Climat : quand la technologie dément le pessimisme ambiant, par Nicolas Bouzou

Climat : quand la technologie dément le pessimisme ambiant, par Nicolas Bouzou

Mentalement intoxiqués par le lobbying des ONG de l’effondrement écologique et par les refrains lancinants des extrémistes rouges-verts, nous avons intériorisé le fait que, dans le domaine environnemental, seules de mauvaises nouvelles peuvent survenir. Grosso modo, il faudrait passer notre vie à redoubler d’efforts, tout en sachant que cela ne sert a rien puisque l’apocalypse est au bout du chemin, punition de nos péchés capitalistes. Pourtant, des données récentes suggèrent que les pays occidentaux se décarbonent rapidement, et que le coût de la transition écologique pourrait être plus faible que prévu. Les bonnes nouvelles se multiplient mais nous n’osons même plus les regarder.

L’Agence internationale de l’énergie (AIE) a publié il y a quelques jours son rapport sur les émissions de CO2 en 2023. Au niveau mondial, ces émissions ont augmenté de 1,1 % l’année dernière. Ce chiffre est à double tranchant. Certes, il marque un nouveau record des émissions. Mais les augmentations annuelles sont de plus en plus faibles et laissent entrevoir un début prochain de baisse. Pour atteindre les objectifs de l’accord de Paris, ces émissions devront ensuite décroître très rapidement avant d’atteindre la neutralité en 2050. Nous en sommes encore très loin mais la répartition géographique de celles-ci est intéressante et porteuse d’espoir.

Le Royaume-Uni à la pointe

Dans les pays riches, les émissions sont revenues à leur niveau des années 1970. L’utilisation du charbon, le combustible le plus émetteur, a retrouvé quant à elle son niveau des années 1900. L’Union européenne émet désormais moins de carbone par habitant que la Chine, sans que cette dynamique ne soit compensée par une hausse des “importations” de CO2 : notre industrie se décarbone particulièrement vite. Cette amélioration de l’efficacité énergétique concerne aussi les Etats-Unis. Le Royaume-Uni obtient les résultats les plus spectaculaires. D’après Carbon Brief, un site d’information britannique dédié au réchauffement climatique, les émissions carbone du pays sont à leur plus bas depuis le XIXe siècle grâce à la substitution de l’énergie nucléaire au charbon. En tenant le rythme de ces dernières décennies, donc sans accélération de l’effort, le Royaume-Uni atteindra la neutralité carbone en 2050. C’est donc possible.

L’AIE explique que la décroissance n’est pour rien dans ces bons résultats. Aux Etats-Unis, au Canada, au Japon, dans la plupart des pays européens ou en Israël, les émissions de CO2 baissent, et ce, en tenant compte des émissions contenues dans les importations, alors que le PIB augmente. Les thuriféraires de la décroissance ont donc tout faux. C’est au contraire le “solutionnisme technologique”, tant caricaturé et décrié, qui a permis cette amélioration.

L’Agence cite le rôle clé de quatre technologies : le nucléaire, le renouvelable – éolien et photovoltaïque -, les pompes à chaleur et les voitures électriques. Si les émissions mondiales ne baissent pas encore, c’est à cause de la combustion du charbon en Chine et de la chute de la production hydroélectrique en Inde, liée aux moussons. La Chine prévoit néanmoins de faire décroître ses émissions en 2030, ce sera sans doute avant.

Des prix en baisse

Peut-on imaginer aller plus vite que prévu ? Oui, d’après les chiffres fournis là encore par l’AIE. Prenons l’exemple du photovoltaïque. Le rapport explique que l’atteinte de la neutralité carbone nous obligera à installer 650 gigawatts d’énergie solaire chaque année à partir de 2030. Nous y serons, en réalité, en 2025. La raison ? Une baisse ultrarapide du coût de cette énergie. Le prix du watt produit par un panneau photovoltaïque a chuté de 99,6 % depuis 1976, et la baisse continue.

Une autre bonne nouvelle ? La modération des cours du lithium fait baisser le prix des batteries électriques. D’après Goldman Sachs, le coût moyen des batteries passera sous la barre des 100 dollars le kilowatt dès l’année prochaine. En Norvège, plus de 80 % des voitures vendues aujourd’hui sont électriques. Il est possible que la transition écologique coûte moins cher que prévu. Une formidable nouvelle pour l’humanité, une catastrophe pour les révolutionnaires verts.

* Nicolas Bouzou, économiste et essayiste, est directeur du cabinet de conseil Asterès.

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