Assurance chômage : les mises en garde de l’aile gauche de la majorité

Assurance chômage : les mises en garde de l’aile gauche de la majorité

Vers un nouvel épisode de divisions pour l’exécutif et sa majorité ? Après les plaies de la loi immigration, celles de la nouvelle réforme de l’assurance chômage ? Envisagée par Gabriel Attal, elle devrait prévoir une réduction de “plusieurs mois” de la durée d’indemnisation des chômeurs, actuellement de 18 mois pour les moins de 53 ans, sans aller en dessous de 12 mois. Plusieurs membres de la Macronie ont multiplié les mises en garde contre ce projet du gouvernement, qui intervient en plein contexte de dérapage dans les comptes publics, puisque la France a accusé un déficit de 5,5 % du PIB en 2023, bien plus que les 4,9 % initialement prévus.

Mais “soyons clairs : ce n’est pas une réforme financière. Nous ne la faisons pas pour faire des économies mais pour parvenir au plein-emploi, c’est-à-dire 5 % de taux de chômage”, a assuré samedi à Ouest-France Bruno Le Maire. “On ne s’en prend pas aux chômeurs”, a promis le ministre de l’Economie. Cette lecture a cependant été vivement contestée, ce dimanche 31 mars, par Sacha Houlié, sur le plateau du Grand Jury RTL/Le Figaro/M6. “Si nous réduisons la durée d’indemnisation, à quelles fins le faisons-nous ? Une mesure d’économie. Est-ce que je pense qu’il faut faire une mesure d’économie sur les chômeurs aujourd’hui ? Je ne le pense pas”, a déclaré le président de la commission des Lois de l’Assemblée.

L’élu de la Vienne a fait valoir que l’exécutif avait déjà réformé par deux fois l’assurance chômage, en 2019 et 2023, en mettant notamment en place une mesure de “contracyclicité”, c’est-à-dire que les conditions d’indemnisation se durcissent quand le chômage baisse, et s’assouplissent quand il augmente. “Est-ce qu’il faut une nouvelle réforme sur ce sujet alors même qu’on constate que le chômage ne baisse plus”, s’est-il interrogé, estimant que les “règles” étaient déjà “sévères”. “A partir du moment où je constate que ce n’est pas le retour à l’emploi qui est la motivation, que ce sont des économies qui sont recherchées, je dis que ce n’est pas la bonne voie”, a-t-il insisté.

“Trop durs”

Selon Sacha Houlié, plusieurs cadres de la majorité tiennent la même ligne que lui face au projet du gouvernement, citant le président de la commission des Affaires économiques Stéphane Travert, le vice-président du groupe Renaissance Marc Ferracci, ou encore la députée de Paris Astrid Panosyan-Bouvet. Tous des marcheurs de la première heure. Ainsi cette dernière a-t-elle estimé, vendredi, que “réduire la durée de l’indemnisation chômage des seniors serait injuste”, jugeant sur le réseau social X que “l’urgence n’est pas de réformer l’assurance chômage, mais de rendre attractifs les métiers qui ne le sont pas […] et lever les freins centraux à l’emploi”.

De son côté, Marc Ferracci a considéré que la “priorité” était de “toucher au critère de l’éligibilité”, c’est-à-dire le nombre de mois travaillés pour être indemnisé. “Après, si le gouvernement veut toucher à la durée, il aura l’occasion de le faire”, a-t-il évacué jeudi sur France 2. Ce dimanche, un autre tenant de l’aile gauche a pris ses distances : Clément Beaune, écarté du gouvernement en janvier après avoir exprimé ses réserves sur la loi immigration. “Nous devons être prudents et cohérents”, a-t-il souligné sur France Info, appelant à être “plus protecteur” car “le marché du travail va moins bien”. L’ancien ministre des Transports a aussi reconnu qu’il existait un risque de précariser les plus fragiles “si on allait vers des paramètres qui sont trop durs”.

“Gabriel Attal n’a jamais présenté cette réforme comme une mesure d’économie” mais comme “une mesure pour dynamiser les recettes”, assure en retour auprès de l’AFP un conseiller de l’exécutif, notant que le Premier ministre avait pris soin de rassembler des députés de la majorité, dont certains de l’aile gauche, avant de lancer ses pistes au JT mercredi. “Ceux qui étaient présents étaient plutôt à l’aise sur le projet”, affirme le même, circonscrivant les divergences à “une minorité au sein du groupe”. Un travail de conviction que le Premier ministre répétera mardi, en se rendant devant les députés Renaissance. En espérant ne pas ajouter la menace d’un front politique au front social.

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