En Chine, le virologue qui a publié la première séquence du Covid-19 sous étroite surveillance

En Chine, le virologue qui a publié la première séquence du Covid-19 sous étroite surveillance

C’est une image rare, dans un pays où la censure à l’encontre des scientifiques est commune. Le 27 avril à Shanghai, Zhang Yongzhen, le premier virologue à avoir divulgué le génome du Covid-19 dans une base de données mondiale, a organisé une manifestation devant son laboratoire de recherches, officiellement fermé pour “rénovation”.

Alors que le scientifique s’y rendait comme chaque jour, ce dernier a découvert avec stupeur que l’installation avait été bouclée, l’un de ses collègues ayant même été enfermé à l’intérieur, selon un média chinois. Le lendemain, Zhang Yongzhen a décidé de dormir dehors devant les portes de l’établissement, en signe de protestation. “J’attends toujours que le problème soit résolu, mais personne est venu pour le résoudre”, aurait-il notamment déclaré à une agence de presse d’Etat, le 29 avril.

Dans un communiqué publié le 1er mai sur son réseau social, le Dr Zhang a indiqué que son équipe avait été autorisée à reprendre les recherches, tout en déclarant que des discussions étaient en cours pour résoudre un différend concernant le paiement de son travail antérieur. Si le gouvernement de Shanghai n’a fait aucun commentaire immédiat, Southern Weekend, un média chinois contrôlé par l’Etat, a cité un responsable du centre de santé publique de la ville – propriétaire du laboratoire – disant que le contrat avec le Dr Zhang avait pris fin en octobre 2022, précise le New York Times.

Museler le chercheur

Pour Edward Holmes, un collaborateur de longue date de Zhang Yongzhen cité dans Nature, cette fermeture est toutefois le signe que le gouvernement chinois cherche à museler le chercheur, ce dernier ayant publié des données pendant la pandémie sans l’autorisation des autorités. Avant 2020, Zhang disposait d’un vaste réseau de recherche et collectait des échantillons d’animaux et de personnes pour étudier l’évolution virale, explique Holmes. Mais depuis 2020, le travail de Zhang a largement consisté à analyser des échantillons précédemment collectés et la propre collaboration de Holmes avec Zhang s’est avérée moins prolifique, assure le scientifique. Selon la base de données Dimensions, Zhang a en effet co-écrit 5 articles de recherche en 2018, 9 en 2019 et 18 en 2020. Mais ce nombre est tombé à 3 en 2021 et 4 en 2022. Zhang a également co-écrit 6 articles en 2023, mais aucun ne contenait des données originales.

Des étudiants du Dr Zhang ont aussi publié dans un message sur le réseau social chinois Weibo – depuis supprimé – la série de défis auxquels était confronté le scientifique. Selon eux, le centre de Shanghai, affilié à l’université Fudan de la ville, n’a jamais reconnu officiellement l’emploi de Zhang, le laissant sans sécurité sociale ni prestations médicales. L’établissement aurait aussi mis fin prématurément à un accord de coopération de cinq ans avec le chercheur.

“Qu’un scientifique de premier plan dans son domaine, une personne qui a apporté une contribution au pays et à l’humanité en soit là est vraiment triste et effrayant”, pouvait-on lire dans le post, rapporte CNN. Contacté par le média américain, Zhang Yongzhen a assuré que les recherches d’une douzaine d’étudiants ont été affectées par la fermeture du laboratoire, ajoutant qu’il était “gênant” d’en dire davantage à l’heure actuelle.

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