Xi Jinping en Europe : que vient donc faire le président chinois en Hongrie et en Serbie ?

Xi Jinping en Europe : que vient donc faire le président chinois en Hongrie et en Serbie ?

Le président chinois n’avait pas voyagé en Europe depuis 2019. Entre l’épidémie de Covid-19 et la guerre en Ukraine, le Vieux continent a bien changé. C’est dans ce contexte d’incertitudes diplomatiques que la France déroule à Xi Jinping le tapis rouge. Objectif : s’assurer que le principal allié du président russe Vladimir Poutine, ne bascule pas dans un soutien clair à son effort de guerre face à Kiev. Après sa visite au président Emmanuel Macron, le président chinois s’envolera ce mardi soir en Hongrie et en Serbie, deux Etats considérés comme les plus favorables à Moscou.

La Chine utilise l’est du continent comme point d’appui pour ses ambitions économiques croissantes en Europe. Alors que les principaux dirigeants européens poursuivent des politiques de plus en plus protectionnistes pour limiter l’influence de Pékin et de Moscou sur le continent, les gouvernements des dirigeants nationalistes conservateurs Viktor Orban de Hongrie et Aleksandar Vucic de Serbie courtisent les liens économiques avec l’empire du Milieu.

Avec cet itinéraire, Pékin prouve aussi qu’il est seul à décider de son agenda et fait un geste de sympathie vis-à-vis de pays comme la Hongrie et la Serbie. Leurs deux dirigeants, Orban et Vucic, se sont rendus dans la capitale chinoise lors du forum des “Nouvelles routes de la soie” d’octobre 2023 – seuls Européens, au côté de Vladimir Poutine. Depuis l’arrivée de Xi au pouvoir, ils n’ont jamais failli à montrer des signes de respect, de proximité, d’accueil des investissements chinois, et n’ont jamais critiqué ouvertement le géant asiatique.

25e anniversaire du bombardement de l’Otan à Belgrade

Pour commencer, Xi devrait arriver à Belgrade mardi soir et le choix de cette destination n’est pas un hasard. En effet, Pékin a injecté des milliards dans ce pays voisin des Balkans, qui n’est pas dans l’Union européenne, notamment dans les secteurs minier et manufacturier. Concrètement, la Chine a construit des routes et a financé la mise en place d’une ligne de chemin de fer entre Belgrade et Budapest. D’ailleurs, l’année dernière, Pékin et Belgrade ont signé un accord de libre-échange. Il faut dire que les Chinois sont accueillis les bras ouverts en Serbie : ils n’ont pas besoin de visa et leurs marques inondent les marchés.

En plus d’une coopération économique et diplomatique, les deux alliés s’entendent sur le plan militaire. En 2022, par le biais de six gros avions porteurs de l’armée de l’air chinoise, Pékin a livré de manière spectaculaire à la Serbie plusieurs batteries de missiles sol-air pour constituer une “petite muraille aérienne” au pays des Balkans.

Par ailleurs, la visite de Xi Jinping coïncide avec le 25e anniversaire du bombardement de l’Otan dans la capitale serbe, qui a fait trois morts. Ce dernier avait été attribué à une erreur de cartographie de la CIA. En 1999, l’Alliance atlantique avait mené une campagne de bombardements contre des cibles serbes durant la guerre du Kosovo. Le président chinois Xi Jinping a critiqué l’Otan pour son “flagrant” bombardement contre l’ambassade de Chine en Yougoslavie en 1999, avertissant que Pékin “ne permettrait jamais qu’une histoire aussi tragique se répète”.

“Il y a vingt-cinq ans aujourd’hui, l’Otan bombardait de manière flagrante l’ambassade de Chine en Yougoslavie, tuant trois journalistes chinois”, a écrit Xi dans Politika. “Cela, nous ne devrions jamais l’oublier. Le peuple chinois chérit la paix, mais nous ne permettrons jamais qu’une histoire aussi tragique se répète”, a-t-il asséné. Il a également salué “l’amitié à toute épreuve” entre la Chine et la Serbie, qui, selon lui, a été “forgée avec le sang de nos compatriotes”.

La Hongrie, porte d’entrée vers l’Europe

Ensuite, le président chinois se rendra du 8 au 10 mai en Hongrie. Là aussi rien n’est laissé au hasard puisque la Hongrie a été le premier pays européen à signer, en 2015, un accord de coopération avec Pékin dans le cadre de “l’Initiative de la ceinture et de la route”. Alors que la Chine voit Budapest comme une porte d’entrée en Europe, elle investit aussi massivement dans les usines de véhicules électriques, comme celle de Szeged, dans le sud de la Hongrie. Cela fait partie de sa nouvelle stratégie de délocalisation en Europe pour rester dans les limites de l’Union européenne dont la politique commerciale est de plus en plus stricte.

En février dernier, la Chine avait proposé d’approfondir sa coopération en matière de sécurité avec la Hongrie, soulignant le réchauffement des liens entre Budapest et Pékin, au moment même où les responsables hongrois snobaient une délégation de Washington en visite dans le pays. À ce moment-là, le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, avait rencontré le ministre chinois de la Sécurité publique, Wang Xiaohong.

Résultat : une clause d’un accord de sécurité a été signée entre la Chine et la Hongrie prévoyant la possibilité que des agents des deux pays patrouillent ensemble. Or ce n’est pas la première fois que l’on voit des patrouilles sino-européennes : des policiers chinois circulent dans des zones touristiques en Croatie depuis 2018 et en Serbie depuis 2019. Une façon aussi pour Pékin de montrer qu’elle sait se faire des amis en Europe.

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