformation environnementale

Les analyses économiques et les rapports qui alertent sur le poids financier de la transition écologique sur les populations, les entreprises et les financeurs publics sont nombreux. Pour beaucoup de ménages, la nécessaire transition écologique nourrit un sentiment de peur du changement et d’angoisse vers l’avenir. Et ces nouveaux défis s’ajoutent à d’autres tout aussi considérables : accès au logement, réussite scolaire, intégration, inclusion dans l’emploi, égalité de genre, accès à la santé, bien vieillir…

Aussi, tous les acteurs, et notamment les pouvoirs publics et les entreprises, doivent porter une attention renouvelée aux publics et territoires fragiles. Pour les entreprises, cela peut prendre des formes diverses : vigilance et investissement dans la formation de tous les collaborateurs dont les métiers vont évoluer, actions auprès des travailleurs pauvres, développement d’une offre adaptée aux clients modestes, partenariats renforcés avec l’économie sociale et solidaire, actions communes avec les collectivités locales. Les millions d’actions menées par les entreprises de toute taille font la différence pour notre vivre ensemble. Surtout si elles sont choisies avec soin sur des critères d’impact social.

Mesurer son impact social pour changer le système

C’est au tour des entreprises elles-mêmes, des acteurs de terrain et de l’économie sociale et solidaire, aux côtés des chercheurs, de prendre le relais : pour expérimenter dans les territoires la mesure d’impact des projets en faveur de la lutte contre la précarité ou la création de lien social, pour sortir des logiques chiffrées et s’intéresser aux domaines où l’impact est intangible, pour mesurer les réponses directes aux besoins sociaux et sociétaux tout en comprenant pourquoi ces besoins persistent.

La mesure d’impact doit permettre de mieux accompagner les individus dans leurs parcours de vie, plutôt que sur des épisodes ponctuels d’accident de vie. Pour les territoires, elle doit encourager des mesures structurantes qui donnent des résultats dans la durée, elle doit être un outil au service d’une transition juste pour toutes les catégories de population, toutes celles et ceux pour qui, la lutte contre les inégalités environnementales crée de nouvelles inégalités. Elle doit favoriser les coopérations entre acteurs, en facilitant l’alignement sur des objectifs communs, tout en garantissant des résultats aux financeurs.

Les entreprises, déjà fortement engagées, sont au cœur de cette transition, car le progrès technologique seul ne suffira pas à résoudre les défis climatiques et environnementaux. Il est temps désormais de remettre l’accent sur la dimension sociale de la mesure d’impact, en considérant les individus et les citoyens dans leur globalité en tant que consommateurs, résidents, parents ou employés, afin de mesurer et de changer véritablement le système de manière collective.

Signataires :

Agnès Audier, Présidente de l’Impact Tank, Jean-Marc Borello, Président du directoire du Groupe SOS, Thierry Beaudet, Président du Conseil Economique Social et Environnemental, Julia Faure, coprésidente du Mouvement Impact France, Jean-Hervé Lorenzi, Fondateur du Cercle des économistes, Muriel Pénicaud, Ancienne ministre, administratrice de sociétés, Bertrand Waelkaer, Directeur général Adjoint, Agence française de développement, Véronique Bédague, PDG Nexity, Jean-Marie Tritant, CEO Unibail-Rodamco-Westfield, Frédérique Giavarini, Secrétaire Générale du Groupe Fnac Darty et Directrice Générale de Nature et Découvertes, Antoine Sire, Directeur de l’engagement BNP Paribas, Elizabeth Tchoungi, Directrice Exécutive en charge de la RSE, Groupe Orange, Antoine Denoix, PDG AXA Climate, Maxime Baduel, Délégué ministériel à l’Economie sociale et solidaire, Alexandre Viros, Expert en transformation, ex-président du Groupe Adecco, Président de l’association Dialogues, Arnaud Mourot, Président, Play international, Bernard Bazillon, Associé, Directeur national Economie Sociale et Solidaire, KPMG France, Camille Bockel, ESG Corporate Lead, AXA France, Carine de Boissezon, Directrice Impact, EDF, Damien Baldin, Directeur général, La France S’engage, Emmanuel Bacry, Directeur de recherche au CNRS, directeur scientifique du Health data hub, Frédéric Faure, Vice-président de Biocoop et Président du Fonds de dotation Biocoop, Gilles Bœuf, Professeur des universités, Hubert Tondeur, Vice-président du Conseil National de l’Ordre des Experts-Comptables, Professeur titulaire de la chaire comptabilité et gouvernance au CNAM, Louis Raynaud de Lage, Expert Impact Social, Bartle, Michele Fioretti, Chercheur Sciences Po Paris, Prix Edmond Malinvaud 2023, Orianne Ledroit, Directrice générale Edtech France, Timothée Duverger, Enseignant-chercheur, Sciences Po Bordeaux, Tony Bernard, Directeur général de l’Impact Tank, Valérie Daher, Directrice générale Break Poverty Foundation, Yasmine Hamraoui, Associée Impact Partners

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