L’ONU, tribune préférée des dictateurs et tyrans du monde, par Abnousse Shalmani

L’ONU, tribune préférée des dictateurs et tyrans du monde, par Abnousse Shalmani

A quoi sert encore l’ONU, si ce n’est à être une scène de spectacle où les représentants des Etats criminels viennent effectuer un numéro de claquette qui emprunte au burlesque ? A l’image d’Ebrahim Raïssi, président Iranien, à la tribune des Nations unies en septembre 2022, après l’assassinat de Mahsa Amini. Alors que les manifestations étaient quotidiennes dans tout l’Iran, le maître de la répression y brandissait, comme preuve de l’oppression impérialiste américaine, un portrait du général Qassem Soleimani, l’artisan de la victoire de Bachar el-Assad en Syrie avec ses redoutables milices chiites, le fer de lance de la politique extérieure toxique iranienne au Liban, au Yémen, à Gaza, en Irak. Puis, ne pouvant s’arrêter en si bon chemin, de disserter sur les succès de la révolution iranienne, “une société gravée dans la justice et la préservation des droits de l’homme”, sans rire.

Ce discours dit ce qu’est devenu l’ONU. Une mauvaise blague. Kofi Annan, son ex-secrétaire général, avait déjà mis en garde en 2006 : “La politisation a miné les sessions du Conseil des droits de l’homme à un tel point que sa crédibilité déclinante jette une ombre sur la réputation du système des Nations unies dans son ensemble.” C’est ainsi que l’ONU a confié à la République islamique d’Iran la présidence du Forum social du Conseil des droits de l’homme de novembre 2023 à Genève. D’ailleurs, ce fut un Forum édifiant : les responsables iraniens ont tout simplement coupé les micros d’ONG critiques lors des réunions. Les mollahs ont censuré comme à la maison dans l’enceinte de l’ONU. Parce que l’ONU est devenue la tribune préférée des dictateurs et tyrans du monde.

Le nouveau haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Volker Türk, considère lui que la théorie du “grand remplacement” est le plus grand problème aujourd’hui : “Dans de nombreux pays, y compris en Europe et en Amérique du Nord, je suis préoccupé par l’influence apparemment croissante des théories du complot dit du grand remplacement. Elles sont fondées sur l’idée fausse selon laquelle les juifs, les musulmans, les personnes non blanches et les migrants cherchent à remplacer, ou supprimer, les cultures et les peuples des pays.” J’avoue avoir sursauté quand j’ai entendu que la théorie du “grand remplacement” concernait aussi les juifs. Je rappelle que les juifs ne sont que 15,7 millions de personnes dans le monde, et que 46 % de la population juive mondiale vit en Israël. Je ne vois pas trop par quel miracle les juifs pourraient “grand-remplacer” qui que ce soit, mais, bon, peut-être que c’est avec un but d’inclusion que Volker Türk a mentionné les juifs.

Mépris de l’homme occidental

Et puis c’est vrai que face au génocide des Ouïgours en Chine, des Rohingya en Birmanie, à la guerre qui décime depuis trente ans le Nord-Kivu, faisant 7 millions de déplacés, aux massacres et exactions commis par les islamistes dans le Sahel, à la chasse aux migrants subsahariens menés par le président tunisien Kaïs Saïed ou à l’invasion du Haut-Karabakh par l’Azerbaïdjan, sans parler de la guerre en Ukraine ou de la guerre Israël-Hamas, la grande préoccupation droits-de-l’hommiste du moment ne peut être que la théorie du “grand remplacement”.

Sans oublier ce grand malheur que le “grand remplacement” est associé à la guerre “anti-woke” – toujours d’après Volker Türk. Et voilà comment un beau matin on découvre que Yascha Mounk (Le Piège de l’identité), Samuel Fitoussi (Woke Fiction), Jean-François Braunstein (La Religion woke), Nathalie Heinich (Le wokisme serait-il un totalitarisme ?), Chloé Morin (Quand il aura vingt ans) ou Pierre-Henri Tavoillot sont d’affreux et dangereux fascistes, sont contre les minorités et surtout contre les femmes ! C’est bien connu que tous ces intellectuels se réveillent le matin en se demandant à quelle sauce ils vont détruire l’inclusion.

“Traiter tous les hommes avec la même bienveillance et prodiguer indistinctement sa bonté peut tout aussi bien témoigner d’un profond mépris des hommes que d’un amour sincère à leur égard”, écrivait Nietzsche. Je parie que pour Volker Türk ce discours hors sol est l’expression de sa honte et de son mépris de l’homme occidental.

Abnousse Shalmani, engagée contre l’obsession identitaire, est écrivain et journaliste

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