“En amour, on ne compte pas”, dit l’adage populaire. C’est pourtant ce que fait Bercy, lorsque vous déclarez vos impôts, pour calculer votre taux de prélèvement à la source. Tout en précisant désormais : “Afin de prendre en compte les différences éventuelles de niveaux de revenus au sein du couple, les conjoints peuvent, s’ils le souhaitent, opter pour un taux de prélèvement individualisé en fonction des revenus respectifs.” En effet, la conjugalité de l’imposition étant à la base de notre système fiscal, la discussion reste encore d’ordre privé. Charge à chacun de veiller à ses intérêts.
Pour prendre la bonne décision entre taux commun au couple ou individualisé, il faut savoir d’abord que ce choix n’a aucun impact sur le montant global de l’impôt. “Un taux d’imposition commun à deux concubins pacsés, ou à deux personnes mariées, n’entraîne aucune optimisation fiscale à l’échelle du ménage, confirme Géraldine Métifeux, associée gérante du cabinet de gestion de patrimoine Alter Egale. Il sert simplement à s’aligner sur le régime marital par défaut de la communauté de biens.”
Le taux personnalisé sera proposé par défaut l’an prochain
Le taux n’est donc qu’une simple clé de répartition. Garder le taux mutualisé relève du bon sens si les dépenses et les ressources sont mises en commun. Or le régime de la communauté de biens, même dans le cadre du mariage, devient de plus en plus rare. Pour suivre cette évolution sociétale, et pour être moins discriminant envers les femmes, qui ont souvent le plus bas revenu, le taux personnalisé sera proposé par défaut dès l’année prochaine.
“Même avec un taux individualisé, le conjoint le plus aisé reste fondamentalement gagnant”, note toutefois Lise Chatain, professeure à l’université de Bourgogne, où elle codirige le master de droit fiscal. Quelle que soit l’option choisie, l’assiette fiscale du ménage est mise en commun pour le calcul de l’impôt. Plus les revenus sont inégaux entre conjoints, plus il est fiscalement avantageux d’être en couple pour celui qui gagne le plus… même avec un taux individualisé.
“S’ajoutent aussi d’autres inégalités dont les couples ont rarement conscience, poursuit Lise Chatain. Ainsi, les revenus fonciers, même si le patrimoine n’est détenu que par un seul des deux conjoints, sont divisés en deux lors du calcul de ce taux personnalisé.” Si la mise en place d’un taux individualisé par défaut l’année prochaine est une avancée qui a le mérite d’exister, elle ne met pas un point final au débat sur l’argent et l’imposition au sein des couples.
