Recrutements : “On ne connaît pas 50 % des métiers des dix prochaines années”

Recrutements : “On ne connaît pas 50 % des métiers des dix prochaines années”

Avec 5 000 clients représentant 550 collaborateurs sur le marché français pour toutes les formes de contrats mises en œuvre sur l’ensemble de la chaîne RH, Samuel Tamagnaud cofondateur, directeur général adjoint et président France, Afrique et Moyen-Orient de Morgan Philips Group, constate, depuis la crise sanitaire, “un rééquilibrage total avec des candidats qui veulent choisir leur entreprise et travailler différemment”. Premier changement : une augmentation du management de transition. Si une partie de ces managers y vient “par défaut”, d’autres au contraire “ont envie de se faire plaisir avec des missions pendant un temps donné”.

Deuxième changement : une montée en puissance des 25-30 ans qui veulent travailler en free-lance. “Ils ne veulent pas être dépendants d’une entreprise et acceptent des missions de trois à six mois en général” – avec un taux journalier moyen de 350 à 900 euros pour un développeur d’applications mobiles, de 450 à 900 euros pour un ingénieur en développement logiciel et opérations système (DevOps), selon Morgan Philips Group. Des jeunes plus fidèles à un métier qu’à un groupe : ils veulent des projets et savoir comment travaille l’entreprise, alors il faut être inventif.

“L’IA est un outil, mais l’humain reste primordial”

“En France, on recrute encore sur le CV, alors que, en Asie, c’est sur la compétence. Mais l’expertise ’à la française’ est très recherchée à l’international, cette capacité à réfléchir ’out of the box’, ce supplément d’âme qui donne une vision différente”, précise l’expert. Son mode opératoire : cibler le candidat idéal. “En France mais aussi à l’île Maurice, nous avons des équipes spécialisées dans la recherche, qui utilisent l’IA pour trouver des candidats cachés ou en écoute passive, présents à 90 % sur le Net. “J’ai des experts ’Google’ qui peuvent les contacter.” Puis les convaincre. “L’IA est un outil, mais l’humain reste primordial pour vendre un projet professionnel pour les dix prochaines années !” “A 80 %, les hard skills [NDLR : connaissances métiers et savoir-faire] sont connus, plus simples à évaluer. Le client mise tout sur les compétences et les soft skills [comportements].” Ceux-ci sont indispensables “pour intégrer l’ADN d’une entreprise”. “Il faut que le candidat et le client parlent le même langage.”

Ce n’est pas encore gagné. “Maintenant, 3 entretiens sur 4 peuvent se faire en visio. Jusqu’au dernier moment, on n’est pas sûr que le candidat signe.” Attention aux notations sur Glassdoor, notamment. L’argent est évidemment un élément indispensable pour séduire. “Mais il faut aussi un projet, une équipe et du’fit’ [de l’accroche] avec le manager, sinon il va vite y avoir de la frustration. L’équilibre vie professionnelle/vie privée fait partie de l’intérêt individuel pour un poste. Pour les jeunes collaborateurs, c’est deux jours de télétravail au minimum et que les valeurs annoncées par l’entreprise soient conformes à la réalité.”

Même en période d’essai, le salarié peut se remettre sur le marché. “Nous proposons un ’coach à l’intégration’ pour être sûrs que le candidat va rester. Le coût d’un recrutement raté peut être abyssal. Plus l’organisation est petite, plus le recrutement est stratégique et primordial.”

Faire évoluer

L’entreprise peut aussi regarder si elle ne possède pas le talent adéquat. L’épisode Covid a révélé qu’il fallait “faire grandir les talents à l’intérieur de l’entreprise pour qu’ils ne partent pas”. “Aujourd’hui, le métier de DRH a changé : il doit développer le potentiel des salariés en interne et en trouver d’autres à l’extérieur”, précise Samuel Tamagnaud. Pour retenir le collaborateur, le faire changer de poste tous les trois ou quatre ans, lui expliquer son parcours et intégrer ses souhaits au processus. “Il faut veiller à l’employabilité et à l’agilité. Mais tous les salariés ne souhaitent pas forcément changer de poste et certains préfèrent devenir experts sans être manager. Alors il faut leur permettre de grandir de façon horizontale. La transversalité est un bon compromis.”

Actuellement, les métiers en tension sont ceux liés à une expertise : la tech, les supports, la supply chain, les ingénieurs, le digital, les RH, les finances, des experts et aussi des managers. Les énergies vertes ont le vent en poupe, mais “le manque d’anticipation dans la formation des ressources se paie très cher”. La filière comptable en est un exemple : un directeur de la comptabilité en management de transition coûte de 650 à 1 500 euros hors taxes de taux journalier moyen. Et demain ? “On ne connaît pas 50 % des métiers des dix prochaines années !” conclut Samuel Tamagnaud.

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