Russie : l’Occident va devoir “composer encore longtemps” avec Poutine

Russie : l’Occident va devoir “composer encore longtemps” avec Poutine

Le résultat du scrutin n’avait rien d’un mystère. Ce dimanche 17 mars, Vladimir Poutine a été réélu à 87 % des suffrages exprimés à l’issue de trois jours de vote. “Un résultat jamais vu en vingt-quatre ans de pouvoir”, constate en toute fin de soirée le journal italien La Repubblica. D’autant qu’avec sa réélection, le chef d’Etat âgé de 71 ans est désormais en passe d’arracher à Staline le titre de la plus grande longévité au Kremlin. Un record, relevé par une grande partie de la presse étrangère depuis hier.

Le journal d’opposition russe Meduza, qui avait massivement relayé l’initiative “Midi contre Poutine” – consistant à se rendre dans tous les bureaux de vote dimanche 17 mars à midi et à voter contre Poutine – rappelle ainsi à juste titre : “Poutine est au pouvoir en Russie depuis près d’un quart de siècle et son prochain mandat court jusqu’en 2030, date à laquelle il sera libre de se présenter à nouveau aux élections, grâce aux amendements constitutionnels adoptés en 2021.”

Midi contre Poutine, une opération à “succès”

Indéboulonnable ? Facile de l’être, lorsque “le Kremlin veille à ce que Vladimir Poutine n’ait pas d’adversaire crédible”, évacuent d’emblée nos confrères de la BBC News. D’autant que pour couper l’herbe sous le pied des opposants, les autorités russes regorgent d’imagination.

La Repubblica relaie notamment l’histoire de Vladislav, qui arbore une broche “Russie au travail” sur sa doudoune. Tout juste 20 ans, le jeune homme raconte à nos confrères avoir reçu 1000 roubles en échange de son vote. Ou encore de Rifat et Elvira, un couple de trentenaires qui faisaient la queue pour récupérer une couverture et un oreiller : leur récompense “pour avoir voté à un référendum pour rebaptiser une rue”, et donné leur vote numérique à celui qu’ils désignent comme “le meilleur président du monde”. Plus loufoque encore : pour ruiner l’opération “Midi contre Poutine”, le quotidien italien raconte que “des cours de cuisine ont été organisés dans les foires du Mardi gras du calendrier orthodoxe”. Et d’ajouter sur le ton de l’ironie : “A midi bien sûr”.

“Midi contre Poutine”, une opération orchestrée par l’opposition à l’actuel chef du Kremlin, qui a toutefois rencontré un franc “succès”, note Le Temps en Suisse. “Une idée toute simple” qui s’est in fine révélée “très efficace”. “Il est difficile ce dimanche soir de mesurer la véritable portée de cette action. Mais les images de ces Russes faisant la queue devant les bureaux de vote, de la Sibérie jusqu’à Kaliningrad, sont bien là”, se réjouit le quotidien suisse. Et de conter l’apparition dans la file d’attente du consulat russe de Berlin de Ioulia Navalnaïa, la veuve de l’opposant politique Alexeï Navalny, mort en prison le 17 février. “Le clou de la journée”, résume Le Temps.

Un scrutin “opaque”

Car ce dimanche, impossible pour la presse étrangère de ne pas mentionner celui qui constituait un des plus farouches opposants de Vladimir Poutine : Alexeï Navalny. A minuit passé, El País s’étonne : dans son discours de réélection, le chef du Kremlin a “osé mentionner le nom de son grand ennemi politique pour la première fois depuis sa mort”.

Le quotidien espagnol a également qualifié le scrutin de “farce électorale”, en écho à la réaction du Washington Post, aux Etats-Unis. Le journal américain dénonce notamment les “épisodes de bourrage d’urnes, d’intimidation des électeurs dans certains bureaux de vote”, et les nombreuses “tentatives de manipulations” relevées par les groupes de surveillance des élections en exil.

Et comme de nombreux autres observateurs internationaux, El País s’interroge sur le vote électronique, qualifié “d’opaque”. Le journal met un point d’orgue à dénoncer un “système électoral très suspect” au sein duquel “les rivaux de Poutine ont été écrasés” : “les forces de sécurité et leurs juges ne laissent aucune place à la contestation pacifique”, ce qui rend impossible pour “les électeurs mécontents du Kremlin” de manifester leur colère par des gestes aussi symboliques qu’inoffensifs.

Pour le média spécialisé Politico, cela ne fait “aucun doute” : “Poutine utilisera le résultat comme preuve d’un soutien de masse. Car “bien qu’il s’agisse d’un cirque évident, le Kremlin ne s’en soucie peut-être pas autant”, se rendent à l’évidence nos confrères de l’édition européenne de Politico.

Après avoir suivi avec attention la conférence de presse de Vladimir Poutine, le New York Times a estimé que le chef du Kremlin était apparu “plus enhardi que jamais, renforçant sa confrontation avec l’Occident et montrant sa volonté de poursuivre l’escalade des tensions”. Et de rejoindre, comme beaucoup d’autres la conclusion du quotidien italien La Repubblica : “L’Occident devra composer encore longtemps avec l’ancien agent du KGB”.

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