Placements : ces embûches que vous réserve l’année 2024

Placements : ces embûches que vous réserve l’année 2024

L’année 2023 aura déjoué tous les pronostics. Les experts s’attendaient à une débâcle sur les actions ? Les marchés en ont décidé autrement. L’indice phare de la Bourse de Paris, le CAC 40, affiche ainsi un solide bilan avec une hausse de 16,5 % sur la période. Mieux : aux Etats-Unis, le S & P 500 a gagné plus de 24 % en douze mois et le Nasdaq – l’indice des valeurs technologiques – plus de 43 % ! Les raisons de cette santé insolente ? Tout d’abord, une bonne résistance des entreprises à un environnement économique pourtant difficile. Mais aussi beaucoup d’espoir de la part des investisseurs dans les développements de l’intelligence artificielle et dans une probable détente de la politique monétaire. Un optimisme qui a largement soutenu les cours en fin d’année. A noter toutefois que “cette performance cache d’énormes disparités entre les valeurs, comme le souligne Nadine Trémollières, directrice de Primonial Portfolio Solutions. Au sein de l’indice américain, les sept titres Apple, Amazon, Microsoft, Alphabet, Meta, Tesla et Nvidia, appelés les 7 Magnifiques, ont représenté quasiment 80 % de la performance globale.”

NEW3789CT De belles performances sur les actions

Le monde des taux s’est montré moins surprenant. Avec six hausses des taux directeurs dans l’année, la Banque centrale européenne a montré la voie. Résultat, tous les placements de court terme ont vu leur rémunération grimper en flèche. Si le taux du livret A a été plafonné à 3 % par le gouvernement français, les sicav monétaires ont offert une performance moyenne de 3,37 %, selon Morningstar. Les super-livrets et les comptes à terme ont aussi permis de placer de l’argent sans risque à bon compte. Pour la première fois depuis de nombreuses années, les établissements financiers ont ressorti des campagnes promotionnelles avec des bonus pouvant atteindre les 5 %.

Seul l’immobilier aura réellement pâti du contexte. Bouleversé par la hausse du coût du crédit d’un côté et par une réticence des vendeurs à revoir leurs prétentions de l’autre, le marché a fléchi. “Pour la première fois depuis sept ans, le nombre de ventes de logements anciens est passé sous la barre des 900 000 transactions”, indique ainsi Meilleurs Agents. Malgré tout, un recul des prix est enclenché. Ce même acteur estime à 1,8 % la décrue des tarifs de la pierre au niveau national, un chiffre qui devrait encore s’amplifier. Les détenteurs de fonds immobiliers non cotés ont également perçu le changement de paradigme : depuis l’été 2023, près de 25 sociétés civiles de placements immobilier (SCPI) ont vu leur prix baisser. Et ce parfois dans des proportions significatives, les plus fortes chutes atteignant les 17 %.

Pour réaliser les bons arbitrages en ce début d’année 2024, deux éléments doivent donc être particulièrement scrutés : le rythme de la décrue de l’inflation et l’évolution de la politique monétaire. Or, la première a eu tendance à surprendre à la baisse ces derniers mois. En zone euro, l’inflation s’est élevée “seulement” à 2,9 % en décembre. Dans ce contexte, un desserrement de politique monétaire devient très probable, même si le calendrier l’est, lui, beaucoup moins. “Nous avons touché un point haut sur les taux directeurs et la descente pourrait intervenir plus vite qu’anticipé”, avance Gilles Moëc, chef économiste du groupe Axa.

L’épargne de précaution reste attractive

Pour l’épargnant, 2024 sera donc à la fois dans le prolongement de l’année passée… tout en étant différente. Les produits sécuritaires devraient rester attractifs. Cela concerne bien sûr les supports d’épargne de précaution, à l’image des livrets et des comptes à terme. Cependant, leur rémunération devrait progressivement baisser, à l’exception de celles du livret A et du livret de développement durable et solidaire, dont la situation est gelée jusqu’en janvier 2025. Le livret d’épargne populaire a été la première victime de ce recul : payé 6 % l’an dernier, il ne délivre plus que 5 % à ses détenteurs actuels, du fait de la chute de l’inflation. Du côté de l’assurance-vie, la rémunération des fonds en euros est elle aussi nettement orientée à la hausse avec des rendements portés par les marchés et par les réserves des années passées. Cet actif garanti devrait donc retrouver de l’intérêt – et des flux – cette année.

Les adeptes de la pierre, eux, auront encore du souci à se faire ! Moins réactif que les marchés cotés, l’immobilier aura encore besoin de temps pour s’ajuster au nouveau contexte. Les communications des sociétés de gestion immobilière au cours du premier semestre permettront de mesurer l’ampleur des dégâts. Il est en effet à craindre que certaines SCPI subissent encore des baisses de valorisation – à répercuter sur leurs prix. D’autant que ces supports doivent aussi intégrer les changements structurels qui affectent les bureaux, avec l’essor du télétravail et la réglementation énergétique. Néanmoins, pour ces produits comme sur l’ensemble du marché immobilier, il faudra faire preuve de discernement car la période peut être propice à des investissements opportunistes à bon prix…

La direction des actifs risqués est plus difficile à appréhender. Les marchés actions risquent en effet de souffler le chaud et le froid. D’une part, la confirmation d’une détente sur les taux d’intérêt devrait susciter de l’euphorie. En revanche, les résultats des entreprises devraient quelque peu doucher cet enthousiasme si le ralentissement économique – voire la récession – se matérialise. La hausse des marchés actions en 2023 invite en outre à se montrer prudent, une consolidation pouvant avoir lieu. Pour investir, il faudra donc faire preuve de sélectivité et de méthode.

Pour traverser les zones de turbulences, l’investissement programmé reste une valeur sûre : en plaçant régulièrement une même somme sur les marchés, cette technique permet d’acquérir peu de titres quand ces derniers sont chers et une plus grande quantité lorsqu’ils sont bon marché. Autre conseil : “Il faut penser long terme et opter pour des thématiques dotées d’une croissance structurelle pour les cinq à dix prochaines années”, estime Tom Lemaigre, gérant au sein de l’équipe actions européennes chez Janus Henderson Investors.

Pour se construire un patrimoine bien équilibré et défensif, les maîtres-mots restent la diversification et la décorrélation. En effet, rien ne sert d’empiler les produits s’ils évoluent de manière identique. Certaines catégories de placements peuvent se révéler très utiles dans cet objectif, tels que les actifs réels et les placements plaisir. Attention toutefois aux mauvaises surprises : des arnaqueurs en tout genre guettent les épargnants mal informés en quête de rendement excessifs. La première règle pour gagner de l’argent consiste à ne pas en perdre…

Un article du dossier spécial de L’Express “Investir en 2024 : les bonnes stratégies face un environnement incertain”, publié dans l’hebdo du 15 février

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