Rapport au travail : ce que les “millenial” managers nous apprennent

Rapport au travail : ce que les “millenial” managers nous apprennent

Tasse de café à la main, une jeune trentenaire liste, face caméra, les valeurs managériales qu’elle applique à son équipe. “Je suis une millenial manager : bien sûr que tu n’as pas besoin de justifier tes horaires, tant que tu remplis tes objectifs. Et bien sûr que je n’ai pas à savoir pourquoi tu as besoin de congés, tant que tu me préviens quand tu es là ou non”, explique-t-elle dans une vidéo publiée sur TikTok, déjà visionnée par près d’un million de personnes. Sur le réseau social, prisé des 18-34 ans, la tendance explose : des dizaines de séquences de ce type mettent en scène des managers de la génération Y – née entre le début des années 1980 et le milieu des années 1990 –, exposant leur vision du management post-Covid, entre télétravail, congés payés, horaires, santé mentale ou quête de sens. Parfois caricaturées par les internautes, qui moquent la bienveillance supposée de ces millenial managers, ces vidéos décalées et les débats qu’elles suscitent en commentaires témoignent d’un réel bouleversement dans la sphère professionnelle.

“Depuis la pandémie, ces nouvelles générations de chefs sont certainement celles qui sont confrontées au plus grand nombre de défis en termes de management, de flexibilité du temps de travail et d’écoute des collaborateurs”, explique Elodie Gentina, professeure à l’IESEG School of management et auteure de Manager la génération Z, mieux appréhender les nouveaux comportements (Dunod, 2023). D’autant que ces millenial managers doivent apprendre à conjuguer les attentes de la génération Z (née entre 1997 et 2010), et celles des plus anciens, souvent plus haut placés dans l’organigramme. “Ils se retrouvent dans une sorte d’étau, à jongler entre les différentes visions du rapport au travail. Cela nécessite une grande agilité managériale, qui peut être difficile à gérer”, développe la spécialiste.

Quentin, millenial manager de 30 ans, en a fait l’expérience dans son précédent boulot. Le jeune homme, qui souhaitait laisser la possibilité à ses collaborateurs de prendre un train un peu plus tôt le vendredi, ou de quitter le travail dès leurs tâches terminées, a dû se confronter à la vision de sa hiérarchie, bien plus regardante sur le présentéisme. “Mon chef était plutôt du genre à nous demander si on avait pris notre après-midi si on osait partir avant 19 heures… A partir du moment où lui-même mettait des limites sur le sujet, il était compliqué de céder cette flexibilité à mes équipes sans risquer un clash. Tout ça a joué dans ma décision de partir”, lâche-t-il. Le trentenaire, qui a retrouvé du travail, est très clair sur sa nouvelle vision managériale : “Tant que les objectifs sont atteints, mes collaborateurs partent à l’heure qu’ils veulent. Pour moi, c’est une question de responsabiliser les gens, plutôt que les fliquer… Et ça n’empêche personne d’être plus performant, au contraire !”

La santé mentale, un sujet plus facilement abordé

Selon une étude du cabinet Deloitte menée en 2023, la santé mentale est aussi l’une des préoccupations majeures des jeunes actifs : près de la moitié de la génération Z (46 %) et 4 millenials sur 10 (39 %) déclarent ainsi se sentir régulièrement stressés ou anxieux au travail. Dans le même temps, la moitié des personnes interrogées reconnaissent que leurs employeurs prennent la santé mentale plus au sérieux et que leurs efforts sur le sujet ont un impact positif. “Pour la nouvelle génération, il est très important d’être écouté par le manager, il y a une vraie notion de confiance : je me rends compte par exemple que les sujets de santé mentale sont plus facilement abordés. Ils ont un réel besoin de communiquer sur ce qu’ils ressentent personnellement”, décrit Antoine, millenial manager chez L’Oréal. Lorsqu’il a pris son poste, ce jeune cadre a ainsi décidé de mettre en place un point régulier avec ses équipes pour échanger sur ces questions de bien-être au travail.

“Le rapport à l’autorité a changé : pour être respecté en tant que manager, il ne faut plus être le plus âgé, le plus expert ou le plus diplômé, mais plutôt le plus compréhensif et le plus à l’écoute”, décrypte Elodie Gentira, selon laquelle le management “à l’ancienne, qui mettait tous les collaborateurs dans le même panier en espérant que la pression suffise à les motiver, n’est plus possible aujourd’hui, sans quoi les entreprises prennent le risque de perdre la confiance et la loyauté de leurs employés”.

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