Guerre Israël – Hamas : sur les campus américains, la tension ne retombe pas

Guerre Israël – Hamas : sur les campus américains, la tension ne retombe pas

Après avoir observé tout au long de la semaine les manifestations et arrestations de centaines d’élèves pro-palestiniens à travers les campus américains, une trentaine d’étudiants de l’université du Minnesota ont décidé d’occuper leur lieu d’étude, selon le Washington Post. Un tiers d’entre eux ont été arrêtés ce mardi 23 avril, accusés d’intrusion illégale.

Depuis plusieurs jours, les étudiants américains manifestent dans diverses universités pour exiger que leurs établissements rompent leurs partenariats avec les entreprises liées à Israël, ou qui tirent profit de la guerre à Gaza. La colère est repartie de l’université de Colombia où des centaines d’étudiants ont occupé, mercredi 17 avril, les pelouses du campus.

L’arrestation, jeudi 18 avril, d’une centaine d’entre eux après que la présidente a demandé à la police d’intervenir, a créé une onde de choc dans différents campus : “de l’université de Yale et du MIT sur la côte Est à l’université d’Etat de l’Ohio au centre du pays, en passant par l’université de Stanford et l’université de Californie à Berkeley, à l’Ouest”, énumère le Washington Post. Le Time, de son côté, parle d’une douzaine d’universités mobilisées. Pour justifier son recours aux forces de l’ordre, l’université a affirmé avoir constaté des comportements “hostiles et perturbant l’ordre public”. “Nous avons aussi appris qu’il y avait des slogans intimidants et que plusieurs incidents antisémites avaient été rapportés”, selon un porte-parole.

Des étudiants installent un campement à l’université de Berkeley (Californie, Etats-Unis) pour exiger la fin de la guerre à Gaza et l’arrêt des financements américains envers Israël, le 23 avril 2024.

“L’administration de mon université, mes élus au Congrès et même le président se comportent comme s’ils étaient des porte-parole de la communauté juive, assimilant l’antisionisme à l’antisémitisme. Ils nous réduisent au silence, nous suspendent”, a dénoncé devant la presse, keffiyeh sur les épaules, Sarah Borus, une étudiante juive pro-palestinienne du Barnard College de l’université de Columbia.

Dans la nuit de lundi à mardi, des scènes similaires se sont déroulées à l’université de New York (NYU), où 120 personnes ont été interpellées, selon un bilan de la police revu à la baisse. “C’était extrêmement violent”, a confié un étudiant au Time. Ces personnes ont été relâchées, a affirmé à l’AFP un porte-parole de la NYPD, la police new-yorkaise. Mais la tension est loin de retomber.

A Yale, une cinquantaine de personnes ont été arrêtées dans ces circonstances similaires. Mardi après-midi, à l’extérieur du campus de Columbia, une centaine de manifestants marchaient pacifiquement en cercle, avec des pancartes appelant à “cesser toute aide américaine à Israël”.

Embrasement dans les campus

De nombreuses universités américaines se sont retrouvées au cœur de l’actualité avec la guerre à Gaza, déclenchée il y a presque sept mois par une attaque du Hamas en Israël. Accusées de ne pas faire assez contre l’antisémitisme, deux présidentes d’universités, dont celle de Harvard, ont dû démissionner il y a quelques mois. Ces derniers jours, plusieurs campus se sont embrasés, recevant y compris des marques de solidarité de la part du corps enseignant.

A NYU, une association de professeurs a vivement dénoncé la décision “injustifiée” de l’université d’appeler la police à la rescousse, affirmant en outre que “personne sur la place n’avait été, à aucun moment, violent ou antisémite”. Marianne Hirsch, enseignante à Columbia et elle-même de confession juive, a dit à la presse être “extrêmement préoccupée par l’antisémitisme, et ce depuis toujours”. Mais “je suis extrêmement secouée en ce moment par le fait de voir comment l’antisémitisme est instrumentalisé, et utilisé à mauvais escient […], pour mettre fin à la liberté académique, au libre débat, à la pensée critique”, a-t-elle affirmé.

“Ils nous ont qualifiés de colons”

Le sujet s’est transformé en un débat mouvementé et souvent violent sur la liberté d’expression. Des étudiants et enseignants accusent leurs universités de chercher à censurer un discours politique, tandis que plusieurs personnalités, dont des élus du Congrès, accusent en retour les militants d’attiser l’antisémitisme – ce que les élèves réfutent. Le président républicain de la Chambre des représentants, Mike Johnson, a d’ailleurs annoncé qu’il rencontrerait des étudiants juifs à Columbia mercredi pour évoquer “l’inquiétante montée d’un antisémitisme virulent” sur les campus.

Des manifestants pro-palestiniens se rassemblent pour protester à l’intérieur et à l’extérieur des portes verrouillées du campus de l’université Columbia à New York, aux Etats-Unis, le 23 avril 2024.

Sur CNN, un étudiant juif de Columbia, Nick Baum, a affirmé se sentir depuis quelques jours “carrément en danger”. “Ils nous ont qualifiés de colons”, a-t-il déclaré. “Je pense qu’il est très important de se rappeler qu’être mal à l’aise est différent d’être en danger”, a rétorqué devant les médias une autre étudiante juive, Soph Askanase, qui dit avoir été suspendue par Columbia pour son activisme quelques heures avant d’être arrêtée.

Face aux tensions, l’université a affirmé œuvrer “d’arrache-pied pour résoudre la situation sur le campus”. Les étudiants “ont le droit de manifester, mais ils ne sont pas autorisés à perturber la vie du campus ou à harceler et intimider les autres étudiants et les membres de notre communauté. Nous agissons sur la base de préoccupations exprimées par nos étudiants juifs”, a affirmé Ben Chang, un responsable de Columbia. L’accès à l’université a ainsi été interdit à certains étudiants ayant participé aux manifestations, qui ont été suspendus, selon CNN. Dimanche, le président démocrate Joe Biden était lui-même intervenu, affirmant que l’antisémitisme n’avait “pas sa place” sur les campus.

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