Gaza : le vote à l’ONU d’un “cessez-le-feu immédiat” qui met la pression sur Israël

Gaza : le vote à l’ONU d’un “cessez-le-feu immédiat” qui met la pression sur Israël

Vrai revirement, ou simple vote sans incidence concrète ? Le Conseil de sécurité de l’ONU a pour la première fois exigé ce lundi 25 mars un “cessez-le-feu immédiat” à Gaza, un appel bloqué plusieurs fois par les Etats-Unis, qui se sont cette fois-ci abstenus. La résolution, adoptée sous les applaudissements par 14 voix pour, et une abstention, celle de Washington, “exige un cessez-le-feu immédiat pour le mois du ramadan” – qui a déjà commencé il y a deux semaines -, devant “mener à un cessez-le-feu durable”, et “exige la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages”.

Cette résolution adoptée est issue du travail des membres non-permanents du Conseil, qui ont négocié tout le week-end avec les Etats-Unis pour tenter d’éviter un nouvel échec, selon des sources diplomatiques auprès de l’AFP. Vendredi dernier, la Russie et la Chine avaient en effet mis leur veto à un projet de résolution américaine soulignant la “nécessité” d’un “cessez-le-feu immédiat” à Gaza en lien avec les négociations pour la libération des otages capturés lors de l’attaque sanglante et sans précédent du Hamas le 7 octobre sur le sol israélien. “Ce bain de sang a duré trop longtemps. […] Enfin, le Conseil de sécurité prend ses responsabilités”, s’est félicité l’ambassadeur algérien Amar Bendjama, co-dépositaire du texte.

Cette fois-ci, la résolution ne lie donc pas ses demandes aux efforts diplomatiques du Qatar, des Etats-Unis et de l’Egypte, même si elle “reconnaît” l’existence de ces pourparlers visant à une trêve accompagnée d’un échange d’otages et de prisonniers palestiniens. Mais l’ambassadrice américaine Linda Thomas-Greenfield, a de son côté malgré tout insisté sur un lien, mettant la pression sur le Hamas. “Un cessez-le-feu peut commencer immédiatement après la libération d’un premier otage […] C’est le seul moyen d’assurer un cessez-le-feu et la libération des otages”, a-t-elle déclaré.

Les tensions croissantes Etats-Unis-Israël

Si la Maison-Blanche a assuré qu’il ne s’agissait en aucun cas d’un “changement de cap”, cette bascule dans leur position a suscité une vive réaction du côté israélien. Immédiatement après l’adoption de la résolution, Israël a annulé la visite d’une délégation qui était attendue à Washington, déclarant que l’abstention américaine “nuisait” à la fois à son effort de guerre et à ses efforts pour libérer les otages. “Il s’agit d’un net recul par rapport à la position constante des Etats-Unis au Conseil de sécurité depuis le début de la guerre” le 7 octobre, a déclaré le bureau du Premier ministre Benyamin Netanyahou dans un communiqué.

Une passe d’armes diplomatique qui symbolise les tensions croissantes entre les deux pays sur la conduite de la guerre à Gaza, et notamment autour de la possible opération militaire israélienne sur la ville de Rafah où sont actuellement regroupés près d’1,5 million de civils palestiniens. “Nous sommes très déçus qu’ils ne viennent pas à Washington pour nous permettre d’avoir une conversation approfondie à propos des alternatives crédibles à une opération terrestre à Rafah”, a déclaré John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain, tandis que la Maison-Blanche s’est dit “surprise” par la réaction d’Israël.

Le ministre israélien de la Défense Yoav Gallan se trouve néanmoins déjà dans la capitale américaine, où il rencontrait ce lundi le conseiller à la sécurité nationale américaine, Jake Sullivan, ainsi que le chef de la diplomatie Antony Blinken. “Nous n’avons pas le droit moral d’arrêter la guerre tant qu’il y a des otages à Gaza”, a déclaré Yoav Gallant juste avant cette entrevue, alors que le ministre israélien doit aussi voir mardi le chef du Pentagone Lloyd Austin.

La sortie d’un “silence assourdissant”, dit la France

Le vote de cette résolution a en revanche largement été applaudi du côté palestinien. Ce vote “doit être un tournant […] Cela doit être le signal de la fin de cet assaut d’atrocités contre notre peuple”, a déclaré l’ambassadeur palestinien Riyad Mansour, saluant un “jour historique”. L’Autorité palestinienne a également “salué” cette adoption, demandant “l’arrêt définitif de cette guerre criminelle et le retrait immédiat d’Israël de la bande de Gaza” par l’intermédiaire du ministre palestinien des Affaires civiles, Hussein al-Cheikh. Enfin, même le Hamas a salué ce lundi la résolution onusienne, exprimant sa “volonté d’engager un processus d’échange” prisonniers/otages “immédiatement”, alors que les négociations pour une trêve entre le groupe islamiste et Israël n’ont pas abouti ces dernières semaines.

Cette résolution peut-elle être amenée à changer l’équilibre des forces ? Alors que celle-ci se concentre sur un cessez-le-feu temporaire pour le ramadan, plusieurs pays, dont la France, ont en tout cas insisté sur la nécessité d’un arrêt des combats à plus long terme. Le Conseil devra aussi “œuvrer au relèvement et à la stabilisation de Gaza” et “remettre un processus politique sur les rails visant à l’établissement de la solution des deux Etats”, a insisté l’ambassadeur français aux Nations unies Nicolas de Rivière, félicitant le Conseil d’être sorti de son “silence assourdissant”.

Le ministre français des Affaires étrangères Stéphane Séjourné a quant à lui assuré que la résolution onusienne devait être “pleinement mise en œuvre”, tandis que le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a estimé que sa non-application serait “impardonnable”. Pas de doute : la pression sur Israël ne risque pas de se relâcher dans les prochaines semaines.

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