Affrontement Iran-Israël : la République islamique a-t-elle les moyens d’aller plus loin ?

Affrontement Iran-Israël : la République islamique a-t-elle les moyens d’aller plus loin ?

Il y a un mois, à la foire internationale de l’armement de Doha, l’Iran étalait avec fierté ses nouveautés, dont son dernier-né, un drone de haute précision symboliquement nommé “Gaza”. La République islamique s’est fait depuis quelques années une spécialité de la production de ce type d’armes relativement low cost. A Doha, les Iraniens avaient pour but non seulement de montrer leurs armes, mais aussi de les vendre après l’expiration de l’embargo de l’ONU. Ces derniers jours, cependant, les dirigeants de Téhéran ont plutôt à cœur d’accumuler les stocks.

Avec l’attaque du 13 avril contre Israël, le pouvoir iranien a voulu solder les comptes avec l’ennemi israélien. “On peut raisonnablement penser que les dirigeants des Gardiens de la révolution avaient peur pour leur propre vie, et ils se devaient de faire quelque chose pour arrêter Israël”, assure Fabian Hinz, chercheur à l’Institut international d’études stratégiques (IISS) et spécialiste en armement. “A un moment, les Iraniens se sont sentis obligés de répliquer, car les Israéliens frappaient de plus en plus fort. Après l’ambassade à Damas, cela aurait pu être Beyrouth”, renchérit Alex Vatanka, directeur du programme Iran au Middle East Institute, à Washington.

Néanmoins il est peu probable que les Israéliens en restent là. “S’il devait y avoir une réplique d’Israël, une ‘contre-réplique’ iranienne serait logiquement encore plus importante que cette première salve”, met en avant David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris). Mais les Iraniens ont-ils dégainé toute leur puissance ou ont-ils encore un arsenal caché en cas d’escalade ? Et surtout en ont-ils la volonté politique ? Julian Barnes-Dacey, directeur du programme Moyen-Orient du Conseil européen pour les relations internationales, considère qu’ils veulent “toujours éviter un affrontement direct, mais ce serait une erreur de penser que l’Iran n’est pas en mesure de répondre de manière plus forte à des frappes sur son propre territoire, frappes qu’ils verraient comme une menace existentielle”.

Selon Alex Vatanka, “nous sommes définitivement sortis de l’ère de la guerre de l’ombre et des proxys sans être encore au stade de la confrontation vraiment ouverte et directe. Nous sommes dans une zone grise. Il y avait cette fois-ci une intention délibérée de ne pas tuer d’Israéliens”. S’ils avaient voulu frapper plus fort, ils auraient donc pu, insiste le chercheur. Pour Fabian Hinz, la question de la distance est un enjeu qui limite Téhéran, restreignant le type de missiles utilisés. Mais le Hezbollah libanais, tout proche d’Israël, dispose d’autres options.

La question nucléaire

Ce qui pourrait néanmoins limiter la République islamique dans sa riposte, c’est sa situation financière tendue. L’Iran a utilisé un certain nombre de missiles dont certains plus sophistiqués, comme le missile hypersonique Fattah, pour un coût important. Et, en dehors du Hezbollah, l’Iran ne pourrait pas compter sur les houthistes dans le cas d’une autre attaque directe contre Israël. Néanmoins, si les Américains se voyaient entraînés davantage dans le conflit, le déclenchement d’attaques de proxys sur de multiples fronts pourrait les mettre en difficulté.

Autre inconnue, la question nucléaire. En l’absence d’accord, personne n’est en capacité de dire dans quel état se trouve le programme nucléaire iranien, mais la probabilité d’un stock d’uranium enrichi à 90 % première étape pour la construction d’une bombe atomique fait aujourd’hui consensus. Il n’est pas improbable que les Iraniens soient en capacité de faire au moins un test. Test qui prouverait au monde que leur capacité de dissuasion est toujours bien présente.

Dans cette équation à multiples inconnues, il y a celle du soutien de la population iranienne à ses dirigeants, dix-huit mois après le déclenchement du mouvement “Femme, vie, liberté”. Sur les réseaux sociaux, beaucoup d’Iraniens de la diaspora manifestent leur amitié aux Israéliens. En Iran, le slogan “Ni pour la Palestine ni pour le Liban” avait été régulièrement vu dans diverses manifestations contre le pouvoir. Et dans un pays marqué par huit ans de guerre avec l’Irak, l’idée d’une attaque directe sur le sol iranien ne peut pas être prise à la légère par la population.

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